En tant que femmes, on apprend très tôt l'idée de la restriction. Il est primordial de ne pas être trop, sans jamais devenir insuffisante. Toujours être « juste assez ». Toujours être convenable, raisonnable, présentable. Toujours adéquate, appropriée, décente. Ça fait beaucoup de façades à entretenir, de traits à repousser, de comportements à éviter. Parce que les femmes ne sont pas de sages images. Elles sont insolentes, garçons manqués, effrontées; elles désobéissent et restent insoumises.

Inventaire de ces belles irrévérencieuses qui chamboulent tout:

ladies néon rouge fond noirSource image: Unsplash

Celle qui prend trop de place : celle qui oublie de se faire petite, fragile. Celle qui remplit l'espace au lieu de le laisser vide, aéré autour d'elle. Celle qui est pleine, entière. Attention à ne pas te mettre sur son passage: elle est capable de te faire sentir petit et faible et de tout ramasser sur son passage.

Celle qui dérange : celle qui parle fort, qui donne son opinion. Celle qui a l'audace de désapprouver, d’argumenter. Celle qui n’a que faire de ne pas brusquer, ne pas choquer, ne pas provoquer. Celle qui dérange est celle qui fait ses propres règles. Prend garde à toi : ses paroles ne sont pas de délicats petits papillons. Ils sont la tempête, ils sont l’orage, ils peuvent t’ébranler en un coup de vent.

Celle d'une grande beauté : elle est dangereuse parce que c’est elle qui dit non, qui choisit, qui tient entre ses mains le pouvoir de te briser le coeur. Celle d'une grande beauté est celle qui assume pleinement qui elle est. Elle se coupera les cheveux courts et portera ce qui lui plaît, peu importe ton opinion. Sois prudent : elle ne porte pas sa beauté comme une honte et bien qu’elle ait l’air d’un ange, elle sort tout droit d'enfer.

La grossière : celle qui sacre, rote, pète et perturbe immanquablement l'idéal féminin. Celle qui ignore tout d'avoir l'air d'une poupée, qui se fout d'être « bien élevée », d'être distinguée, d'avoir l'air « féminine ». Celle qui se fout d’être attirante, qui porte fièrement ses joggings parce qu'ils sont confortables. Elle est indomptable puisqu’elle joue selon les mêmes règles que les hommes.

L'hystérique : l'excessive, celle qui donne tout sans rien attendre en retour, qui se montre vulnérable. Celle qui expose ce qu’elle ressent comme une plaie ouverte. Celle qui ose se fâcher, s'indigner dans un monde où toute forme d’émotion est fuie et évitée comme la peste. Quel sacrilège que l’hystérique explose enfin, qu’elle dépose le fardeau de ses états d’âme sur la société après tant d'années passées à être mépriser pour cause de son statut de femme! Elle te contrariera inévitablement, car elle refuse de rester silencieuse, prisonnière de mutisme et d'impassibilité. Elle refuse de rester de glace dans ce monde où sa place est constamment défendre.

L'agace : la provocante, la séductrice. Celle qui ose porter des jupes courtes, des décolletés plongeants, du rouge à lèvres. Celle qui se met belle pour elle et non comme une promesse de désir. L’agace est pécheresse parce qu'elle titille les hommes. Comment une femme peut-elle avoir l'air de ça et ne pas chercher à coucher avec quelqu'un? Comment peut-elle ne pas s'attendre à se faire siffler dans la rue? Si elle ne courait pas après, pourquoi ce serait-elle mise belle comme ça? La définition de séduction ne correspond pourtant pas à celle du consentement.

La putain : celle ruinée par le toucher des autres, souillée par le nombre de mains qui se sont promenées sur son corps. Celle à qui on apprend à détester sa sexualité, qui devrait se vivre en secret, à l'abri des regards. Celle qui effraie parce qu’elle est libre et affranchie. Elle dérange car la femme apprend très tôt à garder sa virginité aussi précieusement que sa vie. La putain possède une force immense parce qu'elle profite, elle jouit.

La forte : la courageuse, la brave, celle qui n'a peur de rien et qui ne se laisse pas abattre. La forte, c’est celle qui court plus rapidement que tout le monde dans le cours de sport, celle qui doit laisser gagner les garçons pour se faire accepter. Car les filles ne sont jamais les athlètes. C'est important de ne pas être trop musclée, trop sportive; de rester faible pour permettre aux garçons de procurer protection et réassurance. Néanmoins, chaque femme possède une force immense, du fait que le monde entier a été bâti sur notre dos.

L'ambitieuse : celle qui ose avoir de la vision, du pouvoir, qui choisit le travail avant la famille, l’amour. Peu importe si elle est la meilleure qualifiée pour un poste: l'ambitieuse ne devrait jamais monter les échelons. Ce sont les ingénieures, les médecins, les députées. Parce que ces métiers sont jugés plus « masculins » et sont synonymes d’ambition pour une femme qui en entretient la convoitise. Les ambitieuses sont redoutables, car elles ont appris très tôt à travailler deux fois plus fort que les hommes pour se rendre exactement au même endroit qu'eux.

Celles que nous sommes : parce que toutes les femmes sont hystériques, grossières, ambitieuses, dérangeantes, fortes. Nous sommes toutes trop et pas assez, incapables de remplir les critères trop exigeants de l'idéal féminin. Et c'est parfait ainsi.

Source image de couverture: Unsplash
Accueil