C'est correct d'avoir peur

Aujourd’hui, c’est la première fois où je ne me suis pas sentie en sécurité au Japon. (Maman, capote pas, tout va bien.) Le Japon est un pays très sécuritaire, mais ça bin l’air que y’a du monde pas correct partout. Je tente de ne pas réagir de façon excessive, mais un feeling ça reste un feeling. Je n’écris pas ça pour faire peur à celles (puis ceux aussi!) qui veulent voyager, surtout seul(e)s, mais c’est une réalité. Tout le monde n'est pas gentil dans la vie puis ça s’applique autant chez nous que chez les autres.

Comme je disais, le Japon, c’est un endroit extraordinairement sécuritaire. Je me sens plus en sécurité à marcher toute seule tard le soir ici que n’importe où ailleurs. On s’entend que d’où je viens, j’avais surtout peur d’un face-à-face avec une moufette… mais même dans la (semi) métropole la plus proche (what’s up Ottawa), marcher seule le soir me rendait tout le temps inconfortable.

Je ne me considère pas comme une fille peureuse. Je vis sur les films d’horreur, je vais essayer n’importe quelle bouffe sans crainte (je ne recommande pas la méduse ou le nato) et tous les voyages que j’ai entrepris, je les ai faits seule. Cependant, je suis très consciente de ce qui se passe autour de moi et j’ai tendance à ne pas faire confiance super facilement.

C’est sûr que n’importe quelle fille a vécu les fameux catcalls dans la rue, les klaxons puis des regards beaucoup trop longs qui sont pas mal déplaisants. C’est quand quelqu’un te suit ou te pogne par le bras ou quelque chose que ça va beaucoup trop loin. Quelqu’un qui se tient juste un peu trop proche de toi ou qui te suit parce que t’as pas répondu à son «compliment», bin c’est stressant pas mal. Malheureusement, il faut y faire face parce qu’on ne vit pas encore dans un monde parfait. Quand tu ne parles pas la langue puis que tu ne connais pas l’environnement, c’est encore pire.

Y’a quelques heures, ce qui est arrivé n'était vraiment pas si pire, mais je me suis tellement habituée à me sentir en sécurité ici que ça m’a vraiment frappée. Je ne mentirai pas, le Japon a des problèmes. Se faire pogner dans le train ça peut arriver, mais d’habitude une petite bitch face, ça remet le fautif à sa place. Je suis embarquée dans le train à peut-être 21h, rien de hors du commun. J’ai mangé beaucoup trop de sushis avec une amie japonaise qui habite à l’autre bout de la ville donc j’ai pris mon train toute seule comme d’habitude. Miracle de la vie, le train n'était pas super rempli, donc j’ai pu m’asseoir. Au Japon, c’est rare. Bref, y’avait un banc vide à côté de moi et un homme juste après. Ça m’a pris deux secondes pour réaliser que le gars était saoul, mais bon y’avait un banc de libre entre nous. Il a essayé de me parler plusieurs fois. La première fois, j’ai juste hoché la tête avec un petit sourire. Je ne parle pas Japonais, désolée! Il a persisté, je l’ai ignoré. Il a essayé de me donner des papiers quelconques, j’ai encore refusé même s’il me prenait les mains puis s’étalait un peu trop sur mes cuisses à mon goût. C’est là que réagir, c’est compliqué. L’idée de fâcher un homme saoul assis juste à côté de moi me tentait beaucoup. Sortir du train avant mon arrêt? Peut-être, mais qu’est-ce que je fais s’il me suit? Je ne connais pas les alentours des autres arrêts du tout. Donc j’ai attendu mon arrêt, puis je ne me suis pas levée avant les quelques secondes où les portes s'ouvent juste pour être sûre qu’il ne me suive pas. Je me suis sentie moins sécure ce soir-là. L’homme n'aurait probablement rien fait, tout aurait probablement été correct, mais sur le coup, je n’étais pas bien puis le cœur me débattait.

Je me suis fait prendre par le bras à maintes reprises pour des photos en Chine. J’ai été dans un taxi au Costa Rica où je pensais littéralement mourir quand le chauffeur s’est arrêté dans un port où y’avait beaucoup, mais beaucoup d’hommes qui s’aggloméraient aux alentours. Je me suis fait suivre jusqu’à mon auto à Ottawa puis pour quelques moments à Montréal. Chaque fois, j’ai réalisé ce qui se passait, j’ai réagi puis rien de grave n'est arrivé. J’ai des souvenirs fantastiques de tous ces endroits-là, je ne regrette rien de mes voyages puis je compte en faire encore beaucoup, mais la vigilance c’est important.

J’ai quelques conseils. D'abord, c’est correct d’avoir peur et d’être inconfortable dans ce genre de situation. Si t’as un feeling, suis-le, peu importe si t’as l’air malade mentale. Une fausse bague sur l’annulaire gauche peut aussi aider dans certains pays. Je vais sonner comme ta mère, mais watch ton drink! Regarde ce que le gouvernement du Canada dit sur le pays où tu veux aller, il y a souvent des petits trucs qui ne sont pas alarmants, mais bons à savoir. Ça ne va pas te tuer de prendre quelques minutes pour googler le pays où tu vas. Essaie de suivre les coutumes et les normes vestimentaires, si ce n'est pas par souci pour ta sécurité, par respect pour la culture. Ne donne pas ton itinéraire complet aux gens ou même le nom de ton hôtel si tu peux l’éviter. Reste polie. Je sais que des fois c’est vraiment tentant de répliquer, mais ça peut mal finir. Et finalement, on ne rentre pas dans l’autos des étrangers, même si y’ont des bonbons.

Je te dis pas d’avoir peur ni d’arrêter de sortir de chez toi. Je veux juste que tout le monde ait les meilleures expériences de vie possibles, puis si ça veut dire errer du côté plus sécuritaire des choses, je trouve que c’est pas une si mauvaise idée. On ne peut pas vivre dans une bulle et même si on le pouvait, ça serait probablement vraiment plate. Faut prendre des risques dans la vie, mais les calculer un petit peu, ça fait pas de mal non plus!