Les personnes nées de sexe masculin reçoivent quatre fois plus de diagnostics d’autisme que les personnes nées de sexe féminin. C’est ce que disent de récentes statistiques. Cette variante du développement concernerait donc plus d’hommes que de femmes. Mais si ce n’était pas le cas ? S'il y avait autant de femmes que d’hommes autistes sans qu’elles soient diagnostiquées ?

Passer entre les mailles du filet

Troubles de personnalité, troubles alimentaires, TDAH, dépression. Beaucoup de femmes et de jeunes filles reçoivent ces diagnostics bien avant de savoir qu’elles sont autistes. Certaines atteignent même l’âge adulte sans jamais comprendre pourquoi elles se sentent aussi différentes des autres.

Pourquoi les filles et les femmes passent-elles entre les mailles du filet ?

Les clichés

« Les autistes sont cartésiens et rigides. Ils ne peuvent pas faire face à l’imprévu. Leur intelligence émotionnelle et sociale est peu développée. Ils sont surdoués ou ont une déficience intellectuelle. »

Si je te disais qu’une personne peut être autiste et n’entrer dans aucune de ces catégories. Si je te disais que ce sont des clichés que même certains travailleurs de la santé utilisent encore. Ces caractéristiques ne représentent qu’une infime partie des autistes, dont la majorité sont probablement des garçons et des hommes.

Se pourrait-il que les filles et les femmes n’aient pas de diagnostics parce que leur différence se manifeste autrement ?

Le camouflage

Beaucoup de filles et de femmes autistes camouflent leur inconfort derrière des mécanismes de défense.

Les petites filles caméléons apprennent très vite les conventions sociales. Elles passent inaperçues par leur capacité à imiter les comportements des enfants neurotypiques.

Leurs intérêts spécifiques ont tendance à se présenter comme des passions. Une fille de huit ans qui connaît toutes les sortes de chevaux, ça a l’air moins atypique qu’un garçon de huit ans qui connaît par cœur le plan du métro.

Se faire des amis, avoir de bonnes notes, se fondre dans la masse.

On camoufle au point de ne plus savoir qui on est vraiment. On cache nos inconforts et nos traits atypiques tellement profondément qu’on en vient à les oublier nous-mêmes.

Quand on va moins bien et qu’ils refont surface, on se demande pourquoi on réagit aussi fortement.

« Tu n’as pas l’air autiste »

Ça a l’air de quoi une personne autiste ? On peut très bien être différente tout en ayant un travail, des enfants, une vie de couple et des amis. On peut paraître parfaitement normale aux yeux des autres et se sentir comme une extraterrestre à l’intérieur.

Je ne ressemble pas aux autistes que tu vois dans les fictions parce qu’ils sont caricaturés. Je ne ressemble pas non plus à ton garçon autiste de cinq ans parce que je ne suis pas un garçon de cinq ans.

« Tu ne peux pas être autiste, tu communiques bien, tu me regardes dans les yeux. »

Oui, je te regarde dans les yeux parce que je sais que si je ne le fais pas, tu ne te sentiras pas écouté(e). Ça ne me vient pas naturellement, même que je trouve ça vraiment pénible. Je voudrais pouvoir t’écouter en fixant le crayon que j’ai dans ma main sans que tu le prennes personnel. Ne t’inquiète pas, je t’écoute même si je ne te regarde pas.

Pas d’empathie ?

Un cliché qui mérite son paragraphe à lui seul.

Énormément de femmes ayant appris tardivement qu’elles sont autistes exercent des métiers où les relations humaines sont à l’avant-plan. Ce n’est probablement pas pour rien. Infirmière, enseignante, médecin, s'il y a des métiers qui nécessitent de l’empathie, c’est bien ceux-là.

Peut-être que la façon dont je démontre mon empathie ne correspond pas à l’image que les neurotypiques se font d’une personne empathique ?

Les gestes que tu considères comme des marques d’empathie ne sont que des codes sociaux. Ça ne change rien à mon ressenti. Ce n’est pas parce que je ne pose pas ces gestes que je ne peux pas me mettre à ta place et imaginer ta souffrance.

Des défis, mais aussi des forces !

Alors que certaines personnes autistes revendiquent la notion de trouble ou de handicap, d’autres s’y opposent. L’autisme est un spectre. Il y a autant d’autistes différents que de neurotypiques différents. Chaque personne vit sa réalité à sa manière. L’autisme peut être synonyme de souffrance pour une personne, et être un atout pour une autre. Il peut également être les deux à la fois ou en alternance, dépendamment des périodes de la vie. Être autiste, c’est vivre tout plus intensément. Les émotions positives comme les négatives. Être autiste, parfois, c'est horrible, parfois, c'est génial.

Particularités sensorielles, anxiété, hypersensibilité. Tous ces traits peuvent rendre le quotidien d’une personne autiste beaucoup plus difficile.

Par contre, être sensible et créative, ça permet de percevoir le monde d’une autre façon. Ça comporte son lot d’avantages et de forces. Ça laisse place à un potentiel que les neurotypiques ne peuvent même pas imaginer. Toujours avoir le hamster dans sa tête qui tourne à la vitesse de l’éclair, c’est épuisant, mais on ne s’ennuie jamais !

Écouter les personnes autistes

Si tu souhaites vraiment comprendre l’autisme, il faut avant tout écouter ce que les personnes autistes ont à dire. On veut surtout éviter de tomber dans les clichés et les préjugés stigmatisants. Il existe beaucoup de contenu créé par des parents d’enfants autistes ou par des professionnels de la santé. Leur vécu et leur savoir sont valides, mais ça reste le point de vue d’une personne neurotypique. Qui de mieux pour t’expliquer ce qu’est l’autisme qu’une personne qui le ressent au quotidien ?

À toi qui te sens différente

Tu te reconnais dans ce que tu viens de lire ? Ou peut-être te questionnes-tu déjà depuis un bout de temps ? Sache que tu n’es pas seule. Même si une consultation en neuropsy au privé va te couter un rein et que la liste d’attente au public est interminable, il y a des ressources pour t’aider. Même si elles ne remplacent pas un diagnostic, comprendre enfin pourquoi on se sent différente peut être soulageant.

Ressources :

  • Embrace Autism
    Un site en anglais qui déborde d’outils et de tests pour mieux te connaître.
  • Autisme invisible
    Ressource créée par la comédienne Rachel Fontaine. Celle qui interprétait Maria dans la série culte Radio Enfer. Elle a reçu un récent diagnostic d’autisme et souhaite aider les autistes invisibles, comme elle.
  • Aspie Quiz
    Un quiz en français qui te permettra de savoir où tu te situes dans le spectre.
  • Julie's academy
    Julie Dachez, autiste et militante, plonge les gens dans son univers et les éduque afin de mieux comprendre l’autisme.
  • Paige Layle
    Une youtubeuse anglophone qui nous partage son quotidien et ses opinions en tant que jeune femme autiste.
Image de couverture via Pixabay
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