Le temps, cette conception humaine visant à quantifier l’intangible. Parfois si exultant lorsque nous vivons un bon moment et qui semble s’arrêter pour nous permettre de vivre l’expérience à fond, mais à la fois extrêmement frustrant lorsque nous semblons en être à cours. Arrêté en plein milieu d’autoroute, pogné dans le trafic, légèrement impatient et ayant hâte d’arriver à la maison en ce vendredi 17h30, je me suis questionné sur la course quotidienne, sur notre manque de temps constant venant nous stresser, jour après jour. Essoufflés rendus au weekend, la semaine dans le corps, nous sommes des milliers à ne rêver que d’une chose. Une bonne coupe de vin avec une bonne petite bouffe assis devant notre série Netflix du moment. Hélas, ce repos du guerrier, du brave travailleur honnête, n’est pas à la portée de tous. Pour plusieurs, la fin de semaine rime avec une poursuite de 48 heures supplémentaires de la course hebdomadaire sans fin, en raison de la multitude d’activités prévues à l’horaire. Pour la plupart, nous sommes engagés mur à mur. Soupers entre amis, déjeuner en famille, magasinage, cours de ski, tournoi d’hockey, ménage, épicerie, lavage, popote et entretien de l’extérieur de la maison, mais quand aurons-nous enfin le temps de respirer?
Malheureusement, la vie ne s’occupe pas de nous mettre des trous inscrits « off » dans nos agendas. Nous ne pouvons pas non plus arrêter le temps quand bon nous semble. Ce serait si merveilleux de pouvoir mettre pause sur commande pour s’arrêter quelques instants et souffler. À la longue, cette suite infinie d’obligations, réelles ou perçues, en vient à peser lourd sur le dos de ceux qui se sentent parfois pris dans une roue de hamster, incapables de s’arrêter. Ce qu’il faut en comprendre, c’est qu’il n’en tient qu’à nous de prendre le temps. Prendre le temps de prendre le temps. De créer du repos dans notre chaîne d’actions perpétuelles qu’exige la vie moderne. De se lever un samedi matin et d’évoluer durant la journée selon les pulsions du moment. Aussi simple que de choisir de déjeuner à la maison ou bien d’aller au resto du coin. De regarder un film en mou en famille ou bien d’aller glisser à la pente la plus près de chez vous. D’aller patiner, marcher, pelleter ou bien se promener en raquette tous ensemble. D’organiser un souper à l’improviste ou bien de s’inviter chez grand-papa et grand-maman, qui sont toujours contents de recevoir grands et petits pour une brassée de cartes. Prendre le temps, c’est ça. Se donner l’espace et la liberté de choisir au gré de la journée comment celle-ci se dessine.
Alors, si ça semble si simple, pourquoi avons-nous toujours l’impression que l’horloge tourne contre nous? Pourquoi ressentons-nous cette pression constante de ne jamais en faire assez, de toujours être pressé, même quand vient le temps de relaxer? Je n’ai pas la science infuse, loin de là, mais voici quelques pistes de réflexion. Peut-être est-ce parce que nous disons trop souvent OUI pour faire plaisir, sans penser assez à nous. Ou bien se pourrait-il que nous ne voulons pas déplaire, ni projeter l’image d’une personne « plate », ce qui fait en sorte que l’on s’embarque malgré nous dans plus de projets que nous avons d’heures dans une semaine? Une multitude d’opportunités s’offrent à nous, mais pour arriver à l’équilibre, il nous faut faire des choix, prioriser certaines personnes au détriment de d’autres et surtout, s’écouter et suivre notre rythme.
