Cette semaine, je suis dans un bar avec mes amies et je reçois un message texte d’un de mes amis de gars. Je souris naïvement parce qu’il est con (un gentil con). Je relève la tête pour voir cinq pairs de yeux rivées sur moi avec l’air de vouloir me dire : «Veux-tu bien m’expliquer c’est quoi ce sourire en coin post-lecture de texto mixte malsain? ».
Sur le coup, je ne comprends pas trop pourquoi mes filles capotent comme ça. Soudainement, notre conversation de voyage et de tapas se transforme en débat sur les relations d’amitié mixte. « Moi j’ai arrêté d’être sympathique avec les gars depuis que je suis en couple, parce que je sais que ça les attirent malgré moi », « Moi j’ai jamais même eu l’intention d’être juste amis avec un gars, je veux toujours plus ».
Là je me sens les genoux mous, je me dis que ça ne se peut pas. Voyons, est-ce que c’est universellement weird et personne me l’a jamais dit?  Dois-je appeler tout mon monde, un à un, pour leur dire de pas se faire d’idée? Maudit f**k.

Après quelques minutes et un changement de sujet tant espéré, je me ressaisis et me rappelle que tout est correct. J’ai jamais eu peur de tomber amoureuse d’une de mes chums de filles. En aucun cas, je me suis demandée si l’une d’entre elles avait un œil sur moi. Pourquoi ça serait différent avec un homme? On est en 2018, il me semble que c’est révolu le temps où les hommes devaient être amis qu’avec des hommes et parler d’outils et de bagnoles? Il me semble qu’on aspire à plus qu’à se retrouver entre filles pour parler de couture et d’enfants. Des fois, ça fait du bien d’écouter mes amis parler de leur vie de gars. J’en aurai jamais moi, de vie de gars.

Les amitiés mixtes, c’est tellement rafraichissant. Pour moi, c’est une échappatoire extraordinaire. Avec la majorité de mes amies de fille, je peux atteindre un niveau d’intimité et de compréhension mutuelle que je n’atteindrai peut-être jamais avec mes amis de gars. Mais à l’inverse, avec mes amis du genre opposé, je partage une relation basée sur l’humour et la candeur, comme si j’avais six ans et que je voulais juste jouer sans me poser de question.

Quand on avait six ans, on s’en balançait bien de ce qui se cachait ou pas entre les cuisses de nos amis. On voulait juste jouer avec ceux qui étaient gentils avec nous. Mes amitiés mixtes me ramènent à ce temps-là.

Moi, il me manque ce temps-là.

Je l’accorde aux sceptiques, il faut quand même être sur la même longueur d’onde que ses amis. Il faut s’assurer que la direction que prend votre relation est la même dans l’esprit des deux partis. Vous allez peut-être rencontrer des petits moments où des mises au clair s’imposent. Reste que ça se sent ces trucs-là. Ça se sait intuitivement. Quand on est ami avec quelqu’un (et je ne parle pas de deux connaissances qui se rapprochent), quand on connait réellement quelqu’un, on sait reconnaitre le statut de sa relation. L’amitié peut parfois poser des ambigüités, mais avec un peu de discernement, on peut réellement développer des liens platoniques extraordinaires. Parfois, on dépose les armes de la séduction pour une question de timing, de manque d’attirance, d’éthique professionnelle ou personnelle, ou pour n’importe qu’elle bonne raison d’opter pour une amitié, et cet abandon inconscient laisse place à une recette relationnelle qui, pour moi, est absolument gagnante.

T’sais, mes parents ne m’ont peut-être pas donné de frère, mais la vie a été plus généreuse qu’eux. J’ai trouvé des gens avec qui je peux avoir une grande complicité, avec qui je peux parler sans complexe, ni appréhension, des gens avec qui je peux être moi-même. 
 
Je ne vais certainement pas laisser cinq paires d’yeux me faire la morale et essayer de me détourner de ces petits bonheurs là.
Profitez-donc de vos amitiés et aimez-vous au-delà des genres.
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