«T'es trop game de partir seule»

À tous ceux qui disent que les voyages ça se fait pas tout seul, qu'il faut être au moins deux sinon c'est plate. Pis que plus de fous on est, plus de fun on a. Vous avez tort. Voici l'expérience d'une fille qui a finalement pris son courage à deux mains et qui est partie seule pendant un mois avec seulement son sac à dos et ses jambes. Et c'est la meilleure décision de toute ma vie.

Ça m'a pris longtemps pour me convaincre de le faire. Je me trouvais toutes les excuses possibles pour pas y aller seule. Planifications du dit voyage avec des amies, qui vont toutes échouées on va se le dire. Nouvelle relation amoureuse, qui elle aussi va échouer. Nouvelle job, «je peux pas quitter comme ça, mon patron va penser que le voyage était prévu depuis le début». Problème d'argent, «comment je vais réussir à payer mes virées au Tim avec les amies à mon retour»? Ou plutôt« j'ai des paiements à faire, je peux pas partir de même!» Barrière linguistique, «je vais me ramasser je-sais-pas-trop-où avec mon italien pas on point pantoute». Le métro, j'habite Québec, c'est quoi ça un métro? Au final, toutes les raisons que je voulais croire à ce moment me barraient le chemin. Les parents n'étaient pas trop d'accord avec l'idée, mon père se faisait tous les scénarios possibles dans sa tête. Il ne le savait pas, mais il stressait avant même que je lui dise. C'est à ce point là. Ma mère ne comprenait pas pourquoi je voulais faire ça, puis ma soeur n'avait pas vraiment d'opinion. Au bout du compte, j'ai pris la décision de voyager pour plein de raisons. Pour me prouver que je suis capable de le faire, pour me mettre au défi, pour me sortir de ma zone de confort, pour échapper à des souvenirs difficiles, pour effacer mon quotidien douloureux, pour prendre confiance en moi, pour découvrir le monde, pour rencontrer des gens. Bref, plus gros cliché du monde, ça m'a finalement pris une rupture pour partir tête première là-dedans. Et après d'innombrables discussions où mes parents ne semblent toujours pas plus convaincus, c'est ma grand-mère qui m'a dit, «vas-y ma belle fille». Tsé la génération qui est ben sticker sur les valeurs traditionnelles, du genre travail pis occupe-toi de ta famille. Bin, je suis partie. Ça nous prend tous un déclic tsé.

Et si j'avais un conseil à donner à la jeune moi aujourd’hui, c'est de pas me barrer la route. Il y avait assez de gens dans mon entourage qui me barrait la route à ce moment-là sans que je le fasse moi-même. C'est le même conseil que je vais te donner. Barre-toi pas la route et fonce.  C'est pas parce que t'es seule qu'il va nécessairement t'arriver malheur, que tu vas te ramasser dans un fossé comme dirait mon père. C'est peut-être la plus belle expérience de ta vie, tu ne vas jamais le savoir si tu ne le fais pas. Je ne me pensais pas capable de le faire, je pensais que j'allais me perdre à tous les coins de rue, pleurer les soirs avant de me coucher pis me taper deux crises d'angoisses par jour. Oui j'ai vécu tout ça, j'ai même perdu 15 livres de stress, pis c'est pas grave, ça fait partie de la game. J'ai gagné des millions de souvenirs, de superbes accomplissements, une passion, de superbes rencontres, de l'indépendance pis ben de la confiance. Je suis revenue plus forte, encore un gros cliché. Et j'ai appris à gérer mon stress, moi qui étais une bibitte mangeuse de stress. J'ai aussi appris à faire des activités pour moi, ne pas attendre après mes amies ou mon chum pour faire quelque chose qui me tente. Y aller si je veux, le vivre et me foutre des jugements des autres. J'ai vu les plus belles villes du monde. En passant par Paris pour finir à Venise, j'ai 89 photos sur mon mur qui me rappelle constamment toute la beauté de voyager et ce que j'ai appris sur moi. Et je ne regrette rien.

On m'a souvent dit, «ben voyons t'es ben folle de faire ça». Je vous dis en retour, j'assume ma folie et je repars n'importe quand. Toute seule.