Je me suis faite larguer en pleine pandémie, c'est difficile, sans goût et impossible à imaginer.

Je suis une expatriée arrivée au début de la Covid-19. Je ravale mon égo et ma fierté et j’exprime ouvertement ma solitude et ma motivation de nouer des liens. Inscription sur un groupe Facebook, publication de soi, un peu comme une mise à nue. J'attends impatiemment que quelqu'un me réponde, mais j'ai aussi, trop peur de la réponse. Enfin, je vois apparaitre le nom d'une fille avec qui j'ai des amis Facebook en commun et c'est alors le coup de foudre.

Quand on part à l'étranger, seul.e, dans un autre pays où les codes sociaux sont différents, la rencontre avec une personne prend une autre dimension. On pense n'être là que temporairement, on ne sait pas de quoi demain sera fait. On se dit que notre amitié va devoir s'arrêter contre notre gré, mais jamais la rupture amicale ne vient frapper notre esprit. Alors, on fait confiance rapidement, on se méfie moins et, puisque nous sommes dans une aventure, loin de notre cocon, autant prendre le risque de vivre cette amitié. Le temps passe vite, l'intensité des liens et les points communs nous entrainent dans un joyeux tourbillon où le champ des possibles existe.

On est tellement bien. On s'estime chanceux d'avoir rencontré une perle, un bijou. On donne du temps de soi. Un message, un appel, une présence, un weekend. On s'investit, on transmet son énergie, on ouvre son cœur. C'est si beau, on se sent aimé.e et entouré.e. Le temps parait long avec le confinement, alors on se rapproche et on se serre les coudes. On apprend à se connaître, à partager ensemble les soirées d'hiver, les feux d'été et les couleurs d'automne.

Tu sais, pas un seul instant on ne se doute. Aucune émotion négative ne nous traverse l'esprit. 

femmes amitié plageSource image: Unsplash

Un soir de janvier, après une année de moments magiques, de confidences, de rires, de larmes et de folie, elle m'a dit merci et elle est partie. Il n'y a pas de mot assez fort pour raconter la chute que j'ai vécue. 

Dans un semblant d'explication, un gros silence et une indifférence la plus totale, elle est allée chercher de l'amour ailleurs, là où elle n'avait pas encore tout pris. Je suis restée le regard perplexe, avec mes souvenirs et le cœur en miettes d'avoir cru si fort en une amitié qui n'avait pas signé de « pacte pour l'éternité ».

Il se peut que certaines vies soient planifiées et ordonnées comme du papier à musique. Moi, je pense en revanche que nous ne pouvons pas toujours prédire ni comprendre. Que des questions restent parfois sans réponse. 

Grâce à elle, j'ai compris que la peur du changement et la peur de perdre m'avaient conduit à des amitiés vouées à l'échec.

Aujourd'hui, je suis reconnaissante de cette perte, car, derrière la perte, il y a l'amour. La perte nous rappelle ce qui est précieux et nous ramène à l'instant présent. Si cette blessure d'abandon m'a longtemps tourmentée, elle m'a aussi permis de comprendre que nous attirons ce que nous croyons inconsciemment et que de se sacrifier pour autrui n'en vaut jamais la peine. 

parc banc seul

Source image de couverture: Unsplash
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