Loin de nous l’époque à laquelle le penseur et philosophe Descartes affirmait : « Les animaux sont essentiellement de pauvres automates, des machines dépourvues de conscience et de sensation ».

Bien heureusement, le courant de pensée a tranquillement évolué et est « retombé sur ses pattes ». Pour reconnaître que la notion de sentience s’applique non seulement à la vie humaine, mais aussi à la vie animale.

Sentience. Capacité à expérimenter, sentir ou percevoir, ainsi que d’avoir une conscience de soi et de son environnement.

Aujourd’hui, il est bien admis que les animaux sont en mesure de ressentir des émotions primaires telles que la peur, la surprise, la tristesse, le dégoût ou la colère par exemple.

  • Qu’ils sont capables de régler des problèmes, d'apprendre de leur environnement et de partager leurs connaissances avec leurs petits.
  • Qu’ils ont les compétences pour utiliser des outils, entretenir des relations durables avec leurs pairs et apprécier la musique.
Bref, qu’ils sont capables d’actions et de réactions que l’on croyait réservées à l’homme, il n’y a pas si longtemps encore.

Dans son essai « La Dernière Étreinte », Frans de Waal, spécialiste du comportement animal de renommée mondiale, nous rappelle que les émotions ne sont pas le privilège de l’espèce humaine. L’observation du vécu du deuil chez l’animal est particulièrement informative.

C’est connu. Nos animaux domestiques peuvent réagir fortement lors du décès d’un membre de la famille. Et le niveau de chagrin semble être proportionnel au degré d’attachement. Un chien, par exemple, peut demeurer plusieurs années à proximité de la tombe d’un compagnon humain.

Suite à la perte de sa partenaire, un corvidé (ex : corbeau) peut lancer des appels vocaux et balayer sans cesse des yeux pendant plusieurs jours, espérant son retour, pour finalement abandonner et se laisser mourir.

Les éléphants sont un exemple de fidélité post-mortem : sur les lieux de la mort d’un congénère apprécié, ils rassemblent de l’ivoire et des os et retournent plusieurs années de suite à l’endroit sacré, pour toucher et inspecter les reliques.

La conscientisation au respect de la dignité animale a fait des progrès importants depuis le courant de pensée qui encourageait à nier la capacité émotionnelle des animaux.
Mais “appelons un chat un chat” ! Ne nous leurrons pas.

Faire preuve d’une estime pour les capacités émotionnelles et mentales des animaux est un enjeu qui est loin d’être uniforme entre les individus et entre les sociétés. Le sujet est en constante évolution. Et la sensibilisation et l’action continue sont les clefs pour maintenir une progression positive de cet enjeu.

On y gagne quoi à être empathique envers la vie animale?

Développer et entretenir notre empathie envers les animaux peut amener des bénéfices à plusieurs niveaux. Sur le plan personnel, ainsi que sociétal.

L’empathie favorise notre compassion et notre bienveillance envers toutes les formes de vie. Elle nous porte à faire preuve de considération et d’actes de gentillesse envers les animaux, mais aussi dans d’autres aspects de notre vie, y compris les relations humaines. Les individus empathiques sont généralement plus enclins à aider les autres, à créer des communautés plus solidaires et à entretenir des relations plus riches avec leurs proches.

L’empathie nous enseigne la responsabilité.

Lorsque nous prenons soin d’un animal de compagnie par exemple, nous affinons notre sens de la responsabilité, notre patience et notre dévouement. Vous avez des enfants à la maison? Ce sera une opportunité pour lui faire découvrir sa capacité à développer son autonomie par la réalisation de petites tâches. Ainsi que sa compétence à “savoir se mettre à la place de l’autre”. Un atout pour leur vie d’adulte à venir.

L’empathie améliore notre santé mentale.

La présence d’un animal auquel nous accordons notre attention peut contribuer significativement à notre sensation de bien-être émotionnel. Et ceci se manifeste via de précieux effets physiologiques démontrés par la science : sécrétion “d’hormones du bonheur” qui s’accentue, celles liées au stress qui chute, libération de neurotransmetteurs responsables de l’amélioration de l’humeur. Partager son quotidien avec un animal peut également calmer le sentiment de solitude. Et il favorise la pleine conscience et la paix intérieure, en encourageant à prêter attention au moment présent.

L’empathie promeut l’éthique alimentaire.

Elle peut nous amener à faire des choix alimentaires plus éthiques, comme le flexitarisme ou encore le végétalisme, qui peuvent apporter des avantages pour la santé humaine et qui contribuent à réduire la souffrance animale.

L’empathie renforce le lien entre l’homme et la nature.

