Réussite au féminin

Je ne pourrais vous parler de ce look sans parler de souvenirs, parce qu'en voyant cette robe, je me souviens... Je me souviens encore de ma toute première rencontre avec les gars de la marque québécoise Against Nudity. À l'époque, j'animais la diffusion en direct du Festival Mode & Design de Montréal. C'était des soirée de fous. Pendant plus de quatre heures, sans arrêt, j'étais en direct à commenter les défilés et à recevoir des invités en entrevue. Virginie, quant à elle, était avec les caméramans à courir afin de dénicher des personnes à qui parler... une vraie belle folie comme on les adore. Je m'ennuie encore parfois de l'adrénaline de ces soirées, alors que la diffusion en direct sur le web étaient encore un médium peu connu et qu'on savait qu'on faisait quelque chose d'hors du commun, de nouveau et qui deviendrait une norme un jour. On se sentait alors à l'avance sur notre temps. C'est un peu toujours ce après quoi je cours, trouver les nouvelles tendances, autant en mode avec ce blogue qu'en médias ou en marketing web. Je ne cesse de lire, chercher, fouiner et je veux être dans les premières... une espèce de course contre la montre impossible, mais si motivante. Quand j'ai rencontré les gars de Against Nudity, à l'époque, j'ai senti ce même désir, mais chez des personnes bien plus détendues que moi. Ils semblaient adorer lancer leur marque, à leur manière, mais avec moins de pression que ce que je peux bien me mettre. Et ils m'ont motivée, sans le savoir sûrement, à vouloir réussir en lâchant prise... mais est-ce facile en tant que femme?

Parlons de réussite. Je suis une fille de mille projets, des projets que je veux toujours mener à bien le plus rapidement possible, le mieux possible, sans perdre le cap. Je l'écris tout de suite. Je sais, on aimerait tous que le chemin soit le même pour un homme et une femme. Je suis d'accord. J'aimerais sentir que les femmes ont la même place que les hommes dans le monde des affaires. Malheureusement, suis-je la seule à trouver que ce n'est pas le cas, qu'il y a encore des inégalités et que trop souvent elles ne sont pas soulevées, mais plutôt ignorées? Parce qu'en parler fait peur...

Toute petite, j'avais une vision, je sentais que chaque action posée pouvait, à sa façon changer notre petit monde. Et je sentais que les filles autour de moi avaient trop peu souvent ce désir de créer leurs propres projets. En vieillissant, je l'ai senti de plus en plus, et j'ai voulu comprendre... comprendre pourquoi les filles n'ont pas autant ce désir que les garçons. Pourquoi une fille qui réussit est gênée? Pourquoi une fille qui réussit ne le dit pas trop fort? Pourquoi une fille qui réussit se fait dire qu'elle pense comme un gars? J'ai débuté ma carrière d'entrepreneure dans le monde des arts. Un monde qui semble plus naturel pour les filles. Quand j'ai atterri dans le monde du web, je me suis souvent moins fait prendre au sérieux. J'étais jeune, j'étais une fille, j'aimais la mode et je ne trouvais pas important de m'habiller en femme.

Quand j'ai rencontré les gars de Against Nudity, je me souviens encore de leur look décontracté, de leur allure nonchalante. Et ça n'enlève RIEN à leur talent, RIEN à leur vision, RIEN au fait qu'ils sont jeunes, indépendants, fonceurs. À y repenser, je me dis: aurions-nous autant pris des femmes au sérieux? Je pense à des femmes que je connais comme les propriétaires de la Boutique Kitsch, C'Glam, La Penderie et j'en passe. Des femmes fortes, des femmes de vision. Mais je suis certaine que lorsqu'on leur demande combien de fois quelqu'un leur a fait un petit sourire en coin approbateur, comme si leur métier était mignon, elles ne pourraient compter. Comme lorsque je dis que je suis blogueuse. «Ah! Blogueuse...». Oui. Blogueuse. Mais avant tout femme d'affaires. Femme d'affaires de 27 ans.

Il y a peu de temps, j'animais. Et je me suis fait nommer «la petite Camille». Je me suis sentie insultée. Oui, ça peut être mignon, mais je me suis sentie insultée. Insultée du diminutif, que cette personne trouve important d'ajouter un mot avant mon nom! Oserait-on le faire à un homme? Non. Je ne pense pas.

J'aimerais arriver au détachement qu'avaient les gars de Against Nudity lors de l'entrevue il y a quelques années. Ce relâchement qui leur donne une attitude de «je-m'en-foutisme» que je n'ai pas. Encore, quand je vais en rencontre client, je me dis que je suis une fille, que je n'ai pas 30 ans, que mes rides ne me donnent pas encore assez de pouvoir, alors je m'habille pour créer cette zone de respect. Je sais que c'est absurde, qu'on devrait me prendre au sérieux, peu importe ce que je porte. Mais que malheureusement ce n'est pas le cas. Mais je me dis que ça viendra. Qu'on est dans un Québec rempli de femmes inspirantes qui foncent, peu importe leur domaine, entrepreneures ou pas. Et qui créent ce chemin qui fera en sorte qu'on peut espérer que le changement se fasse de plus en plus vite.

Quoi faire? Je pense tout d'abord que les femmes doivent prendre plus de place dans l'espace médiatique relié au monde des affaires. Pour ce faire, il faut non-seulement les mettre en lumière, mais qu'elles le demandent aussi. Il est plus courant de croiser des femmes voulant demeurer dans l'ombre ou étant hyper humble que chez les messieurs... non? De mon côté, je participe à des groupes de femmes entrepreneures de divers milieux, en mode et en web. Je trouve important qu'à la place de se mettre en compétition les unes contre les autres, comme dans tant d'émission "cuculs", on travaille ensemble à faire en sorte de s'aider à monter plus haut. En tendant la main à une, qui sait si un jour elle ne pourra pas aussi nous tirer vers le haut? Le travail d'équipe est toujours payant, que ce ne soit que par le nombre de sourires échangés.

Vous, comment voyez-vous la réussite au féminin?