Je me suis écrite une lettre.

À moi de moi, d’aujourd’hui à hier.

Pour bien mettre en contexte, je suis l’heureuse co-propriétaire d’un salon de coiffure. Le têtu à Trois-Rivières. Bientôt trois ans que nous avons fait le switch! Honnêtement, les enjeux sont bien différents de ce à quoi je m’attendais. Tout ce que je voyais facile ne l’a pas nécessairement été et le contraire m’a surprise! Moi qui a une sainte horreur d’être assise à un bureau, il y a une partie administrative que j’aime bien, un certain contrôle. 

Travailler dans une PME, c’est aussi de travailler avec l’humain, de près, très près. Tellement près que tu crées une certaine amitié, une confiance, ce qui est tout à fait normal puisque tu les vois plus que ton amoureux! Ça devient une petite famille, là où la ligne se fait mince, c’est quand il y a ces fameuses demandes: «  Est-ce que je pourrais avoir samedi de congé? » « Est-ce que je peux finir plus tôt? » 

C’est exactement là que les rôles doivent être bien joués.

C’est aussi là que j’ai compris.

Ce ne sera pas facile. 

salon de coiffurer chaises videsS0urce image: Unsplash

Chère Audrey, 

T'as quoi, 20 ans? Tu as cette envie et cette énergie de tout. Tu te sens invincible! C’est beau de voir ça. Ton travail, tu le prends à coeur. Bon, tu as quelques lacunes....Tu rentres maganée de la veille (pas trop souvent quand même) et bravo, ça ne paraît pas devant les clients. Tu es compétitive, tu veux monter plus vite que les autres. C’est ce qui fait qu’aujourd’hui, tu es où tu te projetais!

Ton univers tournait autour des garçons, les amis, la fiesta! Mon dieu qu’un monde s’écroule vite pour une amourette d’été.

Des petites colères te faisaient croire qu’il y avait de l’injustice, mais, au fond, ta petite rancoeur de ce temps comprend mieux aujourd’hui. Aller au bal de ton frère un mercredi après-midi, c’était une raison valable à ce moment... Est-ce que le chirurgien remettrait tous ses patients pour aller voir son petit frère graduer? 

Toutes ces fois où tu entrais travailler en surplus le lundi (ce qui gâchait ton congé de deux jours collés) parce qu’une de tes collègues était malade, tu faisais la gueule, mais tu savais que ce serait payant et que ta boss serait reconnaissante. Tu sais,  maintenant que c’est à toi, tu vois tous les sacrifices qui ont été faits avant toi. Ton petit lundi, c’est arrivé quoi? Trois ou quatre fois dans l’année? Alors qu’elle, ta patronne, à tous les jours, elle entrait travailler et elle restait plus tard que prévu combien de fois, tu crois, dans son année? À quel point elle se cassait la tête quand une était malade... parce que faut l’avouer, une de moins, ça tourne carré! 

Si tu prends le temps de calculer, un sur cinq, c’est 20% de ton équipe qui manque. Toute cette charge de travail qui est donnée aux autres Avoir la broue dans le toupet, ça ne plait à personne. Par contre, c’est là que le mot « équipe » est à son plein potentiel! 

À cette époque, tu travaillais pour ta poche. Tu as vite compris que payée à la commission, plus tu en faisais, mieux c’était! Des coupes de cheveux entre deux clients, ça ne te faisait pas peur. Il y a des fois que sans te le demander, on t’en mettait, tu savais que tu allais être dans le jus et tu rageais, mais pourtant, chaque fois, tu t’en sortais. 

Aujourd’hui, ce n’est plus ton portefeuille, tu travailles pour celui de la compagnie, le tien et celui de tes employés, parce que c’est grâce à cet argent qu’ils ont une paye, une stabilité. 

Te souviens-tu du nombre de fois que tu voulais innover, faire avancer par internet? Pourtant, l’ancienne proprio n’était pas à l'aise dans ce projet, elle ne s’y connaissait pas vraiment et n’avait pas le temps de s’en occuper... J’écris ces lignes et j’ai un grand sourire parce que dans le moment présent, je vois les mêmes enjeux, mais à différents degrés. Internet est réellement un allié pour nous, nous avons les connaissances et je prends effectivement beaucoup de mon temps en dehors du travail pour ce côté de l’entreprise. Quand une fille nous apporte de nouvelles idées, qui oui sont souvent très bonnes, j’avoue que de savoir le temps, l’énergie et le financement que ça prend... c’est moi qui finis par ralentir la cadence! Voilà, maintenant je comprends son « on regardera ça plus tard! »

Alors, merci d’avoir autant donné pour une entreprise qui n’était pas à toi. C’est grâce à des 20% qu’on obtient des réussites!

salon de coiffure coiffeuse ciseauxS0urce image: Unsplash

Merci à mes 20% d’aujourd’hui, chacune d’elles sont importantes. Chacune d’elles valent leur pesant d’or et si on me l’avait dit comme ça, j’aurais peut-être compris plus vite. À chacun sa réalité, travaillons en équipe et aidons-nous à bâtir de grandes choses!

Source image de couverture: Pixabay
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