Il y a à peu près deux mois, j’ai publié un article sur la réalité d’être un enfant adopté et sur tous les tabous et non-dits qui pouvaient être reliés à l’adoption. Suite à la parution de cet article, plusieurs choses sont arrivées. J’ai reçu plusieurs messages de jeunes filles, de jeunes hommes et même de parents adoptants qui se reconnaissaient à travers mon histoire et qui souhaitaient en parler. J’ai aussi reçu quelques messages d’autres gens qui tout comme moi avaient été adoptés, mais qui ne s’identifiaient pas vraiment à ce que j’avais vécu. J’ai aussi lu leurs messages avec beaucoup de respect. Suite à la parution de l’article, mes proches ont tous vraiment été touchés. Mes parents, mes grands-parents et mes meilleures amies m’ont même avoué avoir pleuré. Moi, quand je l’ai écrit cet article, j’ai aussi pleuré. Depuis la parution de cet article, plusieurs choses sont arrivées. Parmi les évènements les plus importants : mon retour en Chine et la visite de ma ville de naissance pour la toute première fois. Pour boucler la boucle de cette folle, belle et grande aventure, voici le récit de mon voyage, à l’autre bout du monde, en tant qu’enfant adopté.

Partir à l’autre bout du monde pour mieux se retrouver

C’est le 6 janvier dernier que j’ai acheté mon billet d’avion pour aller visiter la Chine. Pour moi, c’était une façon de bien commencer l’année, de me féliciter d’avoir terminé mes études universitaires et surtout, d’aller trouver des réponses à mes nombreuses questions. À 23 ans, après une année vraiment à c****, il était grand temps de prendre mon courage à deux mains et de partir pour le plus grand voyage de ma vie. Un mois plus tard à 22h00 pile, j’ai atterri à Shanghai. Seule, comme une grande et surtout, à l’autre bout du monde. Au fond de moi, un sentiment de fierté vraiment indescriptible a immergé. C’était aussi la première fois que je me sentais aussi bien depuis vraiment très longtemps.

Le jour J

Le 15 février au matin, j'ai finalement pris le cap pour la ville où je suis née. Je vais être franche avec vous et je vais vous avouer que mon retour à Changzhou a été difficile, genre vraiment difficile. Je vais vous dire que mon premier réflexe fut de booker un billet de train de retour pour Shanghai et d'appeler la réception de l'hôtel pour essayer d'annuler ma réservation. Malheureusement ou heurement pour moi, je n'ai pas réussi. Je vais être franche avec vous et je vais vous dire que j'ai choké. Que pendant plus d'une journée et demi, eh bien j'ai pleuré, j'ai fixé les murs de ma chambre d'hôtel et j'ai attendu que le temps passe. En me cachant dans cet hôtel, je croyais que rien ne pouvait m'arriver. Quelques heures avant de quitter Changzhou, je suis finalement allée voir mon orphelinat. J'ai marché pendant des heures dans la ville en m'imaginant ce que ma vie aurait pu être et honnêtement, je n'ai pas aimé. En retournant dans ma ville de naissance j'ai répondu à plusieurs questions concernant mon adoption, mais j'en ai surtout eu assez. Pour l'instant, j'ai clos ce chapitre de ma vie, mais qui sait? ? Ce sera peut-être pour la prochaine fois.

Ce que mes parents ont dit

Au début, mes parents ne m’ont pas vraiment dit qu’ils étaient contents pour moi. Ils m’ont simplement dit d’être prudente et qu’ils voulaient que je les appelle tous les jours. Ça m’avait un peu déçue, mais je comprenais aussi. Je crois qu’ils avaient peur de me perdre et ils avaient le droit. Cependant, quand j’étais à Changzhou, dans ma ville de naissance, j’ai réalisé que j’aurais vraiment aimé les avoir à mes côtés et ça a surtout confirmé que mes parents, ce sont mes vrais parents. Parmi plus de 1,3 milliards d’habitants, c’était la première fois que je me sentais aussi seule. Je les ai appelés et puis j’ai pleuré. J’ai pleuré pendant des heures et ils sont restés au bout du fil aussi longtemps que j’en avais besoin. À mon retour, mon père m’a dit pour la première fois qu’il était content pour moi. Ça m’a vraiment rassurée et surtout fait beaucoup de bien.

Parce que l’on ne sait jamais ce que l’avenir nous réserve

(Note: L'article a été écrit avant son départ)

Le 5 avril 2016 prochain, je suis partie vivre à Shanghai pour un an. Je ne suis définitivement pas tombée en amour avec Changzhou mais avec Shanghai oui, assurément. En écrivant ces dernières lignes, je me rends compte que bientôt, je tournerais la page sur vingt-trois ans de ma vie. Ma vie à Montréal qui ne me plaisait plus totalement mais que j'ai quand même aimée pendant longtemps. Hier, j'ai vu ma mère pour la dernière fois avant de quitter pour la Chine. Elle m'a fait promettre de revenir un jour et de ne pas rester là-bas pour trop longtemps. Maman, je vais terminer en te disant ceci : je ne sais pas quand je reviendrai, mais je peux t'assurer que je le ferai. Ce sera peut-être dans un an, dans deux, dans cinq ans ou simplement pour des vacances, j'en ai encore aucune idée. Ce que je sais, c'est qu'ici ou à l'autre bout du monde, c'est toi ma mère, ma vraie. Et ça, ça ne changera jamais.

Crédits photo de couverture: pixabay.com

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