Aujourd'hui, Julia, mannequin international vivant à Montréal, publie un texte percutant qui dénonce son expérience vécue lors d'une rencontre avec une agence à Paris. Contrat signé, elle s'est envolée pour la ville lumière afin de rencontrer l'équipe et de faire quelques photos. Je vous laisse lire par vous-même son texte à la fin de cet article ou ici sur sa page Facebook. Étant très important pour nous, au blogue Le Cahier,  de promouvoir la diversité corporelle ainsi que sa représentation, j'ai posé quelques questions à Julia.

A: Selon toi, est-ce la même réalité à Montréal qu'à Paris? Parle-nous de tes expériences en Amérique du Nord. 

J : Pour le poste de mannequin, Paris était ma première fois en Europe. Je n'ai aucune autre expérience, ni bonne ni mauvaise, de la sorte donc je n'ai pas de référence autre. Ça fait 2 ans maintenant que je suis mannequin de profession en Amérique du Nord et je peux témoigner du fait que les États-Unis sont le pays le plus avancé en diversité corporelle. L'agence pour laquelle je travaille à NYC m’a prise pour ce que je suis, même chose à Montréal. Même en Belgique, l'agence avec laquelle je travaille a la même mentalité que celles en Amérique. Donc, je peux affirmer que ce genre de pratique ne peut pas être généralisé à l'Europe. Par contre, je crois qu'on peut dire que la France en général soit plus conservatrice que le reste du monde. Le fait que cette expérience fut ma seule négative relève peut-être de la chance ou peut-être que la majorité des agences sont bienveillantes? Chose certaine, c'est qu'il ne faut pas généraliser, mais qu'à Montréal, l'ouverture d'esprit est très présente.

Le texte que j'ai rédigé se veut une dénonciation d'un problème globale. Pour ma part, j'ai eu la chance de  tomber sur une bonne agence qui se veut un lieu d’écoute et d’acceptation de soi. Mon agente n'a jamais sorti le mètre pour mesurer mes cuisses. Le monde de la mode peut être aussi très beau. Il n'y a pas que des personnes mal intentionnées.

A: Avec ton expérience ainsi que ta maturité, comment as-tu réagi face à leurs commentaires?

J : Sur le coup, j'étais tétanisée, je ne pouvais plus bouger. Pas par peur, mais par surprise. Il faut comprendre que c'était déjà acquis. J'avais un contrat signé, donc cette situation était d'autant plus déstabilisante! Je fus surprise par leur accueil. Les propos auraient pu être moins violents que j’aurais été aussi choquée. Par chance, je suis une personne forte qui ne se laisse pas marcher sur les pieds. Les propos étaient tellement absurdes qu'ils ne pouvaient pas réellement m’atteindre profondément. Me dire que je suis obèse alors que je fais une taille 6-8, c’est tellement absurde que ça n’a pas pu m’affecter plus que ça. Ils voulaient me piéger, puisque j'étais loin de ma maison et je ne pouvais pas me défendre. J'avais deux options : accepter ces propos et me faire manipuler OU partir. Donc,  cette agence avait 1 chance sur 2 de pouvoir me contrôler et me convaincre de maigrir l'équivalent de 4 tailles (ce qui est loin d'être santé pour ma grandeur).

A: As-tu des conseils que tu voudrais partager aux jeunes filles qui se retrouvent face à ce genre de dilemme, soit de devoir perdre beaucoup (de manière démesurée) de poids ou même seulement quelques livres?

J : Je n'ai peut-être pas assez de recul pour répondre. Malgré tout le mal que ça peut nous faire, il faut prendre du recul et ne pas prendre ça personnel. Il faut se dire que les personnes mal intentionnées comme celles-ci n’ont aucun pouvoir ni sur toi, ni sur ton corps et ne devraient pas en avoir! C'est très important de se le rappeler!

A : Je te cite : « Conseiller à quelqu'un de perdre du poids jusqu’à en être malade va à l’encontre de ce que doit être une agence, soit un lieu bienveillant d’écoute et de conseils ». Est-ce que tu crois que c’est la réalité? Dans quelle mesure est-ce respecté ou non?

J : À vrai dire, je crois que comme Scoop est une agence à échelle humaine, on ressent une plus grande proximité avec nos patrons et ceux-ci possèdent un discours similaire au mien. Selon moi, ce n’est pas un endroit où l’on ressent une forte pression, mais plutôt un lieu où règne une atmosphère familiale. En ce qui me concerne, j’ai eu la chance d’avoir ce même genre d’expérience tant à New York qu’en Belgique. En fait, je crois que je tiens à être reconnue, oui pour mon physique, mais aussi pour mon intelligence, pour ma personne. Je ne veux pas faire partie d’une agence qui ne veut qu'exploiter mon visage durant deux ans et après, c’est terminé. Ce que je ne cesse de répéter, c’est que « tu n’es pas ton agence et ton agence n’est pas toi ». La taille de l’agence ne change pas rien à ta personne, c’est difficile de comparer les agences entre elles. Bref, je crois que la généralisation ne serait pas nécessairement le reflet de la réalité. 

A : Tu mentionnes que « Pour que le marché change, il faut que des gens se mouillent». Selon toi, quel geste le consommateur/ médias peut faire au quotidien pour que ça change?

J : La première étape serait d’arrêter de faire des simple size en 32 ou simplement en faire des plus grandes. Sinon, je crois que les gens doivent en parler et qu’ils doivent dire qu’ils en ont marre. Je crois que les femmes aimeraient pouvoir plus s'identifier aux mannequins que l'on voit quotidiennement sur les affiches et sur internet. Je souhaite que les jeunes filles qui ont vécu des situations similaires sachent qu'elles ne sont pas seules.

Pour mettre un visage sur les paroles de Julia, c'est ici!

Source image de couverture : @julesandthecity

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