Dernièrement, mon ami Sébastien m’a confié qu’une intervenante sociale l’avait contacté pour lui annoncer que sa mère biologique voulait le rencontrer… 42 ans plus tard!!!  En fait, mon ami Sébastien, c’est plus un collègue de travail et à part le travail, on n’a plutôt rien en commun.  Il a 42 ans et moi, j’en ai 23. Il est un mordu de pêche alors que j’aime plus ou moins la nature. Par contre, j’aime beaucoup les sushis et écouter des playlists sur Songza. La seule chose qu’on a vraiment en commun, c’est qu’on a tous les deux été adoptés. Et ça, c’est tout un point en commun!  Lui, à Montréal, à l’âge d’un an et moi, en Chine, dans un « petit » village de 700 000 habitants quand j’avais presque deux ans. Immédiatement, j’ai eu les larmes aux yeux et je l’ai pris dans mes bras. Je comprenais ce qu’il vivait parce que moi aussi, un jour, j’aimerais qu’une intervenante sociale chinoise m’appelle pour me dire que ma mère ou mon père souhaite me rencontrer. Ce moment-là m’a fait réaliser qu’être un enfant adopté, peu importe l’origine, c’est une réalité que peu de gens peuvent comprendre. Et que c’est d’autant plus compliqué à expliquer.  Ce moment-là m’a menée à tenter de vulgariser comment on se sent réellement. Voici tout ce que nous, enfants adoptés, on a envie de vous dire, mais qu’on ne vous dira jamais.

« À ce qui paraît ça coûte vraiment cher adopter? »

Celle-là, je l’ai souvent entendu.  Mes parents aussi.  L’autre jour, mon père me racontait qu’à mon arrivée au Québec, quand j’avais deux ans, un vieux monsieur à l’épicerie m’avait pris par les joues et avait dit à mes parents : « Eh qu’elle est cute elle. Ça coûte cher ces enfants-là hein? » .  Comme si de rien n’était, comme si être cute, l’adoption et l’argent avaient une corrélation. À ce moment-là, mon père avait répondu diplomatiquement en expliquant qu’il y avait effectivement des frais pour s’inscrire à une agence d’adoption, que le voyage en Chine non plus n’était pas donné et qu’il y avait des frais administratifs auprès de l’orphelinat. Ce qu’il n’avait pas dit, c’est que ma mère et lui voulaient des enfants depuis longtemps, mais que ma mère, pour des raisons de santé, ne pouvait pas en avoir. Il ne lui avait pas dit que ça faisait plus de deux ans qu’ils attendaient impatiemment pour aller me chercher, mais que la Chine fermait constamment ses frontières pour l’adoption et que ma chambre de bébé, elle, était prête depuis encore plus longtemps. Et pourtant, il aurait dû.

« Mais là…tes vrais parents. Tsé, ceux en Chine » 

Moi, mes vrais parents, ce sont ceux qui m’aiment et qui m’aiment depuis toujours et ce, avant même de m’avoir connue. Depuis le premier jour où ils ont amorcé les démarches pour m’adopter et depuis la première fois où ils ont reçu ma première photo. Moi, mes vrais parents, ce sont ceux qui se sont occupés de moi, ceux qui m’ont amenée à la garderie, au primaire, au secondaire puis même au cégep. Même si ça ne faisait pas toujours mon affaire et que je ne trouvais pas ça cool. Mes vrais parents, ce sont ceux qui m’écoutent, me réconfortent, me conseillent, me chicanent et me déçoivent aussi parfois.  Mes vrais parents, ce sont ceux qui m’aiment inconditionnellement et que j’aime inconditionnellement aussi.

« Ce que l'on veut dire à nos parents »

Ce que l'on veut dire à nos parents, nos vrais, c’est que même si un jour l’envie de retrouver nos parents biologiques nous vient à la tête, on ne les oublie pas et surtout, ils ne sont pas moins importants pour autant. On dit à nos parents qu’ils ne nous perdront jamais. On leur dit que si eux aussi ont l’envie folle d’embarquer dans le projet de retrouver nos parents biologiques, ça serait encore plus génial!  On dit à nos parents qu’on est fiers d’être leur enfant et qu’on est reconnaissant pour ce qu’ils ont fait.  Mais surtout, on leur dit que la plus belle histoire d’amour, c’est celle entre eux et nous.

mains enfants parents familleSource image: Unsplash
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