Écrire me fait du bien. Ça m’aide à mieux me sentir. Les mots, c’est parfait. Alignés un après les autres pour former une phrase, des phrases. Mais des fois, ce ne l’est pas du tout. Ça donne mal à la tête. Ils sortent de ma tête en désordre et des fois en retard. Ça, c’est souvent. Je n’ai pas été assez vite pour te dire que je me suis trompée. J’ai si mal. Ma tête est lourde. Je divague dans mes pensées pendant que le prof explique le contenu du cours. C’est la semaine de la rentrée.

Pourtant, je devrais être si excitée, moi qui aime tellement l’école, mais je suis ailleurs. Mon esprit est ailleurs. Je me remémore mes souvenirs tout doux de cet été. Et de toi. Un frisson me parcourt le corps. Je suis triste maintenant. Le cours se termine à l’heure prévue. J’ai mal à la tête. Je ramasse mes cahiers pour les déposer aléatoirement dans mon sac. Dans l’une de mes petites robes soleil, je déambule dans les corridors entre ces corps automates qui cherchent leurs prochains locaux affichés sur leurs horaires. L’air est lourd. Je dois respirer. J’étouffe parfois. Je manque d’air. Il faut que je me calme. Une fois calmée, je me replonge doucement dans ces souvenirs doux de cet été telle une addiction.

 Là à me regarder. On m’a déjà dit qu’en sept secondes on pouvait saisir quelqu’un. J’ai saisi en moins de sept secondes l’effet que tu me faisais. Mes mains étaient moites, l’esprit atteint et mon corps tremblant. Il y avait longtemps que je ne m’étais pas sentie ainsi. Le bon mot : vivante. Oui! Vivante est le bon mot. Je me sentais plus femme, confiante, et je n’ai pas eue peur d’être moi-même pour une fois. J’ai perdu mes mots. Je ne les trouvais pas en ta présence...

Je n’avais que bu un verre de jus d’orange et un petit fromage en guise de diner. Je savais trop bien que je le connaissais. C’est une intuition que j’avais, voilà tout! Je ne le connaissais pas <<déjà>>simplement que j’avais l’impression qu’il veillait sur moi depuis toujours. 

Je vis tout intensément. Tout est fois mille dans ma tête. Je suis comme ça, je ne le fais pas exprès, bien sûr que non et je te le jure. Quand j’ai de la peine, j’ai vraiment de la peine, durant des secondes, des heures et aussi durant des jours. Quand je suis heureuse, j’ai si mal aux joues tellement j’ai un sourire gros comme la terre. Tu étais là. 

Durant la journée avant notre premier rendez-vous, je n’avais que bu un verre de jus d’orange et un petit fromage en guise de diner. Ce qui me troubla le plus en le voyant ce soir-là, c’est lui-même. Lui-même dans ce qu’il était sans même avoir parlé encore. Coup de foudre. Voilà le bon mot. Notre rendez-vous avait été fixé à 17 h 30. Les personnes qui me font sentir bien sur-le-champ, c’est rare. C’est comme si j’étais en voyage avec lui. J’étais bien avec lui. Pas de mélodrames et pas de tristes choses simplement moi comme je suis et le moment présent avec lui. J’étais calme, mais excitée à la fois. J’étais moi et juste moi, sans artifices et cela était délicieux. Je n’avais rien à perdre. Je suis revenue en pleurant dans mon auto. Trop bien. Trop bien d’avoir été moi-même pour une fois. D’avoir été moi-même pour moi. C’est si bon. Je suis là en voyage avec lui. 

Deuxième rendez-vous. J’étais encore là, moi-même. Temps de canicule, mes cheveux étaient implacables. Je me souviens de chaque seconde, minute et heure de cette soirée. Il y a eu ce baiser. Ce baiser où l’on en tremble. Si bien que j’ai vécu une décharge électrique. Là à me regarder... me faire prendre la main pour la première fois et c’est toi qui l’as eu cette première. Ce doux baiser sur mes lèvres, cela était si nouveau et bon. Gouter à cette nouveauté, oui, ç’a été parfait. J’ai aimé sentir le vent dans ma robe sous tes yeux. J’ai aimé chaque sens. C’est comme si je me sentais vivante. En fait, ce n’est pas comme si, je suis vivante à nouveau. Je ne trouve même plus les mots. Ç’a été comme le vent : doux, enveloppant et léger. Ne pas comprendre l’effet que tu me faisais avec toi a été merveilleux.

Troisième rendez-vous. J’ai décidé de lui proposer un pique-nique. Ce que nous avons fait. J’avais tout préparé. J’étais beaucoup trop bien. Tout a été parfait. À la suite de notre souper, nous avons été nous allongés un petit peu sur la couverture de la sieste. Et j’ai appris son visage. Pour moi, apprendre le visage de quelqu’un c’est un geste très intime. Je ne pouvais faire autrement, sans savoir la suite, sans savoir ce qui se passerait après le test des trois rendez-vous, mon test des trois rendez-vous (pour savoir s’il y avait matière à continuer de nous fréquenter)... Je le connais maintenant, son visage. J’avais envie de prendre le temps pour lui. Comme je prends le temps pour tout ce qui m’arrive. J’ai appris son souffle, comment sa respiration est calme, comment il sourit lorsqu’il a les yeux fermés, comme s’il était désarmé. Là juste-là. Simple comme dans bonjour. 

Puis, silence. Un douloureux silence au creux de mes oreilles et de mon âme si fragile. Il avait passé mon test des trois rendez-vous. Je lui ai dit. Mais il ne savait pas ce qu’il voulait. Ce n’était pas moi le problème, non. Il me l’a dit et sa parole est vérité, oui. J’ai pleuré, longtemps. Peut-être une heure? Peut-être deux jours? Je ne le sais plus. Mais, il est encore là. Encore là dans mon petit cœur. J’en tremblais, ça je me souviens. Aujourd’hui, le temps s’installe de plus en plus dans mes souvenirs. Doucement et tristement, tu deviens un souvenir embrouillé par mes larmes de 11 h 11. Et cela m’attriste.

Par moment, je me réveille en sursaut encore, parfois, pour aller consulter nos anciennes conversations et je me souviens alors que c'est moi qui a mis terme à tout ça et je relie cette histoire, étrangère à moi-même en ayant l’espoir d’y voir un coucou de sa part. Je lui en dois beaucoup. Je lui dois le respect dont il a fait preuve envers moi, la façon dont il m’a appris à me regarder dans le miroir et de me trouver jolie comme je suis, la façon de poser ses yeux sur moi, dont il me faisait sentir en voyage, ou j’ai appris à ressentir de nouveau le soleil et le vent sur ma peau, dont il me donnait cette crampe délicieuse au bas de mon ventre... Il ne savait pas ce qu’il voulait à ce moment précis dans sa vie. Je ne lui en veux pas. Je n’ai pas d’affaire à lui en vouloir non plus! Mais il est encore là. Dans ma tête. Je sais qu’il n’est pas loin. J’ai la ferme conviction que je vais le revoir. Je le sais, voilà tout. C’est comme lorsque je l’ai rencontré, je le savais.

Lorsque j’y repense, tu es encore là, dans ma tête. 

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