5 balles dans la tête. Le moins que l'on puisse dire, c’est que le titre frappe. Pour ne pas dire qu’il fait carrément peur.

Pourquoi aller voir une pièce avec un tel titre?

Et pourtant, j’ai eu envie d’y aller. La curiosité l'a emporté, malgré toutes les questions que je me suis posées rapidement: quel type de soirée allais-je passer? Une soirée dépressive? Ou plutôt triste? En colère?

Pendant vingt ans que nous entendons parler de la guerre en Afghanistan, sur le contexte géopolitique qui a amené cette invasion, et sur toutes les répercussions qui ont découlé de celle-ci. Mais il faut se l’avouer, la majorité du contenu qui nous parvient est, la plupart du temps, à haute saveur américaine. Une pièce de théâtre, écrite par une femme, Roxanne Bouchard, une Québécoise de surcroît, qui parle de soldats canadiens, et voici deux raisons qui m’ont donné espoir de croire que j’allais voir et entendre quelque chose de différent de ce que qui nous a été offert depuis maintenant les vingt dernières années.

Et je n’ai pas été déçu!

Dès le départ, la pièce nous invite dans le vif du sujet et nous pose les questions suivantes: quelle est notre perception de la guerre? Quelle est la perception que nous avons des soldats? Assis, dans notre salon, campés dans notre quotidien, nous qui ne sommes pas sur le terrain, comment voyons-nous tout ça?

Puis l’actrice principale, qui joue le rôle de l’autrice Roxanne, dans le cadre d’un projet personnel, va à la rencontre d’anciens membres des Forces armées canadiennes pour écouter leurs histoires, et éventuellement les retranscrire.

Plusieurs sujets et aspects de l’armée émanent de ces conversations. Pour commencer, la fascination sur les armes à feu: le fait de tenir dans sa main un fusil, un vrai, cet objet qui ne quitte jamais le soldat, même lorsqu’il dort; de déclencher l’envoi d’un obus, un test qui a été fait par Roxanne Bouchard, fortement encouragée par les militaires qu’ils voulaient qu’elle vive pleinement la sensation de tirer un obus afin qu’elle comprenne leurs réalités (pour la note, l’obus à été tiré dans une zone inhabitée pas trop loin de la base militaire de Valcartier); cette obsession de vouloir toujours plus, toujours plus fort, plus vite, des chiffres dont on se vantait, à plus de 50 cartouches par seconde, des tirs qui sortaient à une vitesse de plus de 830 m/s.

Et puis, au fur et à mesure que Roxanne parle et échange avec les militaires, cette fascination s’estompe.

On commence à évoquer la difficulté des terrains sur lesquels les militaires devaient rester alertes en tout temps: la chaleur, le sable, les embuscades, le danger étaient pressentis de partout. Il fallait faire attention aux tirs ennemis, et aussi aux tirs de notre propre camp. Ces éclats d’obus qui se perdaient par ricochets, qui blessaient et laissaient des marques à jamais sur des humains, des humains qui se sentaient tout d’un coup moins puissants. Car la mort ne rôde pas loin. Les ami.e.s qui partaient le matin ne revenaient pas toujours au camp en fin de journée.

Les témoignages sont touchants, et la mise en scène est impeccable. L’énergie dégagée par les acteurs, dont leur jeu est impeccable, nous transporte bien dans leurs récits.

Nous nous doutons bien toutes et tous des atrocités de la guerre, il n’y a pas de réelles surprises avec ce que nous entendons de la bouche des soldats: et pourtant, il y a une différence entre consulter ce que nous proposent les journaux, les livres et les, et de regarder dans le blanc des yeux quelqu’un.e qui était là-bas et qui est en revenu vivant.e.

Et lorsqu’on voit à la fin que ces soldat.e.s, ont pu s’en sortir grâce à la solidarité qu’ils avaient les un.e.s envers les autres, c’est là que l’on comprend que ces soldat.e.s sont des humains comme nous.

Image de couverture via Théâtre Duceppe
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