Lundi, en regardant les nouvelles défiler sur Twitter, je suis tombée sur ce titre du Devoir: La chute en disgrâce d'un producteur célèbre.

J'ai dû relire deux fois pour m'assurer que j'avais bien compris. Eh oui, on parlait d'Harvey Weinstein, reconnu coupable de viol et d'agression sexuelle... Pourtant, en lisant le titre, on avait l'impression qu'une malchance s'était abattue sur ce pauvre homme.

Pourquoi, quand on parle d'un agresseur, on met de l'avant ses accomplissements (sportifs, artistiques ou autres), au lieu de mentionner le crime qu'il a commis? Il n'a pas « chuté » par accident et, visionnaire ou non, il a été reconnu coupable de viol et d'agression sexuelle. Pourtant, aucune mention de ces faits dans le titre. La chute en disgrâce d'un producteur célèbre: vraiment? C'est le titre choisi? On aurait pu y aller avec un titre informatif, tel que: Harvey Weinstein, reconnu coupable de viol et d'agression sexuelle. Et puis que dire de l'article en tant que tel...

La première phrase donne le ton: « il était un producteur de cinéma visionnaire, faiseur d’Oscars, donateur du parti démocrate ». C'est drôle, on ne liste pas ici aussi « violeur et agresseur ».

« Le 25 mai 2018, il est accusé à New York, mais pour deux agressions seulement, une en 2006 et l’autre en 2013 ». Eh bien, j’imagine que deux ce n’est pas assez. Peut-être aurait-il dû en agresser d’autres?

« Son avocate Donna Rotunno, habituée aux déclarations controversées, a assuré qu’il avait pris le verdict "comme un homme"». Comme un homme? Mais qu’est-ce que ça veut dire? Par pitié, ne mettez pas tous les hommes dans le même bateau!

« Lundi, après avoir été déclaré coupable d’agression sexuelle et de viol — mais exonéré d’accusations plus graves qui auraient pu lui valoir la perpétuité — » PARDON? « Exonéré d’accusations plus graves »? Les crimes commis ne sont pas suffisants? Il aurait été approprié ici d’expliquer que s’il avait été reconnu comme ayant un comportement de prédateur sexuel récidiviste, il aurait pu écoper d’une peine à perpétuité. Dire qu’il y a des accusations plus graves (sans précision) est en vérité dire que les viols et les agressions sexuelles ne sont pas si pires.

cellules de prisonSource image: Unsplash

Je pourrais continuer longtemps, mais faute de temps, je vais résumer: le seul sous-titre de cet article? « Un producteur oscarisé »On en profite ensuite pour faire l'inventaire détaillé de ses réalisations professionnelles.

Pourquoi cette tendance à vouloir diminuer la gravité des crimes commis en soulignant les réussites dans leur domaine respectif? Est-ce que cela fait en sorte qu'ils sont moins coupables? Est-ce que les victimes devraient se sentir mal de  « gâcher la vie de ces pauvres hommes? » Ah, quel dommage qu'il ait violé une femme et agressé une autre, il était si prometteur! Si seulement elles s'étaient tues! Non, ce n'est pas ce qui est écrit, mais c'est ce qui est sous-entendu.

femme en boule avec un chignonSource image: Unsplash

C'est encore la faute de la victime, c'est elle qui ruine la vie de l'agresseur. Le traitement de l'information et la façon dont les nouvelles sont relatées ont une influence énorme sur la façon dont ces crimes sont perçus par la société. Cet article n'est qu'un exemple parmi tant d'autres, malheureusement. Nous avons encore beaucoup de chemin à faire…

 *L'article provient de l'Agence France-Presse, publié par Le Devoir.
Source image de couverture: Unsplash
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