Il m'arrive souvent de lire des textes à propos de l'utilisation que font «les jeunes» des réseaux sociaux ou du métier de blogueuse ou encore de ce qu'est la vie d'une influenceure. Ces textes, je les lis souvent en grinçant des dents. Récemment, c'est Marie Saint-Pierre qui a parlé du sujet lors d'une entrevue accordée à La Presse:
Cette réinvention de la communication la laisse perplexe, surtout les côtés cachés. Les gens qui parlent, qui s’exposent au nom des marques alors qu’ils sont payés, en argent ou en cadeaux, ne sont pas assez transparents. Elle demande où sont aussi les impôts payés sur ces dons en vêtements, sacs, chaussures… « Si une blogueuse reçoit pour 500 000 $ de marchandise par année, faudrait peut-être le déclarer… »
Vous pouvez lire le billet entier juste ICI. Puis, ce fut au tour de Nathalie Petrowski de s'attaquer au phénomène dans les pages de La Presse + (juste ICI).
Or le problème c’est qu’Ambert et son mari – leurs enfants ne sont que des accessoires pour l’instant – ne vivent que pour les photos. Leur vie est une perpétuelle mise en scène, une continuelle représentation d’eux-mêmes, calculée mais jamais vraiment incarnée puisqu’une fois la photo prise, au lieu de commencer à vivre le moment, ils passent au prochain tableau et à la prochaine photo, chaque geste, chaque choix, dicté non pas par les impératifs de leur quotidien familial mais par l’angle de l’appareil photo...
Quand je lis ce genre d'article ou d'analyse, je vois rapidement une incompréhension du phénomène. Plusieurs milléniaux montent rapidement aux barricades pour défendre notre génération et c'est souvent là que sur Facebook, on voit des dérapages. J'ai donc eu envie de parler de ce phénomène qui me touche tant et qui semble si complexe pour ceux qui n'oeuvrent pas au quotidien sur les médias sociaux.
Le monde des communications est en constant changement et ce depuis bien plus longtemps que la naissance de l'Internet. Toutefois, depuis les années 1990, tout va très rapidement et il peut devenir difficile pour certaines personnes de suivre le tout. Les blogues ont fait leur apparition bien avant que je ne commence ma carrière sur le web, en 2008, et ils étaient souvent tenus par des journalistes qui voulaient une tribune où ils avaient toutes les libertés ou simplement par des mordus d'écriture qui ressentaient le besoin d'échanger et qui avaient su voir en ce médium un véhicule dont la force ne ferait que grandir.
Je ne dirai pas ici que j'étais une visionnaire. J'étais plutôt une étudiante, fonceuse et déterminée qui cherchait par tous les moyens possibles à se tailler une place dans le domaine des communications . La possibilité de créer ma propre plateforme était alléchante: pouvoir y écrire quotidiennement et monter un portefolio tout en travaillant ailleurs et en étudiant. L'idée d'aller sur le web était logique. Et j'ai suivi les différentes vagues: Facebook, Twitter, Google Plus, Instagram, Snapchat, Insta Stories, Youtube et ça risque de continuer.
Depuis maintenant neuf ans, je fais partie de cette communauté web du Québec qui ne cesse de grandir et de se diversifier. Dire qu'il fut un temps où l'on pouvait compter les blogueurs de la province sur dix doigts! Ce n'est plus la réalité d'aujourd'hui et c'est tant mieux! Toutefois, plus la communauté grandit, plus on dérange, plus les autres professionnels des communications s'intéressent au phénomène et plus on se fait critiquer à tort ou à raison. Je ne défendrai pas ici les pratiques de TOUS les blogueurs et de TOUS les influenceurs. Il est impossible de tous nous mettre dans le même panier, mais j'ose me prononcer pour, je le pense, plusieurs, qui font leur boulot avec éthique et passion, et pour qui ce genre de critique est crève-coeur.
Souvent, lorsque les influenceurs et les blogueurs se font attaquer sur le web, le textes ou les citations demeurent bien en surface. Peu de gens semblent capables de poser des questions avant de juger. Contrairement à bien d'autres, l'émission Paparagilles, elle, a voulu comprendre cet aspect des cadeaux aux blogueurs et pour ce faire, on a choisi de parler à trois personnes, dont moi, oeuvrant dans le domaine. En résulte un reportage humoristique (c'est le but de l'émission), mais tout de même fort explicatif sur ce côté de notre métier (vous pouvez retrouver le tout sur le web, c'était l'émission du 17 mars). Naturellement, quand ceux qui se prononcent ne font pas leurs devoirs, la critique devient bâclée et c'est le public qui en sort perdant, comprenant de moins en moins comment fonctionne le monde des blogues.
Soyons clairs tout de suite: c'est dommage que la publicité sur les blogues et chez les influenceurs ne soit pas régie pas des lois strictes quant à la manière de divulguer un contenu sponsorisé. Toutefois, il ne faut pas que blâmer les blogueurs et les instagrammeurs pour cela. Dans de nombreux journaux et plusieurs revues, les techniques de marketing de contenu sont douteuses et seuls les professionnels sont capables de départager le contenu commandité de celui qui ne l'est pas. Comment peut-on alors protéger le consommateur? Il faut des lois, mais des lois qui s'appliqueront à tout le monde: du journal le plus lu au compte Instagram suivi par moins de 1000 personnes. Quand un contenu est acheté, ça devrait être écrit. Point. Après vient le comment. En ce moment, c'est le far-west sur le web québécois: chaque influenceur se trouve sa propre nomenclature afin d'être transparent avec sa communauté (pour ceux qui le sont) et c'est au lecteur de savoir trouver ce qui est de la publicité et ce qui n'en n'est pas. Complexe? Oui.
