Mes belles amies, je sais que ces temps-ci je suis beaucoup plus distante qu’à l’habitude et je m’en excuse. Lors de mes meilleures journées, je lis vos messages et fais une réaction ; lors de mes pires, je vous dis que je vais vous lire plus tard et j’oublie…
Depuis un bon moment déjà, mon empathie et mon anxiété ne me facilitent pas la vie. J’ai essayé de me dissocier de ce qu’on a nommé mon « burn out de société » en me distançant des nouvelles et de ce qui m’enrage, mais malheureusement ma volonté de m’en dissocier n’est pas plus grande que celle de vouloir aider tout le monde. Je porte souvent le poids du monde sur mes épaules et c’est pour ça que quand quelqu’un s’attaque à nos droits et libertés ou qu’on oublie l’importance que vous avez sur la société, vous mes chères amies qui travaillent dans l’éducation ou la santé et les services sociaux, il m’est impossible de fermer les yeux. Malheureusement, ce côté de moi m’épuise un peu. Je passe mes journées à m’essouffler et à pleurer quand la cruauté du monde devient trop grande à supporter. Ma mère m’a récemment dit qu’il faudrait que je me construise une carapace plus forte pour me protéger. Je lui ai répondu que si le monde pouvait me laisser quelque temps au lieu de détruire le peu de fondations que j’arrive à créer, ce serait peut-être plus facile.
J’aimerais tellement avoir la force de prendre soin de vous et de toutes les complications de vos quotidiens. J’aimerais être capable de prendre l’énergie que je mets à m’inquiéter pour l’avenir de notre société et la mettre sur du temps avec vous, mais je n’y arrive pas. Vous me connaissez, si je pouvais retirer le mauvais de la vie de tous ceux que j’aime, je le ferais.
J’ai de la difficulté à me remettre de la douleur que tout ça m’amène et ça me fait culpabiliser. Culpabiliser parce que ma vie n’est probablement pas si difficile que ça. Je me sens coupable parce que chaque moment difficile est rendu la goutte de trop dans mon quotidien. J’ai atteint le maximum de mauvaises nouvelles que je pouvais recevoir en mars dernier et malheureusement le compteur ne s’est pas encore remis à zéro. Je me sens coupable de ne pas pouvoir compatir avec vos douleurs. Je me sens coupable de ne plus avoir assez d’énergie pour même vous dire que je vous aime quand vous vous sentez moins bien. Je sais vous aller me dire que mes émotions sont valides, mais quand même, notre amitié est si importante à mes yeux et j’aimerais tant pouvoir être là pour vous.
On m’a dit qu’il fallait que j’apprenne à vivre mes émotions ; que j’avais une trop grande tendance à me culpabiliser d’aller mal. Il faut croire que c’est probablement la phrase la plus vraie que j’ai entendue à mon sujet. Il est peut-être temps pour moi de prendre soin de moi parce que je vous avouerais que j’ai de la difficulté à me reconnaitre moi-même ces temps-ci.
Je sais que ce qui vous importe le plus dans tout ça, ce n’est pas vraiment le fait que je suis absente pour prendre soin de vous, mais plutôt que je ne vous laisse pas être présente pour moi. Après tout, on est amies en partie parce qu’on se ressemble, surtout sur ce point-là. Donc je sais que ce qui vous inquiète surtout c’est que normalement je suis très ouverte sur mes blessures et je vous partage ce qui me fait mal, mais cette fois-ci j’ai besoin d’être seule pour me battre avec mes démons. En grande partie parce que je n’arrive pas à les nommer. Mes émotions sont juste tellement à vif que même si je vous laissais m’aider, je ne suis pas sûre que ça m’aiderait.
Je vais aller mieux, je le sais. J’ai confiance que je vais trouver un moyen d’y arriver. J’espère juste que vous allez pouvoir me pardonner d’être égoïste pendant tout le temps que je prends à me reconstruire.
Je vous aime,
Votre Slytherin qui cette fois-ci décide de laisser tomber sa moitié Hufflepuff.