« Leïla » c’est la nuit en arabe.
J’ai écouté un balado sur l’écrivaine Leïla Slimani et je me suis sentie inspirée, j’ai eu envie d’en parler, de parler d’elle. Elle boit du vin, elle fume, elle est directe et rebelle.
J’ai lu son roman Chanson douce à sa sortie et j’étais restée sans voix. Leila Slimani est une jeune femme de trente-huit ans, née d’une mère française et d’un père marocain, elle est tout un métissage et tout un personnage. Elle a étudié en littérature pour ensuite bifurquer en sciences politiques et journalisme, qu’elle pratiquera pendant plusieurs années au journal Jeune Afrique. Elle prendra son indépendance par la suite pour se consacrer à son immuable passion: l’écriture. Elle écrit ses livres à la main, dans un carnet. C’est là qu’elle crée ses personnages, complexes et intrigants.
« Ça fait du bien l’échec. »
Pour elle, il faut décevoir les autres et soi-même. Venant d’une écrivaine ayant reçu le prix Goncourt, graal de tout écrivain, à seulement trente-cinq ans, on a du mal à croire que les échecs aient parsemé sa vie. Le prix Goncourt, elle le reçoit pour Chanson Douce en 2016; un roman, aux antipodes de son titre, qui n’a rien de la douceur. C’est un conte avec comme antagoniste une nounou, Louise, qui va assassiner les deux petits enfants qu’elle garde dans cet appartement parisien bobo. L’incipit du livre, on ne l’oublie pas, « Le bébé est mort ».
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Dans un autre registre, elle avait traité de la nymphomanie en 2006 dans son roman Dans le jardin de l’ogre. On y découvre la face cachée d’une jeune reporter, mariée et mère. Sujet sulfureux qu’elle dépeint d’une plume froide, précise et crue. Plus récemment, elle signe Sexe et mensonges : La vie sexuelle au Maroc, traitant de la femme, de l’intimité, dans la société marocaine.
Quand on lui dit qu’elle représente aujourd’hui la femme française, l’élégance parisienne, elle relate son arrivée à Paris : « Ouah, toutes ces femmes si belles, sortant de leur appartement avec leurs grands talons. Et elles courent avec leurs grands talons. Et elles vont boire un verre de vin à vélo, mais elles ne sont jamais saoules. Et elles fument beaucoup, mais elles ont une peau parfaite. Leurs enfants jouent du violon. Elles sont très polies... Et je me suis dit : “Je veux être une de ces femmes.” » Par la suite, elle ajoute : « Après, j’ai rencontré ces femmes et je suis devenue l’une d’elles. Et j’ai découvert que parfois elles étaient saoules ou alcooliques. Ou qu’elles vomissaient. Ou que leur peau n’était pas si belle en plein jour. » Elle prône cette amour de la féminité, mais pas une femme douce et belle, enfermée dans un carcan, mais la femme libre, qui est elle-même, qui ne recherche pas à s’affirmer contre l’homme, mais à avoir une place, d’égale à égale.
Leïla Slimani assume pleinement d’être féministe à une époque où on ne se donne le droit de le dire qu’au bout de lèvres, car le mot est entaché d’une réputation issue des extrêmes. Elle a refusé d’être ministre de la culture, par amour de la solitude et le silence. Elle dit qu’elle ment tout le temps, mais ne l’avoue jamais!