Ensuite, quand certaines personnes disent que les blogueurs gagnent des fortunes, c'est faux. Très peu d'influenceurs, au Québec, réussissent à vivre grâce à leur plateforme web. Il y en a comme Cynthia Dulude, les soeurs Stratis, moi et d'autres, mais ce n'est pas la norme. Alors se faire dire qu'on gagne 500 000$ de marchandises par année et qu'on devrait les déclarer est grandement exagéré. Oui, on reçoit des cadeaux, sans qu'on les ait sollicités. Ça ne veut pas dire que ça ne nous fait pas plaisir, loin de là et souvent, on est vraiment heureux de les recevoir. Toutefois, je n'ai, à ce jour, jamais réussi à payer mon épicerie à coup de bouteilles de shampoing ou de sacs à main. Et ce ne sont pas que les influenceurs qui reçoivent ces cadeaux. Les journalistes beauté de magazines aussi (entre autres)... alors que faire de cela? Ce n'est pas une pratique qui est nouvelle. Ça se passe dans les magazines depuis des années. La différence aujourd'hui, c'est que les gens les mettent sur Instagram et autres, alors qu'avant, le produit pouvait recevoir, pas nécéssairement tout le temps, une mention dans le magazine. Alors comment demander à des gens de payer des impôts sur des choses qu'ils ont reçues sans les demander? Et si on me demandait à moi de payer pour ces cadeaux, j'en refuserais beaucoup... et ce, même s'ils me font plaisir.
Ici, chez LeCahier, on s'est penché sur la question et voici la manière qu'on a choisie pour que ce soit toujours clair pour nos lectrices:
- Nous "taggons" les commanditaires des publications Facebook comme sponsor (cette option n’est pas encore offerte à toutes les pages Facebook, c’est seulement pour les pages vérifiées pour l’instant, mais ça ne saurait tarder)
- Nous écrivons [Commandité] dans la publication Facebook
- Nous écrivons *Cet article est commandité par [Nom de la marque] en première ligne de l’article
- Sur Instagram, nous utilisons #ad lorsque la publication est payée, #gift lorsque nous parlons d’un produit qui nous a été offert ou #collab quand c'est une collaboration non-rémunérée sur du long terme
- Pour ce qui est des cadeaux, on n'est jamais obligé d'en parler et quand on en parle, c'est vraiment parce qu'on en a envie.
Les blogueuses - comme les instagrameuses, pour la plupart, ne font justement pas ce métier pour les cadeaux. Quiconque a un compte instagram peut en recevoir, des produits gratuits, via certains sites en échange de publications. Il suffit de le googler pour en trouver une multitude.
Toutefois, ce ne sont pas nécessairement les contenus commandités qui sont attaqués lorsqu'on parle du métier de blogueur et d'instagrammeur. Souvent, c'est tout simplement le métier lui-même. Comme si «on ne fait rien». Ah bon. Comme si notre vie n'était que photos et qu'après, dès l'appareil fermé, on perdait notre sourire et on ne faisait rien. Ah. Tiens donc. C'est facile comme manière de nous percevoir, non? Simpliste même. Et c'est plus facile de rire de nous si on nous perçoit ainsi plutôt que de nous voir comme des entrepreneurs qui ont créé leur emploi.
Certes, ce ne sont pas tous les influenceurs qui vivent de leurs blogues ou de leurs vidéos Youtube ou de leurs photos Instagram. Mais c'est le cas pour de plus en plus d'entre eux et il est temps de cesser de voir ces derniers, dont moi, comme des adolescents naïfs collés à leur téléphone intelligent comme au sein de notre mère. Nous sommes plus que cela.
J'ai rencontré plusieurs blogueurs, instagrammeurs et youtubeurs qui m'ont jetée à terre par leur sens des affaires, leurs créativité et leur amour pour leur travail. Ce dernier point, pour moi, c'est la partie la plus importante. Combien de mes amis vont au boulot chaque jour sans y prendre plaisir? Plusieurs. Quand on est son propre patron et qu'on crée du contenu à propos de sujets qui nous passionnent, on aime notre métier et on le fait dans la joie. Ça transparait dans nos publications. Ensuite, ces derniers travaillent fort, très fort, pour réussir à se bâtir une communauté et pour s'adresser à celle-ci chaque jour. Juste chez Le Cahier, Virginie et Max travaillent à temps plein pour s'assurer que le contenu et les partenariats sont toujours intéressants. Virginie gère une équipe de 75 collaborateurs au quotidien, c'est énorme! Publier 5 articles par jour, animer des réseaux sociaux, maintenir une équipe tissée serrée, couvrir des événements, développer des partenariats, c'est du vrai travail.
En bref, cet article n'est que le premier d'une série afin de vous ouvrir les portes de notre domaine. Merci de comprendre que je parle ci-haut de la situation au Québec ( Canada ) et non ailleurs dans le monde puisque les lois et les pratiques diffèrent d'un endroit à l'autre.
On ouvre la discussion: qu'en pensez-vous?