Une moitié de femme

Aujourd'hui, permettez-moi de ne pas y croire du tout. Permettez-moi de les détester du plus profond de mon cœur, de mon corps et de mon âme.

Aujourd'hui, mon monde s'est effondré et la Terre s'est arrêtée de tourner. J'ai l'impression que le temps s'est figé. Mes yeux étaient tellement remplis d'eau que je ne voyais plus rien. Mes lèvres tremblaient si fort que j'ai perdu l'usage de la parole. Mon coeur, lui, je crois qu'il a cessé de battre. Aujourd'hui, pendant un moment, le monde ne tournait plus qu'autour de moi, de nous. De moi, de mon amoureux et du bébé que l'on n'aura jamais la chance d'avoir naturellement.

Alors voilà pourquoi aujourd'hui, j'ai envie d'écrire. Parce que la vie a décidé que j'allais être une moitié de femme, une défectueuse, une brisée. Une pas-capable-d'enfanter : une infertile.

Alors rien n'arrive pour rien, really?

Aujourd'hui, j'ai eu peur de devenir cette femme qui jalouse les autres femmes capables de porter la vie. Cette femme qui boude les bedons ronds, les showers de bébé et les baptêmes. Cette femme qui éclate en sanglots en passant devant le rayon des couches à la pharmacie et devant les purées de bébé à l'épicerie. Cette femme qui deviendra constamment frustrée; faute d'avoir été déçue par la vie.

Aujourd'hui, je me permets d'être cette femme. Aujourd'hui seulement, je me permets de pleurer. De pleurer fort. Si fort que le monde entier m'entendra.

Oui, aujourd'hui, je vais pleurer toutes les larmes de mon corps. Ce corps que j'apprendrai à pardonner, un peu plus chaque jour, d'avoir été fabriqué avec ce défaut de fabrication. Ce corps avec qui je serai douce, car je sais qu'il ne me mérite pas de se faire maltraiter; ce n'est pas de sa faute après tout. Ce corps que je déteste aujourd'hui, je réapprendrai à l'aimer, une seconde à la fois.

Aujourd'hui, je pleure.

Demain, promis, je me retrousse les manches et j'entame les démarches.