Avant de partir de chez mes parents, je me plaignais de la bouffe, j’étais tannée de toujours manger du spaghetti ou des cuisses de poulets bbq. J’me disais "MY GOD, quand j’vais déménager, j’vais pouvoir avoir tout ce que je veux dans mon frigo! Faire plein de recettes de Ricardo toutes les semaines, toujours manger santé, décorer mon appart comme je veux avec plein de plantes vertes pis acheter plein de chandelles de chez Bath & Body Works pour que ça sente la tarte aux pommes partout".

Et voilà, me voici chez nous depuis 1 mois, déménagée à Montréal. Je suis passée d’une petite ville de 6000 habitants à la grande métropole. Ce soir, j’ai mangé un sandwich aux oeufs (si chic). Je n’ai pas sorti mes talents de cuisinière pour imiter Marilou ou Ricardo depuis que je suis ici. Mon alimentation se résume à spaghetti, sandwichs, pattes d’ours à la mélasse et croquettes de poulet. Mon portefeuille ne me permet pas non plus de m’acheter tous les ingrédients nécessaires pour faire les recettes qui me tentent (du matcha pour faire des muffins au thé vert, ça vient pas ben ben souvent en spécial hein). Mais on s’en fout. J’mange, je survis, quoi de plus important dans l’fond.

we heart it

Source: We heart it

Ce que mon déménagement m’a apporté et que je n’aurais jamais cru, c’est de la confiance, de l’ambition. La possibilité de tout faire. Avoir un énorme menu devant moi, et pouvoir choisir ce qui me tente et que je crois être en mesure de faire. C’est comme si je devenais une nouvelle moi, comme si j’avais eu le p’tit coup d’pied dans les fesses qu’il me fallait pour me dire "ben oui ma grande, toi aussi t’es capable". Habiter ici, pouvoir faire ce que je veux et me sentir libre d’être complètement moi-même, ça fait du bien.

Si j’ai envie de m’habiller tout croche un matin, go for it, personne ne s’en rendra compte, pis la ville au complet ne sera pas au courant demain matin. Personne ne va même me regarder dans la rue, même si j’avais l’air d’un croisement entre Marilyn Manson et Donald Trump. En gros, tout le monde fait son truc et c’est ce qui fait qu’on peut être à peu près ce qu’on veut.

Avant, je n’aurais jamais eu la confiance d’écrire et de publier mes textes. Je ne me serais pas forcée à parler anglais couramment, à l’améliorer pour mon travail. Je n’aurais pas appris à mes dépens que mes parents faisaient de leur mieux pour la cuisine, et que ce n’est pas tous les jours que ça nous tente de faire un osso buco pour souper. Un spag, ça fait ben la job.

wake up

Source: We heart it

Ça m’a fait gagner de la confiance, devenir la vraie moi et comprendre que dans le fond, c’est vrai qu’on peut presque tout faire. Pis que non, je n’ai pas besoin de m’en faire de ce que mon voisin ou la fille qui marche dans la rue pense de moi. Who cares?

Comme on dit, il va toujours y avoir quelqu’un pour se plaindre de ce que tu es, de ce que tu fais, de comment tu bois ton café ou de comment tu manges tes oeufs. À la fin de tout ça, qui va vivre avec tes choix, ton emploi du temps, ta façon d’être? Toi. J’ai toujours trop pris en compte ce que les autres pouvaient bien penser. J’suis presque sûre que personne n’aime que les regards de jugement se posent sur eux. C’est en habitant ici que j’ai compris que je n’avais pas le temps pour ça. Pas le temps de regarder autour, juste devant.

Ça m’a pris presque 21 ans et un déménagement pour me faire à l’idée que c’était moi qui importait, en premier. Que les conséquences et mon bonheur dépendaient seulement de moi, et que si je m’arrêtais à chaque âme qui en avait quelque chose à dire, j’finirais à 80 ans avec ben des regrets.

On a chacun notre petite poussée dans l’dos qui nous attend quelque part à un tournant de notre vie, pour finalement devenir le vrai "nous". J’aurais juste aimé ça l’avoir avant. Pis même si ce n'est pas toujours le fun que ma maman ne soit plus là pour faire mes petits plats, que je m’ennuie de mon petit coin une fois de temps en temps, mon déménagement m’a fait comprendre quelque chose de pas mal plus pratique dans la vie qu’une chandelle qui sent la citrouille épicée pis des recettes fancy; la certitude qu’il ne faut jamais que j’arrête de sortir de ma zone de confort.

On arrive à rien en restant blotti dans nos draps le matin et en vivant la même journée 365 fois par année. Être soi-même et sortir de son petit confort, ce n’est pas facile. Mais on y prend goût quand on commence.

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