Soir cafardeux, je me sens seule, manque de chaleur humaine. Je m’ennuie de me sentir femme auprès d’un homme. Tu sais, avoir l’impression d’être importante pour une personne de sexe opposé. L’instant d’un moment, d’une nuit, d’une vie.

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Il est vide mon lit, froid et j’ai besoin d’être prise dans une paire de bras. Un dilemme s’impose, briser ma solitude ou pas. Dois-je céder à la tentation d’être avec quelqu’un? Moi qui apprends la solitude.

Je suis bien, seule ici, mais je m’ennuie. J’en profite pour explorer les opportunités. J’ai une idée! Pourquoi ne pas essayer l’application Tinder? Ça m’engage en rien, j’ai juste envie de découvrir et ça ne fait pas de mal à personne.

J’avais entendu parler de cette application pour la première fois en 2015 par un policier de Rouyn-Noranda. Je faisais une recherche afin de connaitre s’il y avait une corrélation entre l’utilisation des réseaux sociaux et la violence conjugale chez les couples 18-35 ans de la région.

Je dois avouer être mal préparée lorsqu’il m’a parlé de Tinder. Heu, c’est quoi ça? Quel moment mémorable dans une vie d’écouter un policier t’expliquer c’est quoi cette affaire-là, Tinder. Étant en couple et pas trop intéressée, j’en restais à l’explication du policier, pas besoin d’expérimenter.

Sauf que là, c’est différent, j’ai laissé mon (ex) homme. Même que, à bien y penser, je suis célibataire pour la première fois depuis que j’ai 14 ans… Mais ça, on en reparlera! Je suis maintenant dans une nouvelle ville et je désire être seule, mais pas en même temps parce que c’est dur d’être seule. Je l’essaie!

Je crée mon compte, je swap souvent à gauche. À présent, c’est enrichissant, je m’aperçois que je sais ce que je ne veux pas. À la fin de ma première soirée, j’ai trois matchs, deux qui me parlent, l’autre je le flush. Deux gars super intéressants qui rejoignent mon domaine par le travail avec autrui ; un prof et un éducateur spécialisé.

Je me couche heureuse, douteuse.. Si ça fonctionnait et que ça brisait mes plans de solitude. Cacaouette……..

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Le lendemain matin, je parle avec ma sœur et elle me dit de faire le test de swap les 10 prochains gars à droite. Parce qu’elle le dit, c’est fastoche de matcher. Ah bien ciboulot, 10/10 matchs! WOW, je me sens si unique! Sérieusement, comment je peux plaire à autant de garçons, génération d’abondance toi, je l’ai flush tous.

Je parle plus sérieusement au prof. J’ai un projet de renforcement positif pour le travail à faire, un beau bricolage. Je l’invite à m’aider, ça peut être cool de faire ça à deux. Je me rends chez lui, pour moi ce serait trop bizarre d’inviter un étranger chez ma sœur et je vous le confirme, elle n’aimerait pas ça.

J’arrive là, pas capable de me stationner en parallèle, choisis un emplacement trop serré. Change de place pis malheur, il est dehors devant chez lui avec le chien des voisins qui fait ses besoins. Ça commence bien…

Je suis étonnamment froide, pas intéressante et jugeant la situation. Lui, il est gentil et il m’aide à découper, sauf qu’il comprend dans quoi il s’est embarqué (gros bricolage). À force de discussions courtes et remplies de malaises, il me dit: « toi, tu cherchais quoi comme relation en t’inscrivant sur Tinder »?

Fudge! Je ne le sais pas moi ce que je fais sur Tinder. Pourquoi il me demande ça? À bien y penser, je ne sais même pas ce que je fais ici, chez lui. Je pense en parlant et nomme ne rien rechercher en particulier, peut-être un ami pour mieux m’intégrer à la ville. Comme si j’avais la force de lui avouer, de m’avouer un manque de chaleur humaine et un sentiment de solitude.

J’ai l’impression d’être en rechute.

Au fond je le juge ce site-là, c’est trop facile, pas naturel et ça enlève la magie d’une vraie rencontre, reste que je suis quand même là, devant lui. Il me fait comprendre qu’il en a plein des amis, si occupé qu’il a de la difficulté à les voir. Il aurait pu faire autre chose de son dimanche après-midi que du bricolage avec une inconnue désireuse d’un ami.

Je me sens coupable, gênée. Oups… La fille vient de réaliser qu’une rencontre ça se fait à deux. Pas avec elle, son nombril, ses besoins et ses cafards. Je suis partie, au diable le bricolage, ma fierté est touchée et je prends une débarque.

J’ai supprimé Tinder en rentrant chez moi, deux jours c’est assez. J’y retournerai peut-être une autre fois, quand je serai prête. Disons-le, il avait raison le prof.

Sur ce, prends ton mal en patience jeune fille quand tu te sens seule. Va t’acheter de la crème glacée, mets ton film préféré, colle tes toutous, téléphone un ami. Profites en pour prendre soin de toi, parce que le message que tu lances en datant naïvement, c’est que t’es prête. Mais non. Quand tu le seras pour vrai, vas y à fond, parce qu’en attendant t’es mieux dans ton salon.

[Mlle Carfard]

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