J’ai mis fin à ma relation.

J’étais en manque d’attention.

J’ai re-téléchargé l’app pour swiper.

J'ai actualisé mon profil.

J'ai ajouté description teintée d’humour.

Pis j’ai joué à Tinder.

Je ne savais même pas qu’il y avait autant de testostérone dans un rayon aussi étroit. À cette quantité-là pis le début du printemps, j’suis surprise qu’on ne s’étouffe pas encore avec l’odeur de spermatozoïdes qui dégèlent.

Sans vraiment le savoir, je crois que je voyais l’amour comme un jeu de pouvoir. Donc, j’embarque et je laisse mes ovules bourgeonner pour gagner des parties.

J’ignore ceux qui me disent juste « Salut ! ». Il faut bien faire le tri. Tu reviendras quand t’auras une pick-up line à laquelle j’aurai ri. Trouve le gars parfait. Swipe à droite. Un match. C’est encore plus facile qu’un eye-contact indiscret de l’autre bord du bar. Ça commence par une mise au jeu. Après un message ou deux, c’est lequel le moins peureux des deux ?

Une fois que la glace est brisée, la guerre est déclarée. Sauve qui peut, tu ne t’en sortiras peut-être pas si heureux. On place nos cartes. Il écrit ça va avec un « s ». Je ferme les yeux sur cette erreur orthographique immonde. Mais il enchaîne avec « ktf à souar? ». Ça y est. Deux mots, trois mouvements, la flamme est partie. Ça fleurira pas cette année.

Ça recommence. On replante nos semences.

Un match. Il accorde ses verbes, maîtrise le sarcasme. Je nous vois déjà cultiver notre jardin dans un petit patelin. On contrôle nos envies. Il faut qu’on élabore une stratégie. Le plus indépendant gagne des points de temps en temps. Le plus naïf baisse sa garde trop facilement, jeune insouciant. Ça bluffe. Ça triche. Ça ne laisse pas de chances. L’un décide de s’ouvrir un peu, c’est comme une faille dans son jeu, il se fait surprendre par un coup bas qu’il n’attendait pas. Le premier à texter perd rapidement une vie parce qu’il s’est trop investi.

Mais, 9 minutes plus tard, il me demande si «je cross rien que». Impatient. Ça pressait tant ? C’est comme si l’enfant de chienne venait de dropper une bombe dans mon champ. C’est dévalorisant.

Au final, j’ai compris. C’est celui qui est le moins démoli qui gagne la partie. C’est les Hunger Games par texto. Celui qui tombe en amour a perdu. Parce que maintenant, le but c’est pas d’aimer, c’est de gagner.

Outrée par le questionnement de ma graine en pleine floraison, j’ai pogné mon cell, j’ai supprimé l’appli.

Pis pour mieux faire, j’ai texté mon ex pour savoir si sa courge avait mûri. #fuckmonjardin.

Source image principale : Pixabay

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