Renforcer notre connexion avec la vie animale et la nature est certainement un enjeu de société majeur dans nos sociétés contemporaines. Elle est un moteur pour nous sentir davantage concernés par la préservation des écosystèmes et des habitats naturels, essentiels à notre bien-être et à la survie de nombreuses espèces, y compris la nôtre.

L’empathie stimule l’éducation.

L’intérêt pour la vie animale peut stimuler la curiosité intellectuelle. Les jeunes et moins jeunes qui se passionnent pour la faune, la biologie ou le comportement animal pourront éventuellement devenir des “penseurs de demain” dans de vastes domaines. Et leur précieuse contribution nous permettra peut-être de faire un pas de plus dans la compréhension de la gestion du bien-être animal.

Quels gestes concrets puis-je poser pour améliorer mon empathie et faire une différence?

Voici des suggestions inspirantes qui peuvent être intégrées à ton quotidien pour te lancer dans ta nouvelle prise de conscience ou pour approfondir des convictions déjà ancrées.

  • Adopte ton animal de compagnie de manière responsable. En offrant une seconde chance à un animal qui a pu connaître des moments difficiles par l’adoption dans un refuge. En accueillant un animal qui a grand besoin d’affection et de stabilité, tu auras probablement l’occasion de créer un lien spécial et profond avec cet être qui te sera reconnaissant pour longtemps. Du même coup, tu contribueras à libérer de l’espace pour un prochain animal dans le besoin. Tu encourageras aussi les bonnes pratiques en matière de bien-être animal, puisque les refuges appliquent généralement des procédures de contrôle strictes pour s’assurer que les animaux sont en bonne santé.
  • Privilégie la stérilisation et la castration, en clinique vétérinaire. Une manière de contribuer à la gestion responsable de la population animale et de limiter la surpopulation et les souffrances inutiles qui peuvent en découler.
  • Soutiens les pratiques d’élevage et d’agriculture respectueuses des animaux. En favorisant des produits d’origine animale issus de sources éthiques, comme l’élevage en liberté et/ou en plein air. En encourageant l’agriculture biologique ou régénératrice (qui mise sur le pâturage), locale et à petite échelle. En réduisant ta consommation de viande pour faire un peu plus de place aux végétaux dans ton assiette (hum !). Un petit truc ici : le concept des “paniers biologiques”, avec ses cultures locales et toujours fraîches, est franchement d’une grande aide pour faire une douce transition!
  • Évite les activités nuisibles pour les animaux. En refusant de prendre part à des évènements ou des activités économiques qui peuvent causer du tort aux animaux : les spectacles de cirque avec animaux sauvages, les zoos sans vocation de réhabilitation, les attractions touristiques qui font la promotion de balades ou de selfies avec les captifs, l’industrie de la fourrure.
  • Sois attentif.ve à la protection de l’environnement. Prendre des mesures pour réduire ton empreinte écologique, c’est aussi avoir un impact positif pour la vie sauvage. En appliquant les 3 R (réduire, réutiliser, recycler). En réduisant ta consommation d’énergie (ex: ampoules LED, thermostats programmable). En optant pour la mobilité durable (ton vélo, le transport en commun ou le covoiturage!). En réduisant ton utilisation de matières plastiques.
  • Sois bienveillant.e envers les animaux que tu rencontres, au quotidien. Que ce soit en évitant de les perturber dans leur environnement naturel, en nourrissant les oiseaux pendant l’hiver, ou en signalant les cas de cruauté aux autorités compétentes (au Québec : le ministère de l’Agriculture, environnement et ressources naturelles).
  • Éduque les autres. En partageant tes connaissances et ta prise de conscience, pour sensibiliser ton entourage à l’importance du respect des animaux et de la protection de leur bien-être. À ce propos, j’ai été ravie de lire que des chercheurs ont récemment conçu des échelles d’expression faciale comme outil d’évaluation de l’inconfort et de la souffrance chez certaines espèces de mammifères. Et que sur la base de ces résultats, de nouvelles applications pour téléphone sont maintenant disponibles pour les chats et les chevaux. L’éducation peut être un puissant moteur de changement; à ton tour d’y contribuer!

Nous sommes en relation constante et perpétuelle avec les animaux, qu'ils soient sous notre contrôle ou encore notre protection. Nous avons la responsabilité morale, au quotidien, de considérer leurs capacités à expérimenter les émotions, ainsi que les conséquences de nos actions sur leur bien-être émotionnel.

En agissant avec conscience et bienveillance envers eux, toi et moi avons le pouvoir de participer à l’évolution de ce courant de pensée qui tend vers davantage de compassion et de respect pour la vie animale.

Et notre récompense « pèsera bien plus qu’un plumeau » ! : la satisfaction de contribuer à créer une société plus équilibrée, harmonieuse et respectueuse de la vie sous toutes ses formes.
Image de couverture d'Ivan Nadaski via Canva
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