Écœuré d’entendre parler de la vague de dénonciations dans le milieu culturel? Eh bien, change d’article, car c’est exactement de ça dont je veux te parler aujourd’hui. Quel nouvel angle est-ce que je t’apporte me demandes-tu? J’y étais. Je l’ai vécu. J’en suis un témoin de première ligne. Je suis comédienne et moi aussi j’ai vécu des abus.

Les noms sortent et la vérité, c’est que j’en connaissais déjà plusieurs qui ont eu des comportements inappropriés. Tu tombes de ta chaise quand des noms connus sont exposés au grand jour? Flash info : plusieurs d’entre nous le savaient déjà. Quand la personne a beaucoup d’influence, on ne dit rien, car on a peur de ne plus pouvoir travailler. On a peur que cette personne se venge.

secret femme dénonciationSource image: Unsplash

Des collègues m’ont raconté leurs histoires et tu ne veux même pas savoir tout ce que je sais depuis plusieurs années. Certains agresseurs sont haut placés dans la hiérarchie de la télé, du cinéma et du théâtre. Ce qui signifie qu’on se ferme la trappe, nous les comédiennes, car on a peur de ne plus avoir de travail.

D’autres sont des collègues avec qui on auditionne, qu’on croise parfois sur les plateaux de tournage. Encore là, on ne dit rien, car c’est notre parole contre la leur. C’est aussi l’anxiété d’entamer une poursuite, de ne pas être cru, et de vivre avec la peur au ventre de recroiser notre agresseur, qui s’en sort indemne, sur un prochain plateau.

Dans les écoles de théâtre, les noms de professeurs font écho. On y dénonce leur abus de pouvoir, la violence psychologique et verbale, le harcèlement sexuel. Je vous le dis : ce n’est que la pointe de l’iceberg. Des étudiants ont lâché l’école à cause de ces agressions. Le milieu DOIT changer. La direction des écoles doit changer sa politique, car les solutions ne sont pas optimales.

Je suis d’avis que la vague de dénonciations sur les réseaux sociaux est maladroite, car comment bien protéger les victimes dans tout ça? SAUF QUE, le silence généré depuis trop longtemps a indubitablement créé une implosion. Faire taire les gens n’est jamais une solution, car leurs cris deviennent plus forts.

(Agresseurs, #sorrynotsorry. Vous avez fait une «erreur» et vous voilà pris au dépourvu? Imaginez les dommages psychologiques et physiques sur la personne que vous avez agressée. Vivez avec les conséquences de vos actes.)

pomme pourrie métaphore mauvais comportementSource image: Unsplash

J’éprouve peu de pitié pour les agresseurs qui ont eu des comportements inappropriés (As-tu entendu parler de l’expression «graîner un verre»? C’est lorsqu’un homme met son pénis dans le verre d’une personne sans son consentement). Beaucoup considèrent ce genre de comportements comme «idiot» ou «une blague poche». Mais pour nous, les femmes qui disons depuis des années et des années que le harcèlement existe, qui n’obtenons pas justice, qui devons recroiser nos agresseurs après les faits, ce n’est pas juste «une blague poche». C’est la preuve que notre société a un problème dans l’éducation de nos garçons qui pensent que de siffler une fille dans la rue, c’est un compliment.

Je ne mentirais pas en disant que j’ai hésité à écrire cet article même si je ne nommais pas de noms ou que je ne témoignais pas de ma propre expérience personnelle. C’est un petit milieu (en difficulté plus que jamais à cause de la COVID). Moi aussi je veux continuer de travailler.

Mais chaque voix qui s’élève compte et j’écris cet article avec amour pour toutes les personnes ayant vécu une agression, quelque soit son genre. Et je n’oublie pas tous les hommes magnifiques qui nous entourent qui sont des exemples précieux d’amis et de collègues qui entendent nos appels et qui nous aident à traverser tout cela.

À eux, je leur dis merci.

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