Parles-en de ta santé mentale. Tu le dis quand t’as le rhume, quand t’as une migraine ou que tu t’es fait une entorse. Tu ne te gênes pas pour dire que t’as un bobo sur la tête, mais quand t’as un bobo dans la tête, tout d’un coup, t’es gêné.e d’en parler.

T’hésites pas à aller voir un médecin pour te faire prescrire un antibiotique, tu consultes un physiothérapeute pour ta douleur à l’épaule ou un dentiste pour la carie qui t’empêche de dormir. Tu vas chercher LE spécialiste pour te soulager d’un état de santé physique chronique ou te guérir d'une maladie grave. Mais t’as peur de voir un professionnel en santé mentale pour soigner ton coeur brisé ou ton cerveau qui ne sait pu comment se gérer. Tu te dis que t’es encore capable d’en prendre quand il s’agit de tes émotions.

Y a toujours de la place pour un p’tit inconfort de plus ou un stress que tu juges banal. Tu balaies du revers de la main l’émotion que tu ressens et tu ravales en t’affichant avec ton plus beau sourire. Tu te dis probablement plein de choses dans ta tête et tu camoufles ton état émotionnel parce que tu as peur du jugement. J’te comprends tu sais. Il y en a des jugements, même en 2020. Il y en a beaucoup même.

Il y a encore ton oncle qui va te dire de pas te stresser avec des niaiseries, ta grand-mère qui va te suggérer de prier ou ton ami qui va te dire que ça va passer si tu n’y penses pas trop. C’est possible que ce soit aidant, mais ça se pourrait très bien que ce ne soit pas suffisant. Y a encore un employeur qui va te trouver paresseux de prendre congé pour reposer ton hamster qui tourne sans arrêt depuis trois nuits. Ça se pourrait aussi que ta collègue te raconte comment elle a vécu ça, elle, et à quel point elle s’en est sortie facilement en allant prendre des marches.

femme assise sur un quai devant un immense lacsource image : Pexels 

On va te dire de te gérer devant tes enfants pour ne pas les exposer à ton anxiété et ta détresse. Il faut cacher tes souffrances psychologiques, mais on acceptera que tu leur dises que tu as mal au dos ce soir pour expliquer que tu n’as pas le goût de jouer. Tu n’as pas le droit de leur dire que tu as mal à l’âme. Tes amis Facebook partagent plein de citations positives du style « choisis ton bonheur chaque matin » ou « les gagnants trouvent des moyens et les perdants trouvent des excuses ». Te te sens incompétent.e de ne pas arriver à avoir une attitude positive. Tu te sens coupable, car tu as l’impression que tout le monde va bien autour de toi. Ils ont tellement de beaux sourires sur les réseaux sociaux.

Tu vois des cas flamboyants de problèmes de santé mentale dans les médias. Tu penses que si tu parles de ta santé mentale, les gens vont penser que tu es fou.olle ou déséquilibré.e. Tu as peur de faire peur. Tu as peur d’être classé.e dans cette catégorie pas très gratifiante de «personne instable». Tu as peur qu’on te croit faible. Tu as peur du rejet. 

T’entends tout ça et t’as encore moins le goût d’en parler, d’aller chercher de l’aide. Je ne t’aide pas vraiment parce que je te confirme que c’est vraiment difficile d’en parler et que même si tu en parles, c’est pas certain que ça va être bien reçu. Mais j’ai beau réfléchir à tout ça, je ne vois pas vraiment comment nous allons y arriver autrement qu’en parlant ouvertement de tout ça. Parce que si toi tu en parles sans honte, si toi tu oses briser les tabous, peut-être que ça va faire du bien à ta soeur, ton voisin ou ton ami d’enfance de voir qu’il ou elle n’est pas seul dans cette situation-là. Alors nomme, partage et contribue toi aussi à briser les mythes et préjugés.

source image de couverture : Unsplash.
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