Pour aller au boulot, à l’école ou chez les copains, j’utilise principalement mes pieds. Pieds qui parfois s’enfargent, non pas dans les fleurs du tapis, mais dans les lignes du trottoir. Ben voyons donc, comment tu fais ça?, me diras-tu. Eh bien, j’arrive à accomplir l’exploit en regardant droit dans l’œil de la bête; mon téléphone. Mon petit objet de communications, de distractions, de fuites, et bien plus encore! Ce petit machin qui, pour une raison qui m’échappe encore, retient toute mon attention, pendant beaucoup trop d’heures parmi les petits 24 heures qui tissent mes jours. Ça, (pour ne pas l’appeler PennyWise…), crée de la diversion à mes ennuis, à mes peines, à mes colères, et puis aussi, comme tu le sais maintenant, aux craques dans le béton.
Pour tout te dire, le plus triste dans cette réalité, ce n’est pas mes égratignures de maladroite qui s’est souvent plantée, parce qu’étourdie par la technologie, mais plutôt le fait que la technologie nous éloigne ainsi. Quand j’ose délaisser l’écran pour regarder la vie qui se meut autour de moi, je fais de biens mornes constats. En tant qu’individu, je me rends compte que je suis très centrée sur moi-même et que les personnes qui m’entourent le sont également. Nous avons tous les yeux rivés sur la lumière, celle de notre écran. Pour moi, il est devenu un bouclier, surtout face aux regards des autres et aux jugements qu’ils peuvent contenir. Je me protège à l’aide de la chose, je m’en fais une alliée de taille. Malgré sa petitesse, elle en prend large, et ça me fait du bien. Si le téléphone, outil d’évitement par excellence, nous procure une satisfaction éphémère, je crois qu’il est aussi notre ennemi. Il nous éblouit par sa lumière, nous en aveugle. Par conséquent, il nous trouble la vue des étincelles des humains qui, réels, ici et maintenant, sont si près de nous, avec nous. Nous sommes pourtant si loin les uns des autres à cause de cette barrière numérique. Imagine le grand feu qui pourrait s’allumer si nous étions plus attentifs entre nous… un feu de joie, d’entraide, de croissance personnelle…
Je vois donc en notre arme de destruction massive, destruction massive de masses lassées et divisées, oui, une chouette amie pour se divertir, mais aussi, une amie possessive qui peut nous éloigner dangereusement de l’essentiel. Pense-y: imagine si tous les jours, tu te tenais avec ta chum de party, tu serais sûrement exténuée, éloignée de tes amis qui t’apportent de l’écoute et de l’enrichissement, de tes passions, bref, de tout ce qui te fait grandir comme personne. Penses-y: la chum de party pis toi, à chaque jour en pleine fiesta. C’est pas bon pour la santé, ça. C’est pareil pour ton cell, faut que tu t’en éloignes un peu de temps en temps pour aller voir ton monde. Pour te refaire une santé.
Alors, qu’est-ce que t’attends pour te désarmer?