L’ignorance et la peur sont les éléments les plus intenses qui peuvent rendre l’être humain vulnérable.
J’ai de la difficulté à trouver les mots justes pour te partager ce sentiment de culpabilité que je garde en moi depuis dix ans. Je n’ai jamais voulu te blesser, c’est seulement la peur qui a pris le dessus. On dit souvent que les mots dépassent la raison et bien, c’est ce qui est arrivé quand je t’ai envoyé ce message.
En 2012, une amie t’a montré une photo de moi en disant que j’allais la rejoindre à l’université pour la session d’automne. Tu étais tombé sous le charme de cette fille sur la photo, qui était remplie d’angoisses sans que tu ne le saches, dû à un traumatisme récent.
À ce moment, cette amie a utilisé une carte très dangereuse : celle de l’humiliation. Elle savait que j'avais été harcelée sexuellement par un homme. Elle trouvait drôle le fait de me voir mal à l’aise devant un étranger. Tu l’ignorais, mais à chaque fois qu’elle me parlait de toi, je ne voulais faire qu’un avec mon ombre. Je voulais disparaitre de la Terre. Ayant vécu ce moment où un homme sans défense pouvait profiter de moi, j’avais en tête que tous les hommes pouvaient être ainsi.
Cette amie a aussi inventé de fausses histoires pour amplifier cette peur que j’avais de toi. Je te voyais comme un profiteur, un pervers. Tout ce que tu n’étais pas en réalité.
Tu n’étais qu’un simple étudiant, un romantique qui avait hâte de rencontrer la femme de sa vie. Aujourd’hui, tu es marié avec une femme sublime, tu as une maison, un travail et des chiens. Je suis très contente pour toi que tu aies trouvé le bonheur.
Je t’écris, parce je tiens à m’excuser pour cette lettre pleine de colère que je t’ai envoyée à l’époque. Je te disais à quel point je n’étais pas intéressée à toi. J’ai déversé sur toi toute la colère que j’avais accumulée depuis cet homme qui avait profité de moi, deux ans auparavant. Je me souviens que j’avais dû te répéter au moins dix fois que je ne voulais rien savoir de toi.
Je sais que tu as lu ce message, car tu l’avais transféré à notre amie ne sachant pas de quoi il s’agissait. Ça lui a pris peu de temps pour qu’elle m’en parle en disant que cette lettre allait détruire votre amitié. Je ressentais de la culpabilité, mais pas autant que la fierté d’avoir réussi à m’exprimer face à un homme qui me faisait peur.
Il y a une chose que tu dois savoir, c’est que j’ignorais complètement l’existence de ces fausses histoires que notre amie me contait. Elle avait inventé ces dires à quel point tu me désirais sexuellement, alors qu’on ne s’était jamais rencontrés.
Je suis désolée de t’avoir perçu comme un être méchant. Je n’ai jamais osé écrire ces mots avant, car j’ignorais comment t’exprimer cette culpabilité.
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Dire la vérité nous allège beaucoup plus que de continuer à dire des mensonges toute sa vie.