Février 2016, après une journée plus difficile que les autres au travail, j’étais dans une clinique privée de la rue Sherbrooke pour passer une échographie suite à une masse découverte dans mon sein droit. La semaine suivante, à l’hôpital Hôtel-Dieu pour une biopsie. Quelques semaines plus tard, on me rappelait pour une imagerie par résonance magnétique (IRM). Début avril, j’apprenais que j’avais le cancer du sein. On m’organisa donc dans les jours qui suivirent un rendez-vous dans une clinique de fertilité pour qu’on m’y prélève des ovules, parce que les traitements risquaient d’affecter ma capacité à avoir des enfants. La semaine suivante, je me faisais enlever le sein droit.

Avoir un cancer, c’est un peu comme se retrouver dans l’œil de la tornade. Tout se bouscule autour de nous, tout va très vite tandis qu’on est soi-même comme figé dans le temps.

Je me rappelle le sentiment très fort d’être en décalage avec les gens autour de moi. D’avoir l’impression de vivre dans un autre monde et de ne pas vouloir être là. D’avoir tellement envie d’être au même endroit que les autres. De souhaiter être celle qui console et non pas être la consolée.

Durant cette période, on ne dirige plus notre propre vie. Les rendez-vous, les opérations, les convalescences, la prise de médicaments et tous les effets secondaires… on ne contrôle plus rien.

Cancer, vivre, Santé

Source : Jolyane Pelle

Dans mon cas, j’étais déjà en rémission un an après l’annonce du diagnostic.  On peut dire que dans la boite à mauvais numéros, j’ai eu la chance d’en piger un bon.

Je me suis rendu compte qu’un aspect majeur du cancer passe sous silence : la vie après la maladie. Quand, après avoir été basculée de gauche à droite et avoir eu énormément d’attention de tout le monde, on est guérie et qu’il faut reprendre notre vie comme on la menait avant, on vit une sorte de déchirement intérieur.

C’était pour moi une période très difficile.

Quand j’ai appris que j’avais le cancer, j’ai concentré toute mon énergie afin de m’en sortir. J’étais sous l’effet de l’adrénaline et je n’ai pas pris le temps de vivre mes émotions… ou je considérais que je n’avais pas le temps de le faire. On se fait surtout dire que les gens qui s’en sortent sont ceux qui restent positifs, alors on ne se permet pas d’entrer dans ces émotions négatives et effrayantes qui se cachent au creux de notre ventre.

Toute cette peur de mourir, la tristesse de voir ses amis, sa famille, avoir de la peine et s’inquiéter, la douleur de voir son père pleurer pour la première fois, regarder son neveu en se demandant si on sera présent pour le voir grandir ou encore de se demander si celui qu’on aime pourrait nous oublier et refaire sa vie avec une autre si on avait le malheur de disparaître….

Tout est remonté à la surface lors de ma rémission. Je sentais aussi qu’il était impossible d’en parler aux gens qui m’entouraient. Ils m’empêchaient d’exprimer ces émotions parce qu’ils avaient envie que l’on passe tous à autre chose et, surtout,  ils étaient tellement heureux que tout se termine bien.

Heureusement, j’ai découvert les 5 à 7 pour les jeunes adultes qui vivent avec un cancer. Organisés par la Fondation virage, J’y ai été merveilleusement bien accueillie et ils m’ont permis de partager avec des gens avec qui j’étais plus à l’aise de m’exprimer. J’ai aussi pu relativiser en écoutant les témoignages de jeunes extrêmement inspirants par leur force et leur positivisme. Ces rencontres se passent au restaurant Sandhu sur la rue Papineau et le repas est offert aux participants.

Plus de détails ici.

Finalement, j’ai pu clore ce chapitre et enfin avoir le sentiment de pouvoir passer à autre chose.

Source de l'image de couverture @Kathrin Honesta

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