On ne s’habituera jamais à l’absence. C’est vrai, on est des êtres appelés à évoluer, à s’adapter à de nouvelles situations, à perdre continuellement des gens qu’on aime ; on ne s’habituera jamais. Qu’est ce qui pourrait expliquer cette « inacceptation », cette incapacité à s’habituer ? Incapacité parce que dans certains moments, on veut vraiment passer à autre chose, mettre de côté cette partie qui nous tient en otage. Ça ne dépend pas toujours de nous. 

J’ai voulu prendre du recul, voir si je pouvais me passer de ces mots qui gigotaient à l’intérieur de moi. Pour une fois, je ne voulais pas écrire. Je voulais vivre d’une autre manière, ressentir d’autres choses, faire d’autres choses. Je ne voulais plus être une feuille blanche sur laquelle les maux tombaient. Je voulais fuir. Comme si je voulais me défaire de ma peau, de moi.

Alors, j’ai préféré m’adonner à d’autres activités : randonnée, photographie, lecture. Mais bon… on ne peut pas fuir trop longtemps. Il y aura toujours quelque chose pour nous ramener à la réalité : un parfum, un message texte, un souvenir lointain, une photo, un cadeau, un appel inattendu.

Les souvenirs les plus subtils sont les plus difficiles à effacer de la mémoire.

Puisqu’ils sont petits, insignifiants, on dit que ce n’est rien. On ne tient même pas compte d’eux, comme s’ils n’existaient pas. Alors, on fait semblant d’avancer avec des pas incertains. De même qu’il y a des douleurs qui ne guérissent pas.  Il faut juste apprendre à vivre avec. Vivre avec veut dire, laisser les choses nous habiter, remplir nos quotidiens. Puisqu’on est formé de toutes ces choses qui ont fait partie de nos vies à un moment donné. Ce sont des petits bouts de nous, de l’autre qui n’est plus là.

C’est ce que j’ai appris à faire au long des années. J’ai appris à accepter ces marques de vie que je porte sur mon cœur et sur mon âme comme des habits quotidiens. Accepter quelque chose est plus qu’un acte. C’est avoir le sentiment, la ferme conviction que cela t’appartient. C’est la considérer comme telle.  Je vis avec tout ce qui me fait du mal, et ce qui me fait du bien.

Ce n’est pas chose facile, je l’avoue.

Mais, c’est mieux de passer sa vie à fuir. C’est un processus dans lequel on accepte d’ouvrir cette partie de soi qu’on a voulu mettre de côté, et accepter que cela fasse partie de nous. Accepter qu’on vive toujours dans le manque : d’une personne ou d’une chose. Et quand on accepte réellement cette dimension de la vie qui nous échappe complètement, on aura la sensation de respirer une bouffée d’air frais, un sentiment de faire qu’un avec cette partie. Il faut accepter que les gens finissent toujours par s’en aller.

C’est une décision qui ne dépend pas de nous. Alors, il faut juste remercier la vie d’avoir eu la chance de rencontrer ces personnes formidables, avec qui on a connu des moments de bonheur intense, ainsi que des douleurs inexplicables. Puisque l’essence même de la vie se résume ainsi : bonheur et douleur. C’est une partie de chaque être humain.

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