Pendant un temps, il y avait un running gag avec mes amis. Quand on me proposait quelque chose qui ne me tentait pas, ou que je voulais me sortir d’un engagement XYZ, je disais : « je ne peux pas, désolé, je dois vraiment faire du lavage ». C’était souvent vrai, j’ai une réputation de faire du lavage vraiment pas souvent et de repousser le plus longtemps possible de le faire, parce que j’ai beaucoup de vêtements. Un peu comme Big Foot, ça frôlait l’incroyable de me voir en société.

C’était une excuse, évidemment, mais je l’utilisais un peu trop souvent. Ça devenait une blague plus qu’autre chose, pour amortir le fait que j’allais choker. Une raison vraiment anodine, mais absolument vraie. Je ne choke pas pour participer à une autre activité ceci dit. Je suis le roi d’être double booké dans la vie, mais jamais au grand jamais je ne vais annuler quelque chose pour quelque chose « de mieux ». J’annule par besoin de repos.

Accumuler la fatigue

Le lundi, tu commences ta semaine en lion, tu as toute l’énergie du monde. Tu es motivé.e et tu as le goût de mordre dans la vie tous les jours. « Cette semaine, c’est ma semaine ! » que tu te dis. L’agenda vide, tu planifies tes activités, tes tâches ménagères, tes repas, etc. Ta chum du secondaire t’écrit pour aller prendre un verre le jeudi, ton cousin aimerait bruncher le dimanche, ta BFF suggère d’aller voir un show puis de sortir danser le vendredi. Bien vite, l’agenda est plein et la vie est belle.

*Musique rock and roll* Les rencontres d’équipe se confirment, les dates de livraisons de tes projets approchent. Deux ou trois balles courbes te frappent en pleine face le jeudi matin. Tu commences à fatiguer, à rêver à ton lit et ta doudou. Il manque du poulet dans le frigo, oublié dans ton épicerie récente, une chose de plus sur ta liste qui s’allonge.

Rendu à ton 5 à 7, tu as la langue à terre. Tu n’es pas un.e quitter et tu y vas ; dormir c’est pour les faibles, et tu pourras écouter ton épisode d’Unité 9 raté samedi matin, après la pratique de piscine des enfants...? Quand est-ce que tu es supposé.e souffler ? Tu pousses juste le bouchon trop loin, c’est pas de mauvaise foi, mais le vendredi soir va prendre le bord, et on verra pour dimanche. On dirait bien qu’on va « faire du lavage ».

La batterie sociale

J’ai une petite, minuscule, miniature, batterie sociale. Une pile de montre, presque. Une activité par semaine, idéalement chez moi, avec un petit groupe me suffit. Mon calcul part du fait que, un peu comme ma batterie de cellulaire, ma charge diminue en cours de semaine avec tout ce qui est relatif à la job, l’école ou la famille. Rendu aux « journées de party », je suis un peu plus léthargique que ce que je souhaiterais.

Ma batterie, je n’ai pas non plus énormément de temps pour la recharger. Toi non plus, surement. Ça fait de moi l’ami qui finit par choker (pas à la dernière minute, je suis bien élevé) parce que plus le temps avance, plus je dois me diriger vers ma prise électrique, plutôt que de continuer à l’amenuiser.

Une forme de self-care ?

J’aime mieux passer mon dimanche soir tout seul. C’est un des rares moments où c’est acceptable de jouer le rôle de l’ermite. J’aimerais beaucoup pouvoir me convaincre que de choker, c’est de prendre soin de soi-même, et que c’est du self-care, mais non. Pas plus que de sortir pour un bain de foule ne le serait.

Il y a tellement de façons de prendre soin de soi, et s’isoler n’en fait pas nécessairement partie — surtout s’isoler pour ne pas se reposer. C’est important, dans ton horaire, de considérer et de bloquer des moments pour toi, ta batterie, ton corps et ta santé mentale. La personne que tu ne veux jamais devoir choker c’est bel et bien toi-même. 

Image de couverture par Claudio Schwarz
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