Nous avions pourtant tout, c’est cette réalisation qui m’a frappé de plein fouet cette semaine. En arrêt forcé à la maison, puisque j’ai contracté le maudit virus qui m’avait épargné jusqu’alors, j’ai pleinement profité de mes temps d’éveil entre deux siestes comateuses pour lire et laisser mon esprit vagabonder. Peu habitué à prendre le temps de ne rien faire, constamment en train de réaliser tâche après tâche dans la danse folle du quotidien, cette pause m’a ancré dans le moment présent comme rien auparavant.

J'ai lu, durant ma quarantaine, des ouvrages de Pierre Rhabi traitant de l’importance de l’émerveillement devant mère nature. Repensant à une lecture sur les Incas et au mode de vie ancestral des peuples autochtones, en harmonie avec la biodiversité, je n’ai pas pu m’empêcher de sentir mon âme s’interroger sur notre manière de vivre. Mon esprit m'a questionné quant à ma spiritualité confuse et mon cœur m'a demandé, tristement :

« Que sommes-nous en train de faire de notre chère Terre-Mère? »

Nous avions pourtant tout.

Tout pour vivre en harmonie avec la nature, ses lois, ses saisons et ses raisons. Tout pour se nourrir, se vêtir, s’abriter et se contenter. Nous avions l’instant présent, la possibilité d’un émerveillement infini devant les mystères de la vie, devant les beautés dont foisonnait le terreau fertile de vie. Nous avions l’insouciance heureuse des autres mammifères sur Terre, doublée de connexions interpersonnelles avec nos compatriotes humains.

Avec le feu comme point d’ancrage, les étoiles comme lueurs témoignant de l’immensité du monde à découvrir, nos familles avec qui partager tous les petits plaisirs de la vie dans ses plus simples habits, que nous manquait donc-t-il?

Image par Courtnie Tosana via Unsplash

Nous avions tout et pourtant nous avons voulu plus.

Plus que ce que la nature nous offrait, plus que nous en avions besoin et plus que ce à quoi nous étions destinés. Désirant nous élever au-dessus de notre condition d'animal, nous avons défié les règles de notre humanité. Jusqu’alors vivant au rythme des vivants, conservant notre place sur l’échiquier de la chaine alimentaire, nous avions tout pour vivre heureux, satisfait et pleinement. 

Assez intelligents pour comprendre l’importance de l’équilibre entre l’homme et la nature, nécessaire à la survie de notre espèce qui dépend entièrement de notre habitat, nous respections les lois de notre environnement, nous vénérions toutes les formes de vie et nous vivions en communion avec elles. Étant jusqu’à cet instant critique une partie prenante du cycle de la vie, nous nous sommes retirés pour devenir une classe à part. Locataires, nous avons tenté d’en devenir propriétaire, à notre grand dam.

Nous avions tout pour vivre en paix mais nous avons voulu, par avidité, posséder, conquérir, envahir et cumuler. Plus de richesses et plus de ressources, plus de gloire et plus de renom, plus de titres et plus d’armes et plus de vanité. Prétendant pouvoir dominer, subordonner et utiliser à son propre avantage la nature, son corps, ses organes et sa progéniture. 

Comment ne pas penser ainsi quand on prend le temps de regarder autour de soi pour constater les ravages que nous avons fait à cette si belle planète. La seule connue comme habitant la vie. Nous avions tout pour profiter de cette chance incroyable d’exister et de chaque jour profiter des grâces de dame nature. Nous étions une anomalie dans le cosmos et nous sommes passés dans l'indignité.

Ce virus qui me draine aujourd'hui, la COVID-19, c'est une conséquence directe de la chaîne d’appropriation, d’exploitation et de distribution mise en place par l’homme. Créer plus de valeurs, générer plus de profits et obtenir plus de pouvoir par la destruction de notre environnement. Nous avions tout pour vivre sans devoir nous soucier du temps, mais maintenant, le temps est compté.

Nous avions tout, tout pour faire de notre passage une expérience enrichissante autant pour notre habitat et pour notre humanité en évoluant en symbiose, mais en cours de route, nous avons dérapé. Il n’est pas trop tard, mais il est minuit moins une.

Nous avons toutes les technologies, tous les moyens et suffisamment de savoir pour reprendre pour sauver notre planète, mais aurons-nous le cœur, la volonté et l’humilité de dire :

« Je me suis trompé, je ne suis qu’humain et je me suis brulé les ailes à vouloir voler trop haut. Terre, pardonne-moi et laisse-moi une chance de me racheter au nom de tous les miens ».

Image de couverture par Khamkéo Vilaysing via Unsplash 
Accueil