Nous avons tous des capacités différentes et tous nos limites personnelles. Certains ont plus d’énergie que d’autres et il ne faut pas culpabiliser si nous n’arrivons pas à suivre le rythme quasi-ordonné par les médias sociaux. À force de s’y promener, on en vient à croire qu’il faut que chaque repas soit une expérience gastronomique, que chaque soirée entre amis se doit d’être tape-à-l’œil et que nous devons être parfaits en toutes circonstances. Petit déjeuner en famille, avant-midi en meeting, lunch d’affaires, après-midi chargé, soirée spectacle, fin de soirée en boîte et devoir se relever frais et dispo le lendemain matin pour recommencer, là n’est pas la vraie vie, mais plutôt une image projetée, vendue. La vie est déjà assez stressante de base, pouvons-nous simplement être et faire les choses « à la bonne franquette ». Sans pression de performance, sans devoir épater la galerie ni plaire à tout prix. Suffit la pression d’être des parents parfaits, de devoir élever des enfants parfaits, de devoir les stimuler en tout temps de peur d’être mal jugés sous le regard accusateur des autres, qui agissent ainsi, car ils ont tous aussi peur que nous de ne pas paraître à la hauteur.
Bien sûr, certaines personnes fonctionnent à plein régime jour après jour, le sourire aux lèvres, le bonheur facile, nous amenant parfois à penser qu’ils sont surhumains. Par contre, en général, bien des gens sont épuisés de devoir courir, courir et encore courir pour respecter leurs engagements. Effectuez un pas de recul, observez d’un regard externe votre rythme effréné et vous verrez qu’il est tout à fait normal que vous vous sentiez ainsi, car vous vous en mettez trop sur les épaules. Revenir à l’instant présent, à l’importance d’être dans l’ici, maintenant, est primordial pour apprendre à naviguer plus paisiblement sur le flot quotidien de la vie.
Calmons la tempête, cessons le tourbillon et redécouvrons les joies de tout simplement nous laisser bercer par la vie, ses ouvertures et son côté imprévu. Cessons de toujours tout planifier, car c’est cela la magie de la vie, qu’on ne sait tout simplement pas de quoi sera fait l’instant prochain. Rappelez-vous votre dernier voyage. Combien il était magnifique de sentir que lorsqu’on lâche prise, qu’on se fie à son instinct et que l’on s’ouvre aux expériences, tout peut arriver. Tout arrive comme cela devait arriver, sans rien forcer. En y repensant, on peut parfois croire qu’une certaine magie a opéré, que tout était si parfait. Comme il était doux de juste écouter nos envies du moment, d’avancer, une minute à la fois, sans être pressé, sans cette boule de stress qui nous envahit par moment. En grande partie, ce stress, c’est nous qui nous l’imposons inconsciemment, un engagement après l’autre.
Tentons de ramener le plus souvent possible dans nos journée cette énergie subtile, cette sensation-là et cette ouverture que nous savons si bien déployées lorsque l’on se trouve loin des responsabilités du quotidien. Nous oublions parfois que même notre vie de travailleur, quand nous ne sommes pas en vacances, peut s’en approcher, si nous apprenons à nous doter de moments pendant lesquels nous nous laissons exister, tout simplement. Une minute à la fois, dégustons et profitons de cette aventure qu’est la vie. Prenez le temps avec vos proches, votre famille et vos enfants, ainsi qu’avec votre partenaire, pour vous amuser profondément et vivre pleinement. Sans vous soucier du jugement externe, des normes véhiculées comme étant prescrites et, surtout, sans vous sentir obligés de quoi que ce soit, sauf de vous sentir libérés.
Réalisons que la vie n’est pas une course, qu’il n’y a pas de ligne d’arrivée une fois tous les standards atteints et que la satisfaction ne viendra pas, même en faisant tout à la perfection. La fin de la course, c’est quand nous lâchons prise, que nous suivons le rythme naturel de la vie et que nous comprenons que la course, c’est nous qui la créons dans notre tête. C’est à ce moment que tout commence réellement, qu’on se retrouve disponible et que tout peut arriver comme il se devra. Parce qu’au final, peu importe combien on court dans un sens, la vie finira toujours par nous porter à l’endroit où l’on doit être, alors autant profiter du chemin, un jour à la fois, un moment à la fois, une minute après l’autre, comme un enfant exalté découvrant le monde. Chaque seconde est bonne pour prendre le temps, ne l’oubliez jamais. Prenez le temps d’apprécier, d’expérimenter, de partager et, par-dessus tout, d’aimer!