Hier soir avait lieu le 41e Gala de l’ADISQ, où la musique québécoise de tous les genres a été célébrée. C’est dans une ambiance festive que les artistes et le public se sont réunis à la Salle Wilfrid-Pelletier de la Place des Arts pour une soirée haute en couleurs.
LE TAPIS ROUGE
Dès 18h30, les artistes ont commencé à défiler sur le tapis rouge entourés de journalistes et du public. On sentait la fébrilité de tous, qui avaient le coeur à la fête et à la célébration. J’ai pu m’entretenir avec certains de nos artistes musicaux, et j’étais curieuse de savoir qu’est-ce qui les rendait les plus fiers d’être présents au gala de l’ADISQ. Voici donc quelques unes de leurs réponses à la question « Qu’est-ce qui te rend le/la plus fier(e) d’être ici ce soir? »
Claudia Bouvette
Patrick Watson: « Le Québec c’est quand même une scène musicale assez petite, on se connaît tout le monde et c’est le fun de célébrer la musique tous ensemble, de voir les gens… J’ai plein d’amis ici, fait que je suis fier de faire partie d’un comité musical. C’est bien d’avoir ces moments-là qui célèbrent de façon plus évidente le langage francophone… Mais j’pense que c’est important de savoir que les idées québécoises c’est plus qu’un langage, c’est des idées et des façons d’explorer. Même si je chante en anglais, je trouve qu’il y a beaucoup de racines et de façons de penser québécoises. »
Elisapie: « Qu’on reconnaît mon travail, mon album… D’être parmi des pairs que j’aime, tout simplement. »
Sarahmée: « D’être la première rappeuse nominée comme révélation! »
Mathieu Langevin, alias Matt Lang: « En fait, je suis fier de mon industrie, de mes chums, parce que c’est une grosse famille cette industrie-là, tout le monde se connaît. […] Pis de voir mes chums ce soir, c’est cool, parce que des musiciens, on peut pas souvent se voir parce qu’on est en show tout le temps fait que c’est pas évident de se voir. » J’ai ajouté: « Un peu comme une grosse réunion de famille? » Il a répondu en riant: « En plein ça! »
Amélie Larocque: « Mes deux nominations, c’est sûr que ça me rend fière! Je suis contente d’avoir pu collaborer avec des gens qui sont aussi talentueux. […] Ça me rend fière aussi d’être ici pour célébrer la musique, la diversité des genres, ça c’est trèèès important. »
Pierre Lapointe: « C’est un moment hyper important et touchant [le gala de l’ADISQ]… C’est notre party de bureau à nous autres! […] C’est important de crier haut et fort ses différences et de les flasher un peu partout. »
Pierre Lapointe
LE GALA
Sans perdre une seule seconde, le gala a été lancé sur une note de « party », en laissant la place au rap et au hip hop accrocheur avec une prestation grandiose de Loud, Koriass, FouKi, Sarahmée et Souldia. Ils ont su bien lancer la soirée en occupant tout l’espace, en allant même jusqu’à la mezzanine, ce qui a contribué à rendre le public en mode festif. J’ai apprécié que l’ADISQ ait accepté de mettre le rap de l’avant dès le début, étant donné sa popularité au Québec et cela contribue à son acceptation en tant que genre musical fort et de renforcer sa place au sein de la création musicale au Québec.
Louis-José Houde, revenant à l’animation pour une 14e année, a su «puncher» et se renouveler comme il sait si bien le faire. Son discours d’ouverture était bien bâti pour lancer le ton de la soirée, en se moquant des controverses de l’année dernière à sa façon, pour détendre l’atmosphère. Par exemple, son «Il est 8 h 04, Mario Pelchat est déjà en tabarnak, bienvenue» a su faire rire les spectateurs d’un rire bien senti, en accord avec l’ambiance festive qui se dégageait de la Salle Wilfrid-Pelletier.
Cette année, une nouvelle catégorie faisait sa place au sein du gala, soit Artiste autochtone de l’année. La poète innue Joséphine Bacon et le chef de l’Assemblée des Premières nations du Québec et du Labrador, Ghislain Picard, étaient en charge de remettre le prix au gagnant. C’est avec fierté que Florent Vollant a remporté les honneurs, puis, après être monté sur scène pour soulever son Félix, il s’est adressé à la foule en proclamant: « En ce moment historique, on est tous gagnants ». Je félicite l’ADISQ d’avoir créé cette nouvelle catégorie afin de mettre en lumière tous les talents autochtones, qui selon moi méritent d’être mis de l’avant pour leur créativité et leur résilience. Pourtant, j’ai un petit bémol avec cette catégorie, car elle implique que « artiste autochtone » serait un genre musical en soi. Pourquoi les artistes autochtones ne pourraient pas être inclus directement dans les catégories Folk, Pop, Rock, Rap, etc.? Lors de son discours, Florent Vollant est allé dans cet ordre d’idée en résumant sagement la situation: « Merci à l'ADISQ de nous avoir fait cette place, soyez sans crainte, on va la prendre. On n'est pas ici parce qu'on est autochtones, on est ici parce qu'on est bons. » Je pense qu’avec la création de cette nouvelle catégorie, l’ADISQ est sur la bonne voie, mais il faut continuer à travailler dans cette direction afin que les artistes autochtones soient reconnus à leur juste valeur.
Florent Vollant
La soirée s’est déroulée dans la célébration du talent de tous les genres avec des prestations musicales variées. De la pop bien ficelée de Marie-Mai, en passant par le ver d’oreille « Ouvre tes yeux, Simon » des Trois Accords, jusqu’au touchant duo d’Elisapie et d’Alexandra Stréliski, on en a vu de toutes les couleurs. Et parlons-en, d’Alexandra Stréliski! Elle a remporté le prix de révélation de l'année en plus d’être sacrée auteure-compositrice de l’année. Je suis réjouie de voir qu’elle a su gagner les honneurs tout en restant authentique. C’est beau de voir qu’elle reste fidèle à elle-même dans sa création néoclassique instrumentale et qu’elle est récompensée dans son unicité en tant qu’artiste.
Alexandra Stréliski
Il faut être fier de ce qu’on crée musicalement au Québec, car nos artistes sont variés et talentueux. Je pense sincèrement qu’il faut les encourager dans leur démarche artistique et leur carrière, et pour ce faire, il faut savoir dire notre mot contre les géants du numérique comme Spotify, qui n’offrent pas aux artistes une reconnaissance à leur juste valeur, tout en se sauvant de payer des impôts ici, au Québec. Par exemple, lors de sa montée sur scène, Pierre Lapointe s’est exclamé: « Pour un million d’écoutes de ma chanson Je déteste ma vie (dont j’ai écrit les paroles et la musique) sur l’application Spotify, j’ai touché 500$. » Ça n’a juste pas de bon sens! Les musiciens méritent d’avoir leur travail reconnu à leur juste valeur, et pour cela il faut se battre en tant que société et faire des choix éclairés sur notre façon de consommer de la musique. On a tendance à tomber dans la facilité, mais il faut penser plus loin et se questionner sur nos choix et leurs conséquences sur l’industrie musicale au Québec. On a vu que les artistes sont solidaires entre eux, maintenant c’est à notre tour d’être solidaires avec eux.