Je n'ai jamais compris le concept des ennemis, le concept du blanc et du noir, celui du bon et du méchant. Je suis quelqu'un qui navigue foncièrement dans le gris. J'écoutais un segment de radio aujourd'hui et l'invité a dit «mes amis et mes ennemis». Je suis restée prise sur le mot ennemi. Ce mot si fort qui est porteur et qui crée automatiquement deux clans.
Ça m'a fait réfléchir puisque je sais que pour certaines personnes, j'étais vue comme l'ennemie d'autres personnes à cause de ma présence sur Internet. Je ne me suis jamais sentie dans cette position d'ennemie, pourtant. Est-ce que j'aime tout le monde? Non. Est-ce que je m'entends bien avec tout le monde? Non. Est-ce qu'ai eu des conflits dans ma vie? Oui. Est-ce que j'ai toujours tenté de les régler? Oui. Est-ce que j'ai du mal à comprendre le concept d'ennemi à l'âge adulte? Oui.
Parce que ça crée des camps au lieu d'ouvrir la discussion.
Entendre cette phrase à la radio a éveillé en moi la réflexion de se dire que pour certaines personnes, le concept est encore bien vivant comme dans une cour d'école secondaire et que naturellement, pour ces derniers, bien qu'ils puissent évoluer et grandir, ils placent l'autre dans une case, au lieu d'ouvrir une discussion franche. Je ne pense pas qu'on puisse bien s'entendre avec tout le monde, ce n'est pas ce que je dis, mais je pense qu'on peut laisser tomber l'idée de l'affrontement en tant qu'adulte pour plutôt aller vers le vivre ensemble en harmonie.
Depuis que je suis maman, je me demande beaucoup comment je vais expliquer le monde à mon fils, comment je vais aborder certains sujets avec lui et le concept d'ennemi est quelque chose que j'aimerais lui apprendre à combattre. Combattre le concept d'ennemi? Douce ironie. Mais dire ce mot me fait automatiquement penser à la guerre. Et ça n'apporte rien de bon à long terme.
Dans un monde où la «cancel culture» est présente, où la guerre est omniprésente dans les médias et où l'intimidation fait rage, ne devrait-on pas cesser de voir certaines personnes comme des ennemis et plutôt choisir de vivre en parallèle sans affrontement?
Vous me direz qu'on peut ignorer son ennemi... mais encore là, le titre me semble si fort que j'imagine mal quelqu'un dire «je ne pense jamais à mon ennemi». Certes, on n'est pas dans un livre de Shakespeare, mais pourquoi ne pas simplement se dire que certaines personnes n'ont pas besoin de faire partie de notre vie? Aussi simplement. Pas d'étiquette, pas de guerre, pas de clans, pas de noir et blanc. Du gris. Je pense que notre société a foncièrement besoin de gris. On s'en souhaite en 2023?
Image de couverture de Azzedine Rouichi