C’est dans nos failles qu’on est beau et qu’on se retrouve. L’être humain ne se rejoint pas sur le parfait; il partage sur le vrai. Vous ne trouvez pas plus intéressant de discuter sur le drôle, l’inattendu, l’erreur que sur tout ce qui est beau, trop beau? C’est pour ça que j’essaie des expériences qui me pousseront à bout, qui me feront atteindre ma limite. Je n’aime pas être confortable; je n’avance pas quand je suis bien. C'est ce qui m’a poussée à partir en Thaïlande pour faire une retraite de méditation fermée. Ce que ça implique? 10 jours où on se lève à 4h, médite jusqu’à 7h, mange un bouillon de soupe, médite jusqu’à 11h, mange du riz et du tofu et on prie en thaïlandais, fait du ménage jusqu’à 13h, médite jusqu’à 17h, boit un lait de soya, et médite jusqu’à 22h. Après? Dodo. Et SURTOUT, on ne parle pas et on ne dort pas durant la journée.
Cette routine de crève-faim et d’endurance est censée amener la paix d’esprit et un équilibre à ceux qui osent s’y aventurer. Peut-être même le bonheur. Mais qui d’emblée, se pousse dans une prison spirituelle? Qui se dit : « Ben oui, j’ai envie de pas manger ni dormir ni parler, avoir mal partout, et méditer 10 heures par jour avec des moines bouddhistes. » Tout ça sans téléphone, musique, livre ou papier. Aucune distraction. Pourquoi s’imposer ce calvaire?
J’étais terrifiée. Mais je savais que je devais le faire. Comme une gamine, je trouvais l’expérience rafraîchissante, emballante aussi. Aller chiller (!) avec des moines en Thaïlande, la perspective me semblait hallucinante.
J’avais tort. Les trois premiers jours, j’ai trouvé la nourriture abominable; mon habit blanc me dérangeait; j’avais mal partout – oui, méditer 10h par jour, ça fait mal –, et l’eau froide de la douche était insupportable.
Jour 3, j’ai craqué. J’avais tellement faim, ma méditation n’allait pas bien, et je me suis rendue à la petite cafétéria remplie de moines et de quelques touristes, et j’ai pleuré. Pas pleuré trois ou quatre larmes; j’ai BRAILLÉ. Pendant deux heures. Devant tous ces inconnus, je me suis montrée vulnérable et j’ai accepté que l’expérience fut loin d’être aussi l’fun que je l’avais imaginée. Tout plein de Thaïlandaises que je n’avais jamais vu sont venues me serrer très fort dans leur bras. Et j’ai compris. Qui a dit que de méditer –ou la vie– était facile? Qui a dit que de prendre enfin soin de toutes les bibittes qui sont coincées dans notre cœur depuis des années et d’enfin les laisser partir, était facile? Je suis partie du temple après 10 jours. Les couleurs étaient vives, l’air était bon. J’étais heureuse, tellement heureuse. Et je suis sortie, pas un sous sur moi. C’était deux heures de marche pour aller me trouver une guesthouse, sac à dos sur le dos, mais ça ne me dérangeait pas.
Je marchais sur l’autoroute, avant d’entrer dans la ville, puis une moto s’est arrêtée. Une jeune Thaïlandaise m’a dit, d’un anglais boiteux :
« Où vas-tu? C’est dangereux de marcher sur l’autoroute, je vais aller te mener où tu dois aller. » « Tu es sûre? »
« Oui. Ça fait tout le temps du bien aider les gens. Quand je viendrai dans ton pays, tu m’aideras aussi. »
J’ai embarqué avec cette fille -qui roulait dangereusement et beaucoup trop vite-, mais j’avais les yeux brillants, éclatants, émerveillés, qui n’avaient jamais vu la lumière du jour aussi belle.
J'ai fait ma retraite au Wat Ram Poeng, qui est un temple à Chiang Mai, dans le nord de la Thaïlande, et qui se concentre sur la Vipassana méditation. Le but est de mieux se comprendre à travers l'observation de nos pensées, les objets de nos pensées, nos sentiments et notre corps. Pour les plus aventureux, il y a la retraite classique de 26 jours et c'est gratuit (seulement un 10$ pour l'habit blanc le long de la retraite et contribution volontaire par la suite). Pas besoin de réserver du Canada; il suffit de vous présenter quelques jours avant d'entamer votre retraite sur place et de parler au moine responsable des retraites de méditation. Il vous fera bien comprendre que ce sera difficile, vous fera peur, mais il faut aller par-dessus; c'est simplement pour vous tester, parce qu'il faut le dire: la majorité des personnes quittent avant les trois premiers jours.
Pour aller sur leur site, c'est ICI !
Sur place, vous pouvez toujours aller au temple qui semble mieux vous convenir, il y a quelques endroits.
Bonne retraite. :)
* Toutes les photos ont été prises sur travel-wildly.tumblr.com/