Dimanche après-midi, sous le soleil cafardeux d’un Montréal nouvellement enneigé, mes pensées se bousculent, s’enflamment, me surprennent et me rendent triste dans ma jeune tête. Oui, je fais partie des milleniaux et je n’en fais surtout pas exception. Je suis consciente que je corresponds probablement à toutes vos opinions pré-faites envers ma génération.

Je travaille pour vivre, je rêve de voyager, je suis constamment branchée sur mes machines intelligentes, j’arrive sur le marché du travail croyant pouvoir tout révolutionner et je cumule les échecs amoureux, parce que pour moi le gazon est toujours plus vert chez le voisin.

Aujourd’hui est une journée de déprime, où je ne peux m’empêcher de penser que ma vie ne mène nulle part, du moins pas où je la voyais quand j’étais certaine de comprendre la complexité de ce monde. Ce moment naïf où j’avais le pouvoir hypothétique de calculer ma vie comme une merveilleuse addition, il fallait bien que les cours de mathématiques servent à quelque chose…

Tu sais, sortir de l’université à 22 ans, avoir mon premier enfant à 24 ans avec un fameux père fictif que j’aurais rencontré en sortant du Cégep et surtout pas avant, même si j’ai souvent cumulé les relations amoureuses. Avoir ma première maison et travailler dans un domaine payant avec de bonnes conditions sans effort surhumain.

Hey bien… Un seul mot: Foutaise!!

mlle cafard, remise en question

Du haut de mes 25 ans, je suis couchée dans un lit d’appoint situé dans l’entrée chez ma sœur qui m’héberge parce que célibataire ayant un emploi de transition pas dans mon domaine. J’écris un texte sur mon bloc note d’IPhone. J’ai le cafard! Le vrai cafard, celui qui met une toile au-dessus de nos yeux et qui nous fait voir la vie à travers un filtre gris nuancé de remords et de négatif.

J’en suis à ce moment où je m’en veux, je me tape sur la tête avec une brique et un fanal parce que dans le fond, je ne me trouve pas assez bien. Pour qui? Sûrement pas pour la dame au manteau rouge qui passe dans la rue et qui ne sait même pas que j’existe. La seule personne qui se sent coupable et qui se juge dans ce dimanche cafard, c’est MOI.

J’ai seulement envie de supprimer mon Facebook et mon Instagram, puisque je ne fais que comparer ma vie à celle de ces filles-là. Ces filles-là de la génération des milléniaux qui sortent avec mes ex et qui les rendent plus heureux; qui ont des enfants; qui sont mariées; qui ont chien/ chat/ poisson rouge/ lapin/ hérisson/ n’importe quel truc cute et vivant que je n’ai pas; qui ont choisi de faire du sport et de vivre sainement; qui ont fait les bons choix pour avancer dans la vie sans faire du surplace et avoir peur de se sentir prisonnières de leur vies.

Ces filles-là, je les envie pis elles me font chier!

Je suis jalouse d’elles, mais pas en même temps. Ça fait longtemps que je sais que je me compare toujours à mieux, jamais à moins. Au fait, le moins je ne le vois même pas, il n’existe pas. Je vois seulement l’idéal, le plus beau, ce qui rentre dans les schèmes de la société comme étant la réussite. Qu’arriverait-il si ces filles-là n’étaient pas plus heureuses que moi? Si ces filles-là regardaient mon Facebook et mon Instagram en enviant ma liberté, cette liberté emplie de solitude et de temps perdu ou j’écris pour me libérer. Parce que moi, j’ai le temps! Je n’ai pas d’enfants à m’occuper, pas de bestioles mignonnes, pas de maison à entretenir, pas de copain qui interfère dans mes choix.

Le seul problème, c’est que je ne sais plus ce que je veux. Mes petits calculs mathématiques bidons que je faisais auparavant sur ma vie ne sont plus réalistes. J’avance à tous les jours n’ayant plus d’objectifs hypothétiques et seule.

Cet été, j’ai appris par la force des choses que je devais remettre en question toutes mes idées préconçues et mes valeurs. L’idéal d’une vie Disney ne m’appartenait peut-être pas. Pour la première fois de ma vie j’ai lâché prise et je me suis dit: « Est-ce que ma vie serait ratée si je mourrais sans conjoint ni enfants »?

Pour certains la réponse est évidente et acquise depuis longtemps, dans mon cas je n’aurais jamais pu penser vivre seule. J’ai décidé de me choisir et d’essayer d’apprendre à être bien avec moi même, juste ÊTRE durant un moment. C’est plein de bonne volonté et d’enthousiasme que je me retrouvais seule pour la première fois, par choix et redéfinissant ma vision de la vie et toutes les idées que j’avais construites du bonheur.

Ce que je ne savais pas, quel gros défi de seulement ÊTRE! Découvrir mes passions, ce qui m’allume, ce qui me donne envie de me lever le matin, de choisir mon milieu de travail, de respecter mes choix et mes feelings, créer de nouveaux objectifs qui comprennent que moi. Ne pas attendre de rencontrer quelqu’un ou d’avoir plus pour ÊTRE heureuse.

Pourquoi cela semble facile chez ces filles-là? Je me rassure en me disant qu’il y a peut-être trop de filtres sur leurs vies… Qu’elles n’ont jamais eu le temps de faire l’exercice de découvrir ce qu’elles veulent vraiment, au détriment d’une société centrée sur l’avoir et l’image Pinterest.

Je suis dans une période de ma vie très égoïste, mon nombril doit être la plus grosse partie de mon corps et celle à qui je donne le plus d’importance. Je désire ÊTRE seule, mais en même temps, la solitude me donne le cafard et m’expose à la vulnérabilité. Cette vulnérabilité qui serait moins voyante à deux et que je pourrais étouffer en m’occupant des autres, pas de moi.

Mon moi est blessé, il pleure, il se sent seul, et ce, même si nous sommes en 2017 ou j’ai accès à l’autre au bout de mes doigts. Cet accès qui me fait mal plus qu’autre chose. Mis à part quand entre deux lignes de ce texte j’essaie de me faire une queue de cheval et que mon élastique se brise entre mes doigts, même lui ne veut pas de moi.

mlle cafard, elastique, remise en question

Alors je n’ai qu’un choix, travailler sur moi et me dire que ce n’est qu’une passe, que lorsque je vais ÊTRE, la vie parfaite (en images) de ces filles-là ne m’atteindra plus dans ma solitude. Ces projections d’un type d’idéal ne me blesseront plus sans le savoir à l’autre bout de mon écran, car je vais ÊTRE assez forte pour ne plus me comparer et ne plus aller regarder leurs murs filtrés. Je désire embrasser ma solitude et mon cafard, ils me rendront plus grande.

Je dois avouer que je viens de trouver mon nouvel objectif qui est d’ÊTRE, merci cafard, tu me fais évoluer.

– [ Mlle Cafards ]

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