J’ai trouvé un vieux casse-tête, un casse-tête qui avait visiblement du vécu, un peu poussiéreux, avec une boîte déchirée, qui laissait peine à voir l’image complète. J’ai soufflé dessus et je me suis mise au défi de le découvrir, le comprendre et le faire, lui laisser une chance de se construire. J’y ai mis du temps, de la volonté et de la persévérance. Certains coins étaient faciles, un beau ciel bleu, tous les morceaux entraient l’un dans l’autre, sans résistance. Lorsque je suis arrivée au coin noir, qui semblait être un vieil édifice, les morceaux qui semblaient être parfaits ensemble craquaient et refusaient de s’emboîter.
Même avec de la force, ça ne voulait pas entrer dans le moule. Je me suis dit que ça devait être tout gonflé, que les mauvais plis ont passé. Je l’ai mis de côté et j’ai continué avec mon ciel bleu, un beau lac s’étendait aussi près de l’immeuble tout sale. J’avoue que j’avais moins envie d’y attarder du temps à cette partie, parce que ce n’était pas attrayant, pis c’était tough.
Le problème, c’est qu’au bout d’un mois de travail ici et là, de mise de côté, il fallait que je m’attaque au bout sombre, au bout qui ne voulait rien savoir. J’ai mis mes gants blancs, et avec beaucoup de tendresse, j’ai fait un morceau par soir. Tranquillement, le casse-tête semblait s’assoupir, me laisser une chance de comprendre l’image complète. Je sais que ça peut sembler intense, mais on faisait équipe dorénavant, moi pis mon casse-tête. J’avais été capable du plus beau, mais le plus laid faisait partie du portrait aussi.
Petit peu par petit peu, j’ai fini le projet. Bien fait, en ayant pris le temps d’apprendre à saisir chaque coin du paysage, de m’être attardée à chaque détail, chaque pli, chaque résistance.
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Un sourire en coin m’est venu au visage, avec mon café chaud à la main. J’ai fait un beau parallèle. Le comportement d’une personne était exactement comme mon casse-tête. Plusieurs aspects, plusieurs choses à prendre en considération. Parfois, on pense que l’évidence saute aux yeux, mais la personne n’est pas rendue là, les morceaux ne collent pas ensemble, il y a de la résistance, des mécanismes de défense, et ça prend du temps. Sans le noir, il n’y a pas de beau, il y a les deux dans une personne. Même si on ne sait pas ce que la personne a à nous offrir dès le début, en prenant du temps, de la persévérance, qu’on prenne le temps de se questionner sur ce qui nous fâche, ce qui nous impatiente, on trouve des réponses. Parfois sur soi, parfois sur les autres.
J’aime l’idée du casse-tête, parce qu’un comportement, ce n’est pas simple, c’est un beau passe-temps, mais ça prend de la patience et du vouloir. Chacun peut l’interpréter différemment, chacun peut l’assembler à sa façon afin d’obtenir un ensemble. Le plus frustrant, c’est que parfois, il manque un ou des morceaux et que ça prend un méchant moment avant de le ou les retrouver. Et parfois, il est plus complet sans les morceaux, et on peut s’imaginer ce qui peut compléter, ou aussi l’accepter sans tous ses morceaux, encore une fois, ça dépend de chacun et de ce qu’on cherche vraiment à comprendre.