L'année 2020, qui avait commencé sur une note positive remplie de nouveaux projets à réaliser et d’objectifs à atteindre, s'est très tôt vue assombrie par de gros nuages. Une menace nous guettait à l'horizon. Un grondement se faisait entendre au loin. Une tempête se rapprochait. Un ennemi invisible qui avait déjà fait plusieurs victimes à travers le monde. Un ennemi qui finit rapidement par faire son entrée chez nous.

Les premières gouttes de pluie se sont mises à tomber sur le Québec au mois de février. Des cas d’individus infectés par un virus ne faisant aucune distinction d'âge, de sexe, d’ethnie, d'orientation sexuelle, de condition physique ou mentale, de classe sociale, ni d'appartenance religieuse ou politique, ont commencé à être recensés. C'est alors que nous avons réalisé que nous étions, tous ensemble, dans le même bateau. Un bateau naviguant en eaux inconnues, troubles et de plus en plus tumultueuses.

La pluie qui avait commencé à tomber doucement s'est alors, de jour en jour, intensifiée. Des vagues ont successivement commencé à s'abattre sur notre bateau. À bâbord, l'annonce continue des augmentations de cas recensés, des décès, des modes de propagation. À tribord, des mesures d'hygiène et de sécurité recommandées puis imposées, des mises en quarantaine préventives puis obligées, la fermeture successive des écoles, services de garde, commerces et autres établissements, pour ne garder ouverts que les services essentiels. Une vague de télétravail et de nombreuses mises à pied. Le confinement des gens encouragés fortement à s'isoler, certains d’entre eux y ayant tout simplement été forcés.

De tous les bords, tous les côtés, nous avons commencé à être inondés de nouvelles provenant de différents médias, ainsi que d’innombrables courriels dans nos boîtes de réception. Le non-respect des consignes de certains, les reventes par des particuliers de produits essentiels à prix exorbitants, les tentatives de fraude, les achats massifs et parfois violents de denrées dans les supermarchés et pharmacies conduisant à une pénurie de produits alimentaires, d’hygiène et désinfectants, ainsi que les vols de masques et de gants dans les hôpitaux et autres établissements, ne vinrent que fragiliser notre embarcation. L’orage prit de l’ampleur.

éclairci ciel bleu foncé roseSource image: Unsplash

C’est alors qu’au travers de cette tempête incessante et grandissante, un faisceau de lumière a petit à petit commencé à percer les nuages. Par milliers, des retraités se sont portés volontaires et se sont enrôlés pour aller prêter main forte à l'équipage du domaine de la santé posté au front du champ de bataille. Des vedettes se sont mobilisées pour sensibiliser la population. Des individus, des professionnels, des institutions et des compagnies ont décidé d'offrir gratuitement des cours de peinture, de yoga, des entraînements, des concerts Facebook live, des livres, des idées d’activités, des débrouillages de chaînes télé et des programmations spéciales dans le but d’aider les individus et les familles à mieux vivre ce temps de crise. Des artistes se sont mis à utiliser leur art pour tenter d’apaiser les gens.

Face au besoin d'Héma-Québec de remplir ses banques de sang, c’est une marée d’humains qui est allée donner un peu de soi pour aider à sauver la vie de d'autres. Face à la pénurie de bénévoles dans divers organismes, des citoyens ont pris la décision de sortir de leur maison et de retrousser leurs manches afin d'aider les plus démunis. D’autres ont pris l’initiative d’aller faire l’épicerie pour des personnes plus âgées afin que celles-ci puissent demeurer dans leur domicile en sécurité. Des gens ont décidé de faire don de leur surplus de denrées à ceux qui n’avaient pas eu la chance de pouvoir s’en procurer.

L’individualisme qui caractérise notre société a laissé place au collectivisme. L’ensemble de l’équipage a décidé de se mobiliser pour que notre bateau puisse garder le cap et traverser l’orage.

Malgré les nuages de plus en plus noirs qui couvrent le ciel, ce sont désormais des milliers de rayons de lumière qui jaillissent de toute part. Ce sont des voisins qui se saluent, alors qu’ils ne s’étaient auparavant jamais regardés. Ce sont des gens qui décident de texter leurs voisins de numéro de téléphone pour tenter de mettre un petit peu de bonheur dans la journée d’un pur inconnu. Ce sont des individus qui prennent plus que jamais des nouvelles les uns des autres. Ce sont des amis qui se réunissent par webcam le temps d’une soirée pour garder le moral. Ce sont des familles qui s’épaulent et qui s’envoient la main de la fenêtre de leur maison. Ce sont des gens qui chantent et jouent de la musique de leur balcon pour briser l’isolement.

À 20h30, c’est une multitude de foyers et d’établissements qui, comme au rythme d’un même battement de cœur, allument et éteignent successivement leurs lumières en signe de solidarité pour ces êtres incroyables qui, jour après jour et malgré la peur et les risques qu’ils encourent, revêtent leurs habits de super-héros et se dévouent pour que la population soit en sécurité, puisse être soignée et ne manque de rien. Ce sont des individus qui décident de s’entraider et se soutenir dans l’adversité. C’est une population qui accepte de brimer sa propre liberté afin que tous puissent être protégés. C’est un peuple qui, aussi distancé socialement qu’il puisse l’être présentement, n’aura jamais été aussi unifié et soudé. C’est un peuple qui revoit ses priorités.

arc-en-ciel palmiersSource image: Unsplash

En plein cœur de cette bataille contre l’invisible, un symbole est né. Visible aux fenêtres de nombreux foyers et dans l’éclairage de nombreux édifices, l’arc-en-ciel est devenu un symbole sous lequel la population peut se rassembler, se soutenir et se réconforter. Un symbole pour se donner espoir que malgré tout, « ça va bien aller ».

Mais, tout comme l’arc-en-ciel ne peut exister sans pluie, il ne peut pas non plus exister sans soleil. Alors, face à cette pluie torrentielle qui déferle, persistons à être des conducteurs de lumière. Tous et chacun, continuons de faire rayonner notre amour et notre bienveillance en nous entraidant, en nous soutenant et en nous protégeant les uns les autres. Pour que jamais, même au cœur de la tempête avec ses énormes nuages sombres, ne disparaisse notre symbole d’espoir. Parce que c’est de cette manière que, tout comme l’annonce l’arc-en-ciel, nous verrons depuis notre petit bateau revenir le beau temps et son magnifique soleil.

Source image de couverture: Unsplash
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