Tout récemment j’ai découvert une nouvelle forme de méditation : la pleine conscience ou mindfulness. Comme son nom l’indique, il s’agit d’être conscient, pas de tout et n’importe quoi, mais de ramener notre attention à quelque chose en particulier, de s’y attarder pour se connecter à soi, à ses pensées, à ses émotions, à ses « feelings ».
C’est tout simple. Mais tellement simple de tout faire compliqué en 2018, et c’est là qu’on s’en rend compte. Au début je trouvais ça plate à mourir. Ça m’ennuyait de rien faire, d’écouter mes sensations physiques, de m’attarder au goût d’un aliment en le mangeant len-te-ment, à observer quelque chose dans tous ses moindres détails sa forme, sa couleur, … Je tenais 2-3 minutes (maximum) les fois où je me sentais reposée et pas trop préoccupée, c’est-à-dire très rarement. Pour tout vous dire, je me suis découragée, j’ai laissé tout ça de côté.
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Puis j’ai réessayer avec des applis de toutes sortes ; Headspace, Insight timer, Petit BamBou, … C’est presqu’une tendance ces temps-ci. J’avais envie d’être cool moi aussi. J’avais envie d’être capable parce que c’est vrai que ça fait du bien et que les bénéfices sont considérables.
En même temps, je me questionne à savoir si l’on ne perd pas le vrai sens de tout ça. Savoir contempler, il me semble que ça ne se force pas. Pas tout l’temps. C’est pas tout l’temps obligé d’être cognitif et parfaitement programmé dans la journée. La pleine conscience, on devrait pouvoir le faire sans s’en rendre compte il me semble.
Cette réflexion m’est venue lors d’un après-midi innocent. Low profile. L’air de rien. Le genre d’après-midi ordinaire ou rien ne se passe d’exubérant, où rien ne paraît agité en-dehors comme en-dedans, où tout est calme, chaud et posé. L’ordinaire, mais parfait comme il est. Juste assez de gens, de bruit, de vent. Un après-midi que j’oublierais si ce n’était que je relierai ces quelques lignes.
J’étais seule (avec mon chien) et je lisais un livre juste bien placée mi-ombre mi-soleil dans le parc d’à côté. Activité délicieuse de début d’été. J’avais l’humeur aérée cette journée-là, peut-être plus sensible aux petits détails qui rendent la vie belle. De temps en temps, je levais les yeux pour m’accrocher à autres choses que mes pages, comme pour mieux me rendre compte que j’existais en-dehors de mon rôle de lectrice. Aussi parce qu’il y avait des fourmis qui me chatouillaient les mollets.
Mon regard s’est arrêté plus longuement au décor quand j’ai aperçu une dame qui venait de s’asseoir sur le banc juste en face. Des cheveux gris sans nuance au carré franc traçait le contour de son visage l’air éclairé. J’observais qu’elle avait vu passer le temps comme elle le faisait maintenant, mais que le temps l’avait épargnée, peut-être même embellie. Les jambes croisées sous son siège, un demi-sourire sur son visage comme à chacune de ses articulations qui avaient l’air d’ouvrir son corps à la vie. Sans trop savoir pourquoi, la regarder m’apaisait. Je me suis même surprise à me sentir déçue de son départ quand je fis à l’improviste un aller-retour de plus entre mes pages et le dehors. Elle était partie comme elle était venue, sans que je m’en rende compte et j’avoue l’avoir cherchée du regard un bon moment en balayant le parc.
Et j’ai pensé ; « le mindfulness, c’est elle qui l’a inventé ». Elle. Ne. Faisait. Rien. D’autre. Que. D’observer. Comme si elle regardait un film interactif sans interagir. Comme personne ne le fait plus. Pas d’écran, rien de vraiment stimulant. J’étais éblouie, profondément inspirée et en même temps si triste de trouver ça révolu de profiter du temps comme elle le faisait. Je ne sais pas pour vous, mais il me semble que c’est rare de contempler, et par contempler j’entends de regarder qu’une seule chose à la fois pendant plus de cinq minutes. La contemplation s’est perdue je ne sais pas trop bien à quel moment dans ma vie, peut-être à quelque part entre l’adolescence et la vie d’adulte, peut-être entre ma vie à la campagne et mon arrivée à Montréal, je l’ignore complètement.
Tout compte fait, à partir de cet instant presque volé à quelqu’un je me suis promis de penser à cette dame plus souvent et à m’occuper de moi par conséquent. J’essaierai fort de revenir à la source par moi-même, sans qu’on me guide et sans le planifier. À vrai dire, le mindfulness a le visage de cette dame par cet après-midi comme tous les autres. À vrai dire, le mindfulness je l’ai pratiqué cette journée-là parce que ça m’a fait du bien de l’observer.
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