Qu’on se comprenne. Je n’ai rien contre une sexualité saine pratiquée entre adultes consentants. Je suis même ouverte à parler de sexe de manière générale et je ris à des blagues de cul. Or, je déteste quand les gens me partagent leurs expériences personnelles alors que, dans 99,99 % des cas, ce n’était absolument pas sollicité de ma part. À l’exception près où tu serais mon (potentiel) partenaire... Je ne veux pas connaître ta vie sexuelle!

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Premièrement, ça ne me concerne pas.

Deuxièmement, ça ne m’intéresse pas. Dire le contraire serait limite bizarre.

Troisièmement, je l’avoue, je suis simplement mal à l’aise. Tu peux me sortir toutes les hypothèses possibles pour expliquer ce malaise. Peut-être que c’est parce que je suis immature ou inexpérimentée. Peut-être que c’est parce que je proviens d’un milieu où on n’en parle pas tant que ça. Il y a probablement un fond de vérité dans toutes ces raisons. Mais moi, je pose mon pied par terre et je clame haut et fort que les explications n’ont aucune espèce d’importance.

Quand on me raconte ou que j’entends par accident ces récits ma foi trop souvent excessivement détaillés, je vis un mini syndrome de l’imposteur. J’ai l’impression que je n’aurais pas dû écouter, que j’ai plus ou moins dupé la personne pour qu’elle me révèle des informations personnelles et que je dois maintenant en assumer les conséquences. Je ne sais pas comment réagir, peu importe si j’en apprends sur la vie sexuelle de mes meilleures amies ou d’une connaissance. J’oublie tous les codes d’une conversation normale. Et quand ces récits concernent des mineurs (parce que oui, les ados peuvent aussi parler de leur vie sexuelle), c’est comme si je venais de tomber sur de la pornographie juvénile par inadvertance... J’ai le goût de me laver avec du gel antibactérien.

Bien des fois, le moins j’en sais, le mieux je me porte.

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Oui, c’est merveilleux de vivre dans une société où nous pouvons aborder toutes sortes de sujets entre nous sans que l’on crie au scandale à tout bout de champ (quoique cet argument est encore discutable). Par contre, nous avons quelque peu oublié qu’il existe une chose appelée la vie privée. Nous nous sommes résignés à ce que nos activités sur Internet soient épiées et qu’on nous suive partout grâce à nos téléphones. Nous avons pris l’habitude de divulguer des quantités énormes d’informations sans y penser à deux fois, si bien que tout à coup, c’est comme si le fait de ne pas vouloir partager quelque chose était devenu le nouveau tabou. Alors voilà! La fille qui ne veut pas parler de sexe est prude. Le féminisme a échoué. Nous sommes de retour dans la Grande Noirceur.

Pourtant, ce n’est pas comme si c’était bien étrange d’éviter ce sujet dans la mesure où, pour la plupart des gens, c’est un aspect très personnel de leur vie. L’argent, le passé familial et la religion sont aussi des sujets sensibles qui ne sont pas toujours abordés si facilement en public. Certaines personnes ne seront jamais à l’aise de faire partie de la conversation. Cela veut-il dire qu’elles ont quelque chose à cacher? Peut-on forcer qui que ce soit à écouter et à s’exprimer en retour?

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Cela dit, je n’empêcherai pas qui que ce soit à se confier sur sa vie sexuelle, ou d’en parler ouvertement aussi fort que possible pour que tout le monde saisisse son propos. Toutefois, je me garde le droit d’être mal à l’aise. Certains pourraient interpréter ce sentiment comme un recul, et c’est compréhensif quand nous considérons l’impressionnante évolution du discours sur la sexualité dans notre société au cours du dernier siècle. Permets-moi quand même de douter que de connaître les dimensions du pénis de ton chum soit vraiment pertinent à l’avancement dudit discours. Je suis convaincue qu’il n’est pas nécessaire d’imposer à qui que ce soit une telle révélation d’informations privées.

Moi, je dis : sans façon. Passons à un prochain appel.

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