Le texte suivant a été rédigé dans le cadre du projet « Hommage aux fxmmes #metoo ». L’idée derrière ce projet est d'offrir une nouvelle voix au mouvement #metoo, particulièrement dirigé vers des dénonciations par les fxmmes d’agressions ou d’inconduites sexuelles, bien que les fxmmes ne soient pas les seules à être victimes de la violence sexuelle. Les auteurs.trices qui prendront part au projet partageront avec vous leurs réflexions, leurs opinions, leurs observations ainsi que leur soutien, leur amour et leurs souhaits pour l’avenir quant à la cause de la violence sexuelle. 

- Laurianne André, bachelière en sexologie

Lorsque j’ai entendu parler de ce projet, j’ai tout de suite trouvé que c’était une merveilleuse idée. Puis, plus j’y pensais, plus je trouvais cela absurde. Absurde que ce projet ait à voir le jour, en fait. Quand on s’assoit et on y pense deux minutes, c’est triste de constater qu’on vit dans une société où l’adversité et la division règnent encore autant. Peu importe à quel point on essaie de se convaincre que les rapports sociaux entre les sexes vont de mieux en mieux, force est de constater que ce n’est pas le cas. On a beau tenter de s’émanciper, de se dire qu’on est bien plus que notre sexe/genre, de rendre la ligne de division plus floue; force est de constater que malgré les efforts qui sont faits, on se fait toujours rappeler et réduire à l’essentiel : notre statut de femme.

Je pense que les temps qui courent traduisent des changements de mentalité énormes et c’est pour le mieux, mais les femmes continuent d’être violentées au quotidien dans les plus petits gestes. Il faut sortir d’une logique égalitaire qui n’engloberait que la parité salariale ou l’accès à l’emploi : c’est tellement plus large que ça. La répartition de la charge mentale et émotionnelle, de la charge contraceptive, des tâches ménagères : tout ça est tellement loin d’être réglé. Les femmes ont tous les droits du monde de crier haut et fort leur colère, comme elles ont le droit d’être épuisées du traitement qu’on leur réserve. Absolument personne n’est en mesure de juger des dénonciations publiques des derniers mois, pour la simple et bonne raison que si nous ne nous les avons pas vécues, jamais nous ne pourrons comprendre ce que c’est. Qu’elles décident de dénoncer publiquement leur agresseur.e, de le faire à la police ou qu’elles choisissent de garder le silence : tout ça est valide. On passe tellement un temps énorme à focaliser sur cette « étape », au lieu de s’attaquer à la racine de l’acte. Acte qui prend place dans tout un système sexiste et toxique qu’on ne peut plus endurer.

droit femmesSource image : Unsplash

Je crois que c’est ce qu’il faut retenir : les violences et le harcèlement sexuel ne sont que symptomatiques d’un problème tellement plus gros, c’est le « bout du Iceberg ». Je suis une fervente du féminisme au quotidien : je crois que c’est dans les gestes de tous les jours que le sexisme se joue et se cache. Dans le cadre de mon parcours en études féministes, c’est d’ailleurs quelque chose avec quoi j’ai eu de la difficulté : je me sentais « mal » parce que je ne me trouvais pas assez militante, activiste ou même présente sur la scène publique dans la défense des femmes. Peu à peu, grâce à beaucoup de remises en question, j’ai compris qu’il existait autant de féminismes qu’il existe de femmes. C’est ce qui, je trouve, en fait toute la beauté : à chacune son combat.

Je reviens à la colère. On est tannées d’entendre les hommes de notre entourage crier sur tous les toits qu’ils sont des alliés du mouvement #metoo, des alliés des femmes. Quand tu te retrouves avec ton boys club, la prends-tu vraiment, notre défense? Le dis-tu, à ton bon chum, qu’il n’est pas toujours légitime dans sa façon d’approcher ses conquêtes? Après tout, pourquoi remettre en question tes amitiés et tes relations pour ça? C’est ça, qui est fâchant. C’est voir à chaque jour, sous nos yeux, des micro-agressions qui passent dans le beurre et la vie continue. C’est banaliser et minimiser nos expériences, chose qui, en passant, est tout aussi violent. Je parle des hommes, mais on s’entend ici que plusieurs femmes ont elles-mêmes intériorisé des réflexes sexistes de toutes sortes.

Penser qu’on vous traite tous de violeurs, c’est mettre un voile sur les vraies choses. Arrêtez de prendre tout personnel et de faire l’autruche (je généralise, bien sûr). Ce n’est pas seulement quand ça sort dans les médias et sur les réseaux sociaux qu’on doit se poser des questions. C’est tous les jours que ça se passe et c’est partout, le harcèlement. On ne l’oublie jamais : si on réussit à l’oublier, ça ne dure jamais très longtemps. J’ai passé l’étape d’être gênée, quand je me fais siffler dans la rue. Je suis dégoûtée, fâchée, épuisée, tannée d’être déçue. Et j’ai toutes les raisons du monde de l’être. Est-ce que ça va vraiment changer un jour? Combien d’agressions, de procès et de manifestations ça va prendre?

-Lorianne Furoy, bachelière en sociologie concentration féministe

Source image de couverture : Unsplash
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