Dans la loterie de la vie, j’ai gagné la responsabilité d’être la grande sœur d’une famille de trois enfants. Pis loin de moi l’idée de m’en plaindre, parce qu’une petite sœur, j’en ai souhaité une du plus loin que je me souvienne. Pauvre moi! Je ne savais tellement pas dans quoi je m’embarquais avec les cris, les couches pleines et les jouets que je devais maintenant partager…

Mais, on s’attache vite à ces petites bêtes-là! On les aime, on se chicane, on se déteste et on recommence… Tranquillement, on apprend à se connaître. On voit se développer les forces et les faiblesses de chacun. On se connait assez intimement, à force d’avoir pris nos bains ensemble… Et puis on évolue, chacun à notre façon. On grandit, on connait nos premiers amours, nos premiers chagrins, mais surtout, nos premiers pas sans notre mère à nos côtés parce qu’Ottawa-Saint-Prime, ce n’est pas la porte d’à côté!

Autant je n’ai jamais eu une aussi belle relation avec mon frère (salut le kid, je t’aime et je suis fière de la personne que t’es), autant je me suis éloignée de ma sœur. Qui l’aurait cru? Ma petite protégée, celle qui copiait mes moindres faits et gestes veut aujourd’hui pu rien savoir de passer du temps avec sa grande sœur… Ainsi va la vie je suppose! C’est correct et je respecte son choix, malgré ma tristesse à constater un manque de volonté à vouloir connaître la personne que je suis devenue et l’amie que je pourrais être. Ça fait que d’une certaine façon, je suis en train de vivre mon premier vrai deuil, étant donné que personne dans ma famille est décédé (je touche du bois!).

Oui, un deuil. Le deuil d’avoir perdu mon rôle de grande sœur. Mon rôle de protectrice (voire surprotectrice) de mes cadets des grandes méchantes personnes qui pourraient leur faire de la peine. Mon rôle de conseillère et de psychologue à cinq cennes. Parce qu’un deuil, ce n’est pas obligé d’être physique, ça peut aussi être un deuil social.

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Apparemment, il y aurait 7 grandes étapes au deuil, selon les Internet. D’abord, le choc. Le choc de comprendre que ma sœur n’avait plus besoin de moi. Non seulement qu’elle n’avait plus besoin de moi, mais qu’elle n’en avait plus envie non plus. Ensuite, le déni. Je faisais des pieds pis des bras pour planifier des petits moments entre sœurs. Mais ce n’était jamais assez. Elle avait toujours mieux à faire que de traîner avec sa ringarde de sœur. Après déni, la colère. Je lui en voulais de me jeter comme un vieux chiffon.

Je lui ai dit ses 4 vérités pis je voulais pu rien savoir. Puis c’était au tour de la tristesse. Je me disais « pourquoi elle me fait ça. Qu’est-ce que j’ai bien pu lui faire pour qu’elle m’en veuille autant? » Je me suis mise à culpabiliser. À me dire que je n’aurais pas dû partir de chez nous à 17 ans. Que c’était égoïste de ma part et que j’ai failli à mon rôle de grande sœur. Que j’aurais dû rester, que j’ai manqué une grosse partie de leur vie (à mon frère et elle).

Aujourd’hui? Je te dirais bin que je suis rendue à peu près à la cinquième étape de mon deuil, la résignation. J’abandonne. J’ai pu envie de lutter pour quelqu’un qui me considère comme la dernière de sa priorité. J’ai tout essayé pis c’est encore pas assez. Faut que je fasse avec, c’est tout! Dans quelques mois, j’imagine que je pourrai enfin terminer mon deuil en acceptant la situation pis réorienter ma vie.

Parce qu’accepter, ce n’est pas assez. J’aurais aimé assumer cette responsabilité importante que m’ont donnée mes parents en ayant un deuxième pis un troisième enfant. Je pensais sincèrement pouvoir le tenir longtemps et pour toujours, mon rôle de chercheuse de monstre. Mais la vie en a décidé autrement, reste à apprendre à me définir comme autre chose qu’une grande sœur. Comme une célèbre diction le dit si bien, « la fin d’un monde n’est pas la fin du monde.»

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