Ça hurle. Ça braille. Mon silence. Mon gouffre. Je dessine des milliers de cercles noirs sur des feuilles de papiers froissés au fond de moi. Un éternel recommencement. L’infinitude tristesse d’un espace inhabité. Mais à la fois, cette paix. Bleu ciel. Cette crisse de paix. Je l’embrasse même si elle m’avale.

Cette paix qui m’éloigne de vous

Vous qui m’avez enterrée si longtemps avec vos voix puissantes, vos yeux réprobateurs et vos critiques assassines. Qui étais-je auprès de vous ? Qu’une ombre sous un banc de parc. Je mourais. Je meurs. Je suis morte en dedans. Mais la mort est paisible. Vous aimer, moins paisible, les hommes. Hommes de ma vie. Ceux à qui j’ai donné mon cœur. Et qui en ont fait des confettis. Ça hurle. Ça braille. Mon silence. Mon gouffre.

Être seule est vertigineux, mais c’est l’extase à la fois. Celle de prendre de l’espace dans son propre univers. Prendre tout l’espace qui me revient. D’aimer les moindres recoins de cette personnalité fractionnée et de ce cœur crevassé. Regarder cette poussière sur les étagères de mon âme sans dégoût. Une âme. C’est ce qu’il me reste d’entier. Mon cœur déployé et replié. Mes yeux ouverts et refermés. Ma vie avançant et s’arrêtant.

Je suis seule. Je vis seule. Je mange seule. C’est d’un silence à faire souffrir. Mais cette souffrance me répare de vos amours conditionnels. Vos amours de surface. De toile. De maquillage. De vide. Vous n’avez jamais aimé que le vert de mon iris. N’être jamais assez. C’est un repos impossible. On parle toujours d’amour. Les chansons, les poèmes, les histoires pour enfants. On parle toujours d’amour.

Mais pourquoi ne parle-t-on pas davantage de repos ?

Le repos en soi. Je me repose de vous. De vos amours toxiques. Je me répare tranquillement de vos coups d’épée au fond de mon cœur. Nicolas. Thomas. Guillaume. Je vous ai donné du temps. Je vous ai donné de l’espace. Trop d’espace. Je suis épuisée. Je suis seule. Je vis seule. Je mange seule. La solitude et le vide se dévouent pour moi. Ils restent fidèles à chaque battement de mon cœur.

Ils sont là. Éclairent les cicatrices. Épongent le sang. Je me couche au pied de l’arbre le plus grand. Je ferme les yeux. Il y a une mélodie qui joue. Je la reconnais. C’est la mienne. Que la mienne. Et je l’apprécie, cette musique. Le violon. Le piano. Et ils jouent ensemble. On pourrait penser que cette mélodie est triste, mais en fait, elle ne l’est pas. C’est paisible. C’est paisible d’être seule. Ça hurle. Ça braille. Mon silence. Mon gouffre. Je dessine des milliers de cercles roses sur des feuilles de papiers froissés au fond de moi. Un éternel recommencement. D’une couleur différente cette fois-ci. L’infinitude paix d’un espace inhabité.

À qui donne-t-on son cœur ? À qui donne-t-on sa vie ? À qui donne-t-on son temps ? À qui donne-t-on ses pensées ? Qui mérite donc tout cela à la fois ? Réfléchis bien à qui tu te dévoueras. Réfléchis-y bien à qui te méritera.

Image de couverture par Matthew Kwong
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