Je suis sur la plus haute des montagnes de neige.

L’Himalaya, peut-être. J’ai le vertige.

Aimer, dit-on, c’est aussi prendre le risque de se retrouver seule, une fois de plus. Le risque de revivre une déception qui nous amène à tout recommencer, vertigineusement. Je n’ai jamais cessé d’aimer, malgré cela.

Je suis experte des petits contes occidentaux tristes. Je sais que ma peine est un luxe, mais ton absence se fait glacialement sentir dans l’écho des rochers, spécialement à ce moment précis. Je ne suis qu’une âme voltigeant, un condor. Et pourtant, il n’y a pas de condors sur l’Himalaya. Il n’y a pas, non plus, d’âmes se sentant aussi seules que moi ce soir.

Ou peut-être que si.

Ces enfants orphelins à l’autre bout du monde. Ceux vers qui je tendrai les bras, bientôt. Est-ce que la solitude de deux cœurs s’annule? Est-ce que l’on se soigne en guérissant l’autre de notre propre blessure. Celle du vide. Du fond qui n’en finit plus. Du foyer continuellement brûlé. Ils savent que je suis triste, je crois. Ceux tout en bas savent beaucoup de choses. Ils me regardent en serrant leurs enfants forts contre leur cœur. Il faut être en haut pour comprendre la chance d’être en bas.

Ta présence n’était pas douce.

Tu as souillé ma douceur et mon espoir d’être au village, moi aussi. De m’y installer. Je suis sur la montagne la plus haute de neige. L’Himalaya, peut-être. Et l’amour m’a déçue. Si peu de temps. J’ai si peu de temps pour m’apaiser. Que fait-on lorsqu’on a 35 ans, que notre ventre n’a jamais porté la vie et notre cœur n’a jamais trouvé repos? Me faut-il absolument un homme pour me sentir à la maison? Je me le demande.

Source de l'image : Éloïse Denis

Alors, je fais quoi?

Je suis lasse d’attendre quelqu’un pour fonder une famille selon mes aspirations profondes, qui sont peu communes. Lasse d’être dépendante des hommes pour trouver refuge, famille et sentiment d’appartenance. Je vais essayer d’apprivoiser cette solitude, ce vertige et cette envie d’être aimée.

Je t’aimais. Tu m’as blessée.

Je t’aimais. Tu m’as menti.

Je t’aimais.

Je suis sur la montagne la plus haute de neige. L’Himalaya, peut-être. Et je pense que j’y ai toujours vécu. Mon foyer avec toi et les autres n’a toujours été qu’une simple illusion. Illusion d’amour. Illusion de respect. Illusion d’avenir. Illusion de maison.

Grand respire. L’illusion ou le vertige?

Je choisis l’amour de mon âme. Il est illogique de pleurer pour des illusions. Je choisis donc de dompter ce cri au fond de moi. Il me réclame une place où se reposer. Peut-on se reposer à l’intérieur de son propre cœur ?

Je suis sur la plus haute montagne de neige. J’habite l’Himalaya. Et un jour, je regarderai le village d’en bas sans le moindre vertige. Du moins, je l’espère.

Source de l'image de couverture : Unsplash
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