C’était l’heure du lunch. C’était aussi une des rares fois où je suis restée à l’école pour mon cours de l’après-midi. J’étais assise avec des amies et nous discutions de voyage. Un thème assez commun étant donné qu’une grande partie des étudiants de notre âge veut explorer, prendre du temps off pour se dépayser, découvrir de nouvelles cultures et sortir de la routine. Côté routine, je suis plutôt quelqu’un qui la personnalise selon ce que je dois faire, ce que j’ai envie de faire et quand j’ai envie de le faire. Autrement dit, j’ai besoin de changement quand je crois que je ne peux plus avancer dans ce que je fais ou quand je perds de l’intérêt. La conversation passa d’un voyage en Asie à une escapade en Indonésie, un trip à Hawaï, un été en Europe, un tour de l’Amérique centrale pour finalement aboutir à un échange étudiant qui est selon moi, la meilleure façon de ne pas interrompre ses études et de voyager en même temps. C’est là que mon amie, que j’apprécie beaucoup, me raconta à quel point elle avait aimé cette expérience, et qu’elle y retournerait sans hésiter. Cette amie, qui adore essayer de nouvelles expériences, qui aime la vie et qui se lance dans à peu près tous les projets qui la passionne, m’a donné l’envie d’essayer un échange étudiant.
C’est là que le marathon a commencé. Je suis allée me procurer une liste des étapes à suivre afin de savoir ce que je devais faire. Certificat de ci, lettre de ça, attestation de ci, examen de ça, lettre de référence d’un tel, et j’en passe. Ça ne prenait pas la tête à Papineau, mais les étapes à compléter ressemblaient au genre de tâches ennuyantes qu’on cherche à repousser. Les trucs comme refaire ta carte d’assurance maladie, te procurer un nouveau passeport, passer ton rendez-vous de la vue, bref, tu comprends. Le seul problème c’est que je ne pouvais pas repousser, car je n’avais pas le temps. C’est en tentant d’avancer mon dossier que je me suis fait donner tout plein de belles opinions de gens que je connaissais à peine, et ce, sans même leur demander quoi que ce soit. Il y a aussi les fameuses personnes qui travaillent au registrariat de mon école qui, comme à l’habitude, ne m’a pas adressé un sourire et s’est fait un plaisir de me mentionner qu’il était trop tard (même si le bureau était encore ouvert pour 45 minutes). Heureusement, après avoir tenté de parler à 3 personnes, une gentille dame que je remercie aujourd’hui s’est fait un plaisir d’imprimer mes relevés de notes et les documents officiels nécessaires. J’ai passé mon test d’anglais chronométré le lendemain, en essayant de choisir la bonne prononciation parmi les choix nommés par une personne qui n’est aucunement bilingue. Je te souhaite toute la chance du monde quand tu auras à choisir ce qui ressemble le plus au mot ORANGE parmi « orwange, orainge, orrrrenge, oringe, owange, owangé ». Je te souhaite aussi que l’étudiant à côté de toi ne soit pas en train de hurler dans son cellulaire parce que lui, il a fini son examen.
J’ai eu ma lettre de référence en une demi-journée, par une de mes professeurs ô combien sympathique! Mon amie m’a aussi envoyé des exemples de documents à remettre. J’ai donc pu m’y fier pour me guider. Je me suis installée dans les laboratoires de l’école, avec mon ordinateur portable, un grand café et deux autres écrans, et je me suis mise au travail. J’ai fait de la recherche et je suis soudainement devenue douée en composition en anglais. Il faut croire que la pression de dernière minute me fait très bien. J’ai terminé mon dossier la veille de la remise. Lorsque j’ai finalement soumis mon premier dossier, on m’a dit que je ne serais pas accessible à une bourse, et que je ne serais probablement pas acceptée en échange parce que les choix désirés étaient contingentés. On m’a demandé si j’étais certaine de vouloir le remettre. Je croyais que je méritais d’essayer, alors j’ai soumis mon dossier.
J’ai envoyé mon deuxième dossier à 16h45 par la poste quand le comptoir fermait à 17h. Un échange étudiant implique aussi de devoir remplir beaucoup de paperasse. Le processus est long et c’est ultra facile de se décourager. C’est presque un an à être mêlée, parce que ça peut fonctionner et non aussi, mais tu ne le sais pas tant que tu n’as pas les deux pieds dans l’école que tu as choisie. Je suis quelqu’un qui se fie un peu trop à ce que les gens racontent. Que ce soit positif ou négatif. Je suis quand même difficile avec moi-même et j’ai tendance à donner raison aux gens, même quand je ne devrais pas. Je crois souvent que tout le monde a de bonnes intentions, mais ce n’est pas toujours le cas. Par contre, quand tu auras fait à ta tête et que tu ouvriras une lettre te confirmant que tu es acceptée dans l’université de ton premier choix, et que tu recevras un document qui te confirmera que tu as reçu une bourse d’étude, tu pourras te dire que tu as fait le bon choix de suivre ton instinct.
Quand tu seras assise dans l’avion parce que tu as été placée par chance en première classe, que tu vas manquer l’hiver du Québec, que tu boiras tranquillement un verre de vin blanc en te dirigeant vers ta destination préférée pour étudier, tu seras toi aussi, vraiment contente de t’être écoutée pour une fois. Tu seras aussi contente de t’être fiée à la petite voix qui te disait que oui c’était un plan de cinglée, mais qui t’encourageait aussi à continuer. Je ne cacherai pas que plus tôt dans la journée, j’étais prête à laisser mes valises voyager en solo. Le sentiment de panique passe et c’est souvent en passant par dessus ce stade où tu as envie de tout arrêter que la confiance fait sa grande entrée. Je me suis remise en question à plusieurs reprises, parce que oui c’est tout un changement de partir seule étudier dans un autre pays pour une demi-année et ce n’est pas pour tout le monde. Par contre, j’ai eu la chance d’avoir de bons amis qui m’ont donné un coup de main, des parents qui m’ont supportée et de l’aide de la part de la responsable des échanges de mon école au Québec et de la responsable de l’école à l’étranger qui ont répondu à mes 300 e-mails et qui m’ont rassurée. Mes préparatifs se sont bien déroulés. Reste à voir ce qui m’attend durant les 6 prochains mois.