Nous, les adultes, on s’est restreints avec des horaires chargés et du temps calculé. On prépare notre journée en décortiquant chaque étape de celle-ci par minutes et même parfois par secondes.
15 minutes de course, 10 minutes pour la douche, 15 minutes pour déjeuner, 20 minutes pour habiller les enfants et s’habiller, 10 minutes pour reconduire les enfants, aller travailler et revenir pour d’autres belles minutes préparées. Avoir une routine, ça nous permet de sauver du temps et ça peut être sécurisant pour les enfants. Je n’ai rien contre la routine, j’ai toujours aimé avoir mon petit train quotidien, cependant, lorsque je précipite trop ma fille, je me questionne.
Je marchais avec ma grand-mère l’autre jour, et ma fille prenait vraiment du temps pour avancer, car elle regardait chaque cocotte qui tombait des arbres. Ça la fascinait vraiment. Sans porter attention, je lui ai dit de se dépêcher parce qu’on allait être en retard. Une dame qui passait par là m’a dit tout haut et fort que c’était beau de voir ma fille profiter et remarquer encore les petits détails. Je suis restée bouche bée.
Source image : Marie-Pier Carle
Les jours suivants, j’ai remarqué que Charlie mettait son doigt près de son oreille également lorsqu’elle entendait les avions, les oiseaux, qu’elle secouait son visage lorsque le vent poussait trop fort, qu’elle s’approchait des fleurs pour les sentir. C’est quand la dernière fois que j’avais fait ça ? J’ai été troublée de me dire que parfois je suis pressée, je presse mes enfants aussi. Vite, attache tes souliers, vite, fini ton déjeuner, vite, habille-toi, non arrête de crier, non pleure pas, non assis toi pas là. La limite est mince entre devoir fournir un cadre sécurisant et les laisser prendre le temps de découvrir leur environnement. Je sais que l’on n’a pas le choix parfois, on ne peut pas manquer le travail et on doit avancer. Cependant, j’ai décidé de me lever plus tôt pour essayer de préparer mes choses d’avance. De cette façon, si mes choses sont prêtes le matin même, j’ai davantage de temps de laisser à ma fille découvrir ce qui l’entoure.
C’est beau des enfants, ça court partout et un rien les amuse. Charlie est fasciné par l’eau qui coule du boyau d’arrosage. Je me suis mise à son niveau et j’ai compris. Si on prend le temps de s’arrêter, on peut voir qu’avec nos doigts nous pouvons faire gicler l’eau de différente façon, nous pouvons remplir différents bacs d’eau avec du savon à vaisselle et transformer le tout en méga guerre de bulles. Le truc c’est d’observer et de prendre chaque petit détail pour en créer une histoire ou un jeu. On parle de créativité, de développement moteur, de capacité à résoudre des énigmes, on travaille plein de sphères du développement. Je sais que la vie va vite, qu’on a plusieurs choses à faire dans une journée, mais mon défi est d’essayer d’en faire un peu moins pour ne pas passer à côté ses petits moments qui la font grandir. Ce n’est pas chose facile et parfois je dois lui demander d’attendre, car mon petit stress de voir du linge trainé prend le dessus, mais d’autres fois, je réussis à prendre du temps pour me coucher et observer les nuages. Ils auront toute une vie pour devoir se préparer du temps d’études, du temps pour voir leurs amis, du temps pour venir nous voir aussi, alors pourquoi ne pas les laisser vivre leurs petites secondes, en regardant un peu plus autour de nous toute la beauté qui s’offre à nous. Partons à l’aventure plus souvent, prenons le temps de se faire passer pour un pirate. Prenons le temps de prendre la poussette qui fait plein de bruits au métro pour qu’elle ait l’impression de conduire un véhicule, prenons le temps de recueillir des fleurs, des roches. Ça ne passe qu’une seule